à LUTGEN Benoit, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme
Depuis des années maintenant, le cormoran a pris ses quartiers d'hiver en Région wallonne. Cet oiseau aime notre Région et, plus particulièrement, la province de Namur. L'hiver passé, de nombreux collègues se sont inquiétés de voir le nombre de cormorans passant les mois froids chez nous.
Il n'est pas besoin de rappeler les ravages que peut faire cet oiseau dans les endroits où il niche. Mais, avec une population estimée à 4.000 individus en Région wallonne, 0,5 kg de poisson nécessaire par oiseau et par jour et 120 jours (étalés entre décembre et mars), les cormorans vont ponctionner 240 tonnes de poisson chez nous, que ce soit dans les piscicultures ou dans tout autre point d'eau.
Je souhaiterais dès lors poser différentes questions à Monsieur le Ministre.
Le grand cormoran bénéficiait, au niveau européen, du statut d'espèce protégée. Est-ce toujours le cas ? Monsieur le Ministre va-t-il, dans le cadre du Conseil européen, plaider pour que cet oiseau perde ce statut ?
L'année dernière, Monsieur le Ministre annonçait la mise sur pied d'un plan de régulation internationale des populations de cormorans. Qu'en est-il ? La Suède, le Danemark et les Pays-Bas ont-ils collaboré avec ses services afin de mettre sur pied le plan de régulation ? Si ce n'est pas le cas, quels sont les obstacles qu'il a rencontrés et qu'est-ce qui a empêché la concrétisation d'une stratégie internationale ?
Enfin, Monsieur le Ministre compte-t-il, cette année encore, recourir aux dérogations afin de permettre l'élimination de certains cormorans ?
Au-delà des mesures nécessaires à prendre pour diminuer le nombre de cormorans, leur présence est inquiétante. Elle démontre que notre environnement se dégrade et, là, une stratégie internationale globale est indispensable. J'espère que les progrès et les efforts que nous faisons pour améliorer notre environnement porteront leurs fruits et permettront à nos petits enfants de vivre dans une Région à l'environnement préservé.
Réponse du 08/12/2005
de LUTGEN Benoît
Je suis d'accord avec l'honroable Membre pour dire que les cormorans, bien que de très beaux oiseaux, peuvent poser des problèmes, surtout en tête de bassin, où ils se nourrissent des jeunes poissons et des géniteurs issus des espèces wallonnes: par exemple, la truite fario de la Lesse. Les populations de cormorans ont explosé à l'échelle européenne. Néanmoins, tant qu'une décision de la Commission européenne n'est pas intervenue, ces oiseaux conservent leur statut d'espèce protégée. La France et la Suède ont déjà essayé de faire changer d'avis la Commission. Il ne faut jamais désespérer et j'interviendrai à mon tour auprès de Monsieur Stavros Dimas, Commissaire européen à l'environnement.
Le problème est d'autant plus crucial que de plus en plus de populations sont sédentaires et plus seulement hivernantes (5000 hivernants et 400 nids en Région wallonne).
Considérant l'impact important sur le revenu de la pisciculture, j'ai décidé :
- début février, de donner mission à l'Inspecteur général de la DNF de répondre aux demandes de destruction en délivrant une autorisation de destruction pour un nombre de cormorans à définir en fonction du nombre d'oiseaux fréquentant journellement le site, pour autant que la demande démontre que des moyens de prévention ont été essayés sans succès ; - de mettre tout en œuvre pour apporter systématiquement une aide technique dans la recherche de solutions de prévention.
Ces mesures seront toutefois insuffisantes. C'est pourquoi j'ai également demandé de définir les actions à prendre pour réguler les populations hivernantes de cormorans dans les endroits autres que les piscicultures.
De toute façon, la régulation doit être envisagée à l'échelon européen. C'est pourquoi, en vue de réguler les populations sur les sites de nidification, mes collaborateurs ont eu des contacts avec la Hollande, le Danemark et la Suède. Malheureusement, en Suède, le plan de régulation par le huilage des œufs et par le tir a été refusé par la Commission européenne.
Au-delà de la problématique des oiseaux, je défends surtout l'idée que des solutions doivent être trouvées pour protéger les poissons, en particulier dans le cadre des travaux sur et dans les cours d'eau. En effet, la destruction des berges, les canalisations, les diverses pollutions et autres exploitations touristiques excessives de nos rivières sont la cause du manque d'abris pour les poissons menacés.
Le placement d'abris à poisson devrait être systématiquement prévu dans tout cahier des charges concernant des travaux relatifs aux cours d'eau, qu'ils soient navigables ou non. Je me concerterai avec mon collègue en charge des travaux publics. Pour ce qui est des cours d'eau de ma compétence, l'administration est chargée de me faire des suggestions en ce sens, budgets à l'appui.
Je cherche d'autres solutions, en concertation avec les milieux intéressés.
Je souhaite enfin modifier les mécanismes d'indemnisation. Ainsi je proposerai au Gouvernement de demander au Parlement de modifier le décret et l'arrêté relatifs à l'indemnisation des dommages causés par certaines espèces animales protégées, modifications qui devront bien sûr être compatibles avec le budget prévu à ce poste.