Le risque sérieux pour l’emploi sur le site d’Aperam-Carlam à Châtelet
- Session : 2014-2015
- Année : 2015
- N° : 149 (2014-2015) 1
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Question écrite du 10/03/2015
- de KNAEPEN Philippe
- à MARCOURT Jean-Claude, Ministre de l'Economie, de l'Industrie, de l'Innovation et du Numérique
Monsieur le Ministre n'est pas sans savoir que la part de l’acier inoxydable exporté d’Asie vers le marché européen ne cesse d’augmenter. Il me revient que l’usine Aperam dans le bassin carolo, qui emploie actuellement de l’ordre de 450 personnes, atteint aujourd’hui moins de la moitié de sa capacité optimale de production, actuellement dédicacée exclusivement à la production d’acier inox.
Devons-nous avoir des craintes pour l’avenir du site et l’emploi ? Je le pense. Que la situation soit désespérée, je ne le pense pas, mais il est temps de suggérer certaines pistes d’amélioration.
Le marché global de l’acier révèle ses dysfonctionnements depuis de nombreuses années et le secteur de l’acier inox produit en Europe est touché de plein fouet par les assauts des produits asiatiques, issus principalement de Chine et de Taïwan. En 2013, ces deux pays avaient exporté pour 758 millions d'euros d’inox vers l’Europe. Les chiffres 2014 sont tombés: ces exportations ont encore augmenté de 50 %. Aujourd’hui, 2/3 à ¾ de l’acier inox consommé en Europe provient d’Asie.
Les raisons sont multiples et dépassent le cadre de notre propos.
En tout cas, je crains pour l’avenir de Aperam Châtelet.
Les avis de spécialistes sidérurgiques montrent qu’il est possible d’envisager une meilleure saturation de capacité de cette usine, avec un apport extérieur de brames d’aciers au carbone qui seraient relaminées sur le train à bandes de Carlam. Je pense en particulier à des aciers « de niches » tels les aciers au carbone à haute résistance et à forte capacité de déformation de + en + utilisés dans l’industrie automobile ou des aciers de formats non conventionnels à savoir de grande largeur de bandes que Carlam peut aisément laminer.
Est-il envisageable que Monsieur le Ministre suggère aux propriétaires du groupe ArcelorMittal de travailler en meilleure synergie avec les autres usines voisines de Sidmar et Dunkerque pour améliorer la capacité de production de Aperam Châtelet et dès assurer la pérennité de son train.
Je pense que cette usine à des atouts considérables, grâce à des modernisations récentes de ses outils technologiques, tels ses fours de réchauffage performants, sa septième cage et de bobineuses ultras puissantes ainsi que sa puissance globale intrinsèque.
Ces atouts font de Aperam Châtelet un des trains à bandes parmi les plus modernes d’Europe Il peut aisément s’approcher comme disent les lamineurs des « formats limites » à savoir laminer des bobines de grandes largeurs et d’épaisseurs plus minces, avantage considérable pour le relaminage à froid.
D’après mes renseignements, la saturation actuelle s’effectue préférentiellement sur les trains continus de Sidmar et Dunkerque au détriment de Châtelet.
Pour toutes ces questions et au vu de tous ces éléments, Monsieur le Ministre a-t-il déjà eu une discussion avec ArcelorMittal quant au devenir de ce site ? L’envisage-t-il ?
Des études sur l’avenir du site et son positionnement dans ce marché global ne pourraient-elles être réalisées sous son impulsion ?
Le ministre fédéral de l’Economie, Kris Peeters (CD & V), a dévoilé récemment que la Commission européenne déposerait prochainement une procédure d’enquête sur la problématique du dumping des prix des producteurs asiatiques d’acier inox sur le marché européen. Monsieur le Ministre en est-il informé ? Y est-il associé ?
Réponse du 15/04/2016
Aperam est né début 2011 de la scission des activités aciers inoxydables d’ArcelorMittal. ArcelorMittal et Aperam sont depuis lors, deux sociétés indépendantes mais ont toutes les deux le même actionnaire principal, représenté par la famille Mittal.
Le site d’Aperam situé à Châtelet comprend une aciérie, investie au début des années 2000 et le train à bandes à chaud anciennement dénommé Carlam. Il emploie directement et indirectement plus de 800 personnes, dont un peu moins de la moitié à l’aciérie.
L’activité de l’aciérie de Châtelet est progressivement montée en puissance, pour devenir la principale aciérie d’Aperam en Europe, avec une progression de 36 % par rapport à 2009 et de 25 % par rapport à 2011.
L’activité du train de laminage à chaud a été fortement touchée au moment de la crise mondiale de 2008-2009, qui a conduit à une importante réduction de la demande aussi bien en aciers plats carbone qu’en aciers plats inoxydables. En conséquence, ArcelorMittal a décidé de concentrer les volumes à laminer à chaud sur les laminoirs à chaud situés à côté des aciéries, ce qui n’est pas le cas de Châtelet.
La baisse d’activité du train de laminage à chaud en 2009 a conduit à une modification du régime de travail afin de préserver sa compétitivité dans une situation mondiale de surcapacités dans les aciers plats inoxydables.
Cette modification du régime de travail a été menée d’une façon socialement responsable, grâce à l’implication des partenaires sociaux.
L’évolution de l’activité des aciers plats carbone en Europe depuis la crise n’a pas permis de remettre en cause cette décision de gestion.
ArcelorMittal donne néanmoins systématiquement priorité à Aperam pour ses besoins de laminage à façon externe, comme c’est actuellement le cas.
L’activité du train de laminage à chaud de Châtelet pour les aciers inoxydables s’est progressivement redressée, avec une progression de 40% par rapport à 2009.
A la demande du secteur au niveau européen, représenté par EUROFER, et de plusieurs entreprises dont Aperam, une plainte pour dumping a été déposée à l’encontre des importateurs chinois et taïwanais. La Commission européenne a ouvert une enquête pour dumping – pour ces deux pays- et pour subventions abusives à l’encontre de la Chine seule. A ce jour, l’Europe reste la seule zone au monde ne protégeant pas son industrie des aciers inoxydables par rapport aux importations asiatiques.
Des contacts ont été pris avec le Ministre fédéral de l’Economie et ses services, afin qu’ils veillent à ce que la Belgique suive ce dossier de près et approuve les mesures antidumping et antisubventions. Les mesures provisoires sur les produits inox plats laminés à froid importés de Chine et Taiwan ont été publiées au Journal officiel 79d du 27 mars 2015. Les droits qui seront imposés aux aciers importés concernés seront de l’ordre de 11 à 12% pour les inox taïwanais et de 24,3 à 25,2% pour les inox chinois. Les parties ont un mois pour demander des informations complémentaires et présenter leurs observations à la Commission européennes. Cette décision, si elle se confirme, a permis de préserver quelque 650 emplois dans l’entreprise.