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L'analyse de la coopération médicale entre la Wallonie et les régions avoisinantes lors de la seconde vague de l'épidémie de Covid-19

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2020
  • N° : 38 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 11/12/2020
    • de CORNILLIE Hervé
    • à DI RUPO Elio, Ministre-Président du Gouvernement wallon
    Les constats relayés par la presse et les éclaircissements de Monsieur le Ministre-Président à ma dernière question à ce sujet ne laissent guère de place au doute : en Wallonie, la saturation des hôpitaux a été évitée de justesse, notamment grâce aux transferts de patients vers les hôpitaux allemands, luxembourgeois et néerlandophones. La coopération et la coordination médicale transfrontalière sont donc nécessaires et salutaires.

    Selon le directeur médical du CHU de Liège, les transferts de patients vers les régions transfrontalières ont permis d'éviter à quelque 150 personnes un risque important de décès.

    Maintenant que le pic de contamination semble atteint et que l'ensemble des signaux sont au vert, quelle conclusion Monsieur le Ministre-Président tire-t-il de la coopération médicale transfrontalière de la Wallonie lors de la seconde vague de l'épidémie de Covid-19 ?

    Quelle évaluation fait-il de cette coopération lors de la seconde vague de l'épidémie de Covid-19  :
    - dans le cadre de la Grande Région ?
    - dans celui de l'Eurométropole ?
    - dans celui de l'Interreg France-Wallonie-Vlaanderen ?

    Plus globalement, quels enseignements doivent en être tirés ?

    Quels domaines devons-nous encore améliorer ?

    Quels sont les défis restants et a-t-il déjà des propositions pour les surmonter ? Je pense notamment au retour des éventuels défunts ou au traçage des soins reçus pour les mutuelles.

    Comment les pays et régions coopérants en matière médicale et sanitaire se répartissent-ils les différents coûts ? Existe-t-il un protocole précis où les pays/régions négocient-ils au cas par cas, selon le principe de solidarité ?

    Qu'est-il ressorti de la réunion du comité transfrontalier France-Belgique sur la crise de la Covid-19 du 5 novembre dernier ?
  • Réponse du 27/04/2021
    • de DI RUPO Elio
    Un des points à améliorer pour la coopération médicale transfrontalière est la gestion du tracing. Celle-ci devrait être améliorée dans le cadre du système d'alerte précoce et de réaction aux maladies transmissibles dans l'Union européenne (Early Warning and Response System – EWRS), l’outil européen permettant l’échange des données épidémiologiques.
     
    La Belgique a déjà fait remonter cette préoccupation via le SPF Santé publique vers le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (l’ECDC), qui gère l’EWRS. En effet, la transmission des informations n’est pas suffisamment rapide. Ce qui nécessite des contacts bilatéraux, qui sont certes efficaces, mais moins souhaitables en termes de protection des données. De plus, les informations communiquées arrivent sous différentes formes parfois compliquées à exploiter.
     
    Ci-dessous les éléments d’évaluation de la coopération lors de la seconde vague de l’épidémie de Covid-19.
     
    * Dans le cadre de la Grande Région :
     
    Les contacts au sein de la Grande Région sont nombreux depuis la seconde vague, tant au niveau administratif que politique.
     
    On peut ainsi citer :
    - Des rencontres virtuelles réunissant les chefs des Exécutifs de la Grande Région qui ont lieu à chaque fois que l’évolution de la situation épidémiologique l’exige (5 depuis l’automne).
    - Une conférence des Ministres de la Santé qui s’est tenue le 11 décembre 2020 et a abouti à l’adoption d’une déclaration d’intention qui vise la mise en place d’un plan de pandémie à l’échelle de la Grande Région en vue de renforcer la coopération sanitaire sous plusieurs aspects.
    - L’adoption d’un protocole d’accord, le 23 février 2021, entre les Exécutifs de la Grande Région sur le renforcement de la coopération et de la coordination dans le cadre du dépistage des travailleurs frontaliers et des frontaliers entre les partenaires de la Grande Région.
    - La participation de mon cabinet aux rencontres politiques organisées toutes les semaines par la Préfecture de Région Grand Est qui réunissent les responsables tant de la Grande Région que de la Conférence du Rhin supérieur.
    - La « task force Covid-19 Grande Région » qui se réunit par visioconférence de manière hebdomadaire depuis le 3 avril (avec la participation de l’AViQ et de WBI).
     
    Ces nombreux contacts ont permis une meilleure connaissance réciproque et des échanges tant au niveau de l’évolution de la situation sanitaire dans les différents versants que des mesures qui y sont prises.
     
    Les régions ont aussi su mieux relayer la situation propre à l’espace frontalier à leur niveau fédéral/central afin que les décisions qui y sont prises tiennent compte des réalités de ces populations. Ceci a permis d’éviter certaines situations dommageables observées lors de la première vague.
     
    Les confinements de la seconde vague ne se sont en effet pas accompagnés de fermetures strictes des frontières. Des restrictions à la circulation sont certes prises par tous les États, comme des obligations de quarantaine en cas d’entrée depuis une zone à risque, mais le fait frontalier est clairement mieux pris en compte.
     
     
    * Dans le cadre de l'Eurométropole :
     
    Dès le début de la crise sanitaire, WBI et la Délégation générale à Paris ont été impliqués dans l’organisation du comité de gestion transfrontalier de la pandémie, mis en place par l’Ambassade de France à Paris et la Préfecture des Hauts-de-France.
     
    Les effets des mesures prises par les Gouvernements français et belge se sont fait sentir de manière importante dans les régions frontalières, et notamment celle de l’Eurométropole où les liens entre voisins sont constants et multiples, impactant fortement la vie des habitants. Les autorités françaises et belges ont donc tenu à mettre en place un comité transfrontalier de gestion de crise qui s’est réuni à six reprises et qui a permis aux participants (représentants régionaux, du fédéral, de l’État français, de l’AVIQ, des Agences de santé françaises, des provinces frontalières belges de Luxembourg, Namur, Hainaut et Flandre-Occidentale) d’échanger sur les mesures prises, les derniers chiffres de la pandémie et les problèmes rencontrés au quotidien par les transfrontaliers.
     
    Ces nombreux contacts ont permis une meilleure connaissance réciproque et des échanges tant au niveau de l’évolution de la situation sanitaire dans les différents versants que des mesures qui y sont prises.
     
    Les régions ont aussi su mieux relayer la situation propre à l’espace frontalier à leur niveau fédéral/central afin que les décisions qui y sont prises tiennent compte des réalités de ces populations.
     
    Par ailleurs, l’Agence de l’Eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai continue à suivre l’évolution de la situation et l’impact que les mesures prises peuvent avoir sur les citoyens transfrontaliers dans l’idée de faire remonter des problèmes qui pourraient survenir. L’Agence participe également à la transmission de l’information relative aux mesures prises par les différentes autorités partenaires, toujours dans l’optique de simplifier la vie des transfrontaliers.
     
     
    * Dans le cadre de l'Interreg France-Wallonie-Vlaanderen :
     
    En ce qui concerne le programme Interreg France-Wallonie-Flandre, la coopération sanitaire transfrontalière constitue certainement l’une des pierres angulaires de la dynamique de coopération initiée depuis plus de trente ans.
     
    Au cours de la programmation Interreg V (2014-2020), 15 projets de coopération ont ainsi été soutenus dans le domaine de la santé. Déposés avant l’arrivée de la Covid-19, ils n’intègrent pas cette problématique.
     
    Face aux enjeux soulevés par l’épidémie, les partenaires du programme ont toutefois décidé de soutenir la mise en œuvre de mesures particulières dans le secteur sanitaire et social du programme. Un module de travail spécifique, intitulé « Covid-19 », a ainsi été adossé au projet 4.7.190. AP/Réseau-Service. Mis en œuvre par l’Agence régionale de la santé Hauts-de-France, l’Agence régionale de la santé Grand-Est et l’AViQ, ce module de travail entend prévenir l’isolement social des aînés et de leurs aidants familiaux. Il permet également d’entretenir les échanges entre les partenaires situés de part et d’autre de la frontière autour des dispositifs sanitaires et sociaux mis en place, d’en évaluer la pertinence et d’en tirer des enseignements dans le but d’améliorer la préparation des établissements et des services à de potentielles futures situations de crises.
     
    Enfin, compte tenu des obstacles et des faiblesses mis en lumière par la crise de la Covid-19, la coopération sanitaire transfrontalière reste évidemment au cœur des négociations sur le futur programme de coopération Interreg VI (2021-2027).
     
    Plus globalement, plusieurs enseignements ont été tirés de la coopération lors de la seconde vague de l’épidémie de Covid-19.
     
    Ainsi, la collaboration avec nos voisins durant cette crise sanitaire nous a fait prendre conscience de la nécessité de garder un contact étroit et de continuer à échanger régulièrement. Et ce, même si nous pensions que notre collaboration était déjà forte et que nous n’imaginions pas qu’elle pouvait être ébranlée.
     
    Il est donc indispensable de continuer à travailler dans ce sens et surtout veiller à adopter une communication efficace et pertinente en n’oubliant pas nos voisins. Bloquer les frontières comme cela a été le cas lors du premier confinement a été vécu de manière très difficile et traumatisante par de nombreux transfrontaliers.
     
    Si les task-forces Corona permettent de prendre connaissance de la photo épidémiologique des différents versants (nombre de cas, taux d’incidence, etc.) à certains rythmes, il serait opportun de disposer d’un outil partagé en temps réel à l’instar de PREDICTEST, développé par la France et, singulièrement, par le Grand-Est. Cet outil partagé pourrait être utile pour mieux monitorer les politiques en termes de mesures à prendre, selon l’évolution de toute épidémie.
    En ce qui concerne la question sur les défis restants tels que les retours des éventuels défunts, ceux-ci relèvent de l’accord signé entre l’État français, l’État belge et les collectivités en mars 2020 sur les transferts des défunts.
     
    Cependant, avant que ce texte ne puisse entrer en application, des étapes sont encore nécessaires. La Wallonie est actuellement dans l’attente de la réception de l’exposé des motifs qui doit être communiqué par le SPF Affaires étrangères. Ce n’est qu’après réception dudit exposé des motifs que le dossier d’assentiment sera transmis à mon cabinet en vue d’une présentation au Gouvernement pour une adoption en 1re lecture.
     
    Concernant le traçage des flux reçus par les Mutuelles, ce sont des données difficiles à chiffrer. En effet, l’INAMI, en tant que point focal national sur les prestations de soins servies pour des Belges à l’étranger, ne dispose pas de la granularité pour ces prestations.
     
    Le Collège inter mutuelliste régional pour les Organismes assureurs a été sollicité par l’AViQ sur cette question, mais malheureusement c’est un travail assez conséquent à effectuer et ces données ne sont pas encore disponibles.
     
    Pour la répartition des coûts au niveau franco-belge, cette question intervient dans le contexte des conventions ZOAST (entre hôpitaux).
     
    Dans le cadre de cette crise sanitaire, la Belgique n’a cependant pas transféré de patients vers les hôpitaux français. Elle a transféré une trentaine de patients des hôpitaux belges vers des hôpitaux allemands dans la cadre de la circulaire OA 2020/254.
     
    Enfin, les réunions du comité transfrontalier franco-belge ont permis à nos autorités d’échanger. La réunion du 5 novembre 2020 a permis à chacun d’exprimer et de présenter l’état de la situation dans sa région ainsi que d’exposer les nouvelles décisions prises par ses autorités pour freiner la propagation du virus (fermeture des restaurants, organisation des écoles…).
     
    Cette réunion a également permis de faire état de la bonne collaboration qui existait déjà entre l’AViQ et les Agences régionales de santé des Hauts-de-France et des Ardennes et qui a continué durant cette crise.
     
    Les contacts sont quotidiens entre ces administrations, notamment pour gérer la question des Français hébergés en maisons de soin et d’accueil en Wallonie.