Les règles urbanistiques et le développement des fermes partagées
- Session : 2021-2022
- Année : 2022
- N° : 683 (2021-2022) 1
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Question écrite du 30/05/2022
- de CREMASCO Veronica
- à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
Ce 16 mai, dans La Libre Belgique, un article mettait en évidence l'émergence du modèle des fermes partagées qui pourrait être une « clé de la résilience de l'agriculture familiale ».
Dans cet article, un des porteurs du projet de la ferme partagées de la Gageole, déplore que « malheureusement, le bât blesse à plusieurs niveaux, à commencer par celui urbanistique. » Il poursuit : « Le permis d'urbanisme nous a été refusé par la commune qui n'a pas reconnu la dimension agricole de notre projet,… C'est un problème d'ordre idéologique. Après trois années de lutte, le permis a finalement été obtenu en recours auprès de la Région wallonne. »
Ce 18 mai, vous avez réaffirmé votre soutien aux « modèles renouvelés d'accès à la terre » mais le format de la question d'actualité n'a pas permis d'appréhender les verrous urbanistiques. L'implantation en terre agricole demande de respecter les critères de la zone définie au plan de secteur : le logement ne peut être que celui de l'agriculteur.
Dans le cas de modèles qui se réinventent comme les fermes partagées, quelles mesures seraient-elles à prendre selon Monsieur le Ministre pour faciliter leur émergence ? Évolution du cadre légal ? Si oui, comment ? Sensibilisation des communes ? Avec quels moyens ? D'autres pistes ?
Réponse du 21/06/2022
L’accès à la terre et le coût de la terre sont deux problèmes importants et transversaux. Ma priorité consiste à permettre aux jeunes agriculteurs ou aux nouveaux agriculteurs d’accéder à la terre, en déployant de nouveaux modèles acquisitifs. J’ai donc lancé une vaste réflexion avec l’ensemble des parties prenantes, sous la forme d’Assises de la terre, avec pour objectif de mettre en place des modèles novateurs, et au besoin en modifiant le cadre légal. Je renvoie l’honorable membre à cet égard aux différentes réponses que j’ai données à ce sujet, notamment à l’occasion d’une question orale que m’a adressée Mme Kelleter lors de la séance de la Commission du 14 juin 2022.
En matière d’aménagement du territoire, je ne pense par contre pas qu’une adaptation du cadre légal soit nécessaire.
Le nombre d’exploitations agricoles sans repreneur ne fait que croitre. Les bâtiments existent, et ils peuvent être reconvertis, transformés, ou agrandis pour les besoins de chaque projet particulier, soit sans dérogation au plan de secteur si l’affectation est agricole, soit avec dérogation au plan de secteur si elle ne l’est pas, ou ne l’est pas entièrement.
Les articles D.IV.6 et suivants du CoDT permettent d’autoriser les travaux de transformation, d’agrandissement, de reconstruction ou la modification de destination des bâtiments existants avant l’entrée en vigueur du plan de secteur, ou des bâtiments qui ont été autorisés, pour des affectations qui ne sont pas conformes au plan de secteur.
Les bâtiments de ces exploitations agricoles sans repreneur, dont certains ont un intérêt patrimonial indéniable, risquent de devenir des chancres s’ils sont abandonnés.
Le permis d’urbanisme de la ferme partagée de « la Gageole » a ainsi été octroyé en recours par mon prédécesseur, en dérogation au plan de secteur parce que l’affectation prévue n’était pas totalement agricole. Il est clair qu’un projet de ferme partagée, avec des terres qui restent attachées à la ferme et qui sont exploitées, correspond mieux à la zone agricole qu’une promotion immobilière des seuls bâtiments.
Le CoDT tel qu’il existe aujourd’hui permet d’autoriser les projets conformes à la destination agricole du plan de secteur, avec le logement du ou des exploitants.
Pour les autres projets qui ne sont pas conformes ou pas totalement conformes, même si les conditions de la dérogation sont réunies, la dérogation n’est pas un droit dont bénéficient les demandeurs, mais bien une faculté laissée à l’autorité qui délivre le permis d’urbanisme. Cela permet à cette autorité de refuser un projet s’il conduit à une artificialisation nouvelle de terres exploitables, elle sait que c’est l’une de mes autres préoccupations majeures. Cela lui permet également de veiller à concentrer les logements près des services et des équipements, en évitant les implantations trop excentrées, de conserver les bâtiments abandonnés d’intérêt patrimonial et de les réaffecter au mieux en fonction de leur situation dans ou en dehors d’une centralité, ou au contraire de pousser à démolir les bâtiments mal intégrés au paysage ou dans leur environnement bâti, etc.
Je n’estime donc pas qu’une action concrète soit prioritaire à ce sujet, les règles existantes permettent de gérer le territoire tout en accueillant ce type de projet de ferme partagée en zone agricole.