Maintien de l'équilibre entre le 1er et le 2ème pilier.
- Session : 2007-2008
- Année : 2007
- N° : 83 (2007-2008) 1
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Question écrite du 14/11/2007
- de CASSART-MAILLEUX Caroline
- à LUTGEN Benoit, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme
Le 20 novembre prochain, la Commission européenne présentera son propre bilan de santé de la PAC telle qu’elle a été réformée en 2003.
Cette réforme a introduit de nouveaux concepts dans la gestion des exploitations agricoles : paiement unique découplé des aides, la modulation et la conditionnalité. Toutes ces nouvelles dispositions sont entrées en vigueur sur le territoire de la Région wallonne le 1er janvier 2005.
A l’heure du bilan européen de la PAC, il semble intéressant de prendre connaissance du bilan de la Région wallonne sur cette nouvelle politique.
Voici près de trois ans que toutes ces dispositions sont appliquées, quel bilan Monsieur le Ministre peut-il en tirer au niveau wallon ?
Au niveau européen, on constate une tendance à vouloir octroyer plus de crédits à la politique de développement rural. Toutefois, l’équilibre entre le 1er et le 2ème pilier ne devrait-il pas rester au centre des préoccupations ?
Quelle position Monsieur le Ministre va-t-il défendre auprès de la Commission concernant le plafonnement des aides directes ? Concernant celles-ci, le Commissaire Fischer Boel envisage-t-il toujours un mécanisme de dégressivité ? Les fonds ainsi économisés seraient alloués à la politique de développement rural. Si un tel projet est présenté, Monsieur le Ministre le soutiendra-t-il ?
Réponse du 29/11/2007
Il y a seulement trois ans que la dernière réforme de la PAC est entrée en vigueur. Il est prématuré d’évaluer son influence tant positive que négative sur l’agriculture wallonne. En effet, bien d’autres facteurs interviennent pour influencer la situation de l’agriculture wallonne.
Ainsi, à titre d’exemples, les marchés des céréales et du lait se portent très bien alors que la maladie de la langue bleue, la hausse du prix du carburant et du prix des aliments pour le bétail pénalisent la rentabilité de certains types d’exploitations ; les prix mondiaux du sucre se sont envolés dans un premier temps pour s’effondrer maintenant. Je ne parlerai pas des aléas climatiques nombreux et variés qui influencent en bien comme en mal les récoltes. Il est donc difficile de faire la part des choses dans une période aussi courte pour expliquer la situation actuelle.
Je constate néanmoins que, malgré leur ampleur, ces nouvelles dispositions sont bien en place et que les aides directes découplées arrivent rapidement chez les agriculteurs. Pour rappel, la Région wallonne était la première en Europe à payer, en décembre 2005, ces aides pour un montant de 161.648.000 euros et, en 2006, à hauteur de 240.488.000 euros !
Il y a certainement des adaptations à effectuer pour assurer une meilleure répartition des aides, mais les principes devront être conservés. Entre le premier et le deuxième pilier, je parlerai davantage de « répartition » que « d’équilibre ». En effet, en termes de budgets européens, au niveau wallon, le rapport actuel est de onze pour le premier pilier à un pour le deuxième.
L’important, selon moi, n’est pas de savoir comment est réparti le budget mais plutôt de savoir « qui » bénéficie du soutien.
Je rappellerai tout d’abord que ces deux piliers font partie de la politique agricole et doivent donc être, avant tout, des outils de soutien et d’orientation de notre agriculture.
A mon sens, il est indispensable que la part du budget de la PAC actuellement réservée au bénéfice seul des exploitants agricoles soit maintenue. De même, il est primordial d’éviter des transferts entre piliers qui, sous couvert des objectifs très louables du deuxième pilier, consistent en réalité à une « renationalisation » de la PAC. Finalement, cela profiterait aux Régions les plus riches qui peuvent assurer l’apport régional nécessaire au cofinancement de ces budgets supplémentaires du deuxième pilier.
Je ne suis donc a priori pas opposé à une évolution de l’actuelle répartition des budgets entre les piliers, pour autant que ces budgets transférés puissent être réservés au monde agricole et qu’ils ne relèvent pas du cofinancement actuellement en vigueur pour les mesures du deuxième pilier.
L’ampleur des transferts et la nature des mesures qui en bénéficieraient font actuellement l’objet d’une réflexion avec le secteur.
Dans tous les cas, si hausse de la modulation il y a, je plaiderai pour que le plancher de 5000 euros exempté de modulation soit rehaussé, afin que les petits exploitants ne soient pas pénalisés.
En ce qui concerne le plafonnement des aides, la Région y était déjà favorable en 2003. On parlait alors d’un plafond de 300.000 euros. La Commission propose maintenant une réduction des aides au-delà de 100.000 euros. Peu d’agriculteurs wallons seraient concernés si un tel mécanisme était mis en place. Il n’y a donc pas lieu de refuser le principe du plafonnement, à la seule condition que les sommes ainsi libérées soient conservées pour le secteur, soit pour l’attribution de DPU aux nouveaux agriculteurs, soit en faveur de mesures agricoles du second pilier.
Dans ce débat concernant l’évolution de la PAC, au-delà des choix techniques, je suivrai deux lignes directrices :
1° assurer la stabilité et la prévisibilité :
- les changements en 2008 devront être limités car on ne peut changer la PAC tous les trois ans ;
- les changements au delà de 2013 doivent être connus car il faut du temps au secteur pour s’adapter ;
2° instaurer plus de flexibilité : la Commission doit reconnaître les spécificités des Etats membres et accorder une plus grande flexibilité dans l’usage et la destination des fonds disponibles grâce à la modulation ou au plafonnement.
En aucun cas, ces deux outils ne peuvent être les instruments d’une réduction des moyens financiers mis à disposition des agriculteurs.
Je rappellerai, pour terminer, que le budget européen agricole demeure le seul à relever d’une politique entièrement intégrée au niveau de l’Union et que, lorsque l’on intègre les aides publiques attribuées à tous les niveaux de pouvoirs régionaux, nationaux ou européens, la part de l’agriculture n’est que de 3,5 %.
Nous sommes loin des déclarations caricaturales de l’ex-premier ministre Tony Blair ou du Ministre Vande Lanotte qui estimaient scandaleux que 45 % du budget européen ne soit réservé qu’à seulement 5% de la population européenne. Je vous rappelle que le secteur agricole représente, en 2007, 26.408 emplois directs en Wallonie et qu’un emploi dans l’agriculture génère environ trois emplois en amont et en aval.