Le contrôle par la Wallonie des exportations de matériel sensible
- Session : 2011-2012
- Année : 2011
- N° : 45 (2011-2012) 1
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Question écrite du 21/11/2011
- de TIBERGHIEN Luc
- à DEMOTTE Rudy, Ministre-Président du Gouvernement wallon
L’exportation de certains biens et technologies ne demande pas uniquement une licence d’exportation, mais également une autorisation du gouvernement fédéral, comme prévu dans la loi du 9 février 1981 relative à l’exportation de matières nucléaires, d’équipements nucléaires, de données technologiques nucléaires et leurs dérivés.
Je désirerais savoir pour la période 2005 – 2011, et ce, année par année :
- comment Monsieur le Ministre-Président s’est assuré que le demandeur de la licence d’exportation a également demandé une autorisation dans les cas où les biens ou technologies concernés tombaient sous l’application de la loi fédérale ;
- combien des dossiers traités par l'administration de Monsieur le Ministre-Président nécessitaient également une autorisation du gouvernement fédéral ;
- dans combien de cas l’autorisation a été refusée et de quels pays il s'agissait ?
- dans combien de cas l’autorisation a été donnée et de quels pays il s'agissait ?
Réponse du 05/12/2011
Depuis 2003, la matière relative à l’importation, l’exportation et au transit d’armes a été régionalisée, à l’exception de la partie qui concerne le nucléaire qui elle est restée de la compétence fédérale.
Dès lors, d’une manière générale, lorsqu’une entreprise souhaite exporter des biens ou produits susceptibles d’être utilisés à des fins nucléaires, il lui appartient d’obtenir une autorisation préalable du ministre fédéral de l’Energie, en vertu de l’arrêté royal du 16 juillet 1993 modifiant l'arrêté royal du 12 mai 1989 relatif au transfert de matières nucléaires, d’équipements nucléaires ou de données technologiques nucléaires à destination des pays non dotés d'armes nucléaires.
Concernant l’implication possible de la Wallonie, il importe de faire une distinction entre trois cas de figures différents.
Le premier concerne les sociétés qui sont directement « actives » dans le nucléaire, c’est-à-dire les sociétés dont les produits relèvent d’une des listes annexées à l’arrêté royal du 16 juillet 1993. Concrètement, il s’agit essentiellement du Centre d’étude nucléaire de Mol et des sociétés belges qui fabriquent des presses isostatiques. Ces sociétés sont toutes situées en Flandre et aucune société wallonne ne figure dans cette première catégorie.
La seconde catégorie concerne les exportations de matériel dit de double usage. Concrètement, lorsque du matériel est considéré comme étant à double usage, conformément au Règlement (CE) n° 1334/2000 du Conseil du 22 juin 2000, instituant un régime communautaire de contrôle des exportations de biens et technologies à double usage, toute exportation de ce matériel doit nécessairement faire l’objet d’une demande de licence d’exportation. Cette demande est introduite auprès des autorités wallonnes et analysée avec la plus grande attention par nos services.
En fonction de sa nature spécifique, le matériel dit de double usage peut présenter un risque de type biologique, chimique, lié à la technologie des missiles, aux armes conventionnelles ou encore un risque de type nucléaire. Dans tous les cas, le dossier fait l’objet d’une analyse, puis d’une décision du Gouvernement wallon.
Ces décisions sont rendues possibles par le fait que la Wallonie participe aux travaux des différents régimes internationaux de contrôle des exportations. Ces régimes de contrôle réunissent les principaux pays producteurs afin d’analyser les risques spécifiques de prolifération et de définir une approche commune sur les différentes catégories d’équipements et technologies concernés. Pour information, il existe des régimes de contrôle pour chacune des catégories de risque, c’est-à-dire dans les domaines nucléaire, biologique et chimique, ainsi que dans la technologie des missiles, dans les armes conventionnelles et dans le double usage. Les décisions ou recommandations prises par ces régimes de contrôle sont appliquées de manière systématique par la Wallonie.
Concernant plus particulièrement le risque de type nucléaire et compte tenu du maintien de la compétence au niveau fédéral, une procédure spécifique est appliquée par la Région. Elle consiste à envoyer, pour avis, le dossier à la Commission d’avis pour la non-prolifération des Armes nucléaires (CANPAN). Cette commission relève directement du pouvoir fédéral. La Wallonie y participe en qualité d’observateur.
Concrètement, depuis 2005, trois dossiers relevant de cette deuxième catégorie ont été reçus par la Région et transmis à la CANPAN. Ils concernaient une exportation destinée au Maroc (dossier datant de 2011), une exportation destinée à l’Iran (dossier datant de 2008) et un transit destiné à l’Inde (dossier datant de 2010). Dans les trois cas de figure, la Wallonie a suivi la position de la CANPAN et donc de l’autorité fédérale (deux octrois et une suspension en ce qui concerne l’Iran).
La troisième catégorie concerne les dossiers ne relevant pas du Règlement européen sur le double usage mais pour lesquels la communauté internationale adopte une attitude particulièrement prudente. En l’occurrence, elle recourt alors notamment à la clause du « catch all », ce qui lui permet d’exercer un contrôle renforcé sur certaines destinations finales, en élargissant la liste des produits considérés comme du matériel militaire et/ou à double usage. La Wallonie s’inscrit pleinement dans cette dynamique.
Ici aussi, le risque peut être chimique, biologique mais aussi de type nucléaire. Dans cette hypothèse, le dossier est également transmis à la CANPAN, pour avis. Depuis 2005, deux dossiers relevant de cette catégorie ont ainsi été transmis. Ils concernaient une exportation à destination de la République Populaire de Chine (dossier datant de 2011) et une exportation à destination de l’Iran (dossier datant de 2009). Dans les deux cas, l’avis de la CANPAN a été suivi (accord pour la Chine et refus pour l’Iran).