L'application de la réforme du bail à ferme aux anciens baux
Session : 2020-2021
Année : 2021
N° : 442 (2020-2021) 1
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Question écrite du 07/05/2021
de FONTAINE Eddy
à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
La loi sur le bail à ferme a été modifiée par l'adoption du décret du 2 mai 2019 modifiant diverses législations en matière de bail à ferme. L'objectif premier était d'assurer une meilleure transparence et une meilleure sécurité juridique des relations entre bailleur et locataire.
Dans la pratique, il est régulièrement constaté que les locataires pensent être dans l'obligation de revoir leur situation avec leur bailleur dans les cinq ans à compter de l'entrée en vigueur du décret, soit à compter du 1er janvier 2020. Le sentiment semble être généré par les annonces régulières suivant lesquelles le bail à ferme devrait désormais être écrit.
Néanmoins, cet aspect semble incompris, car un bail verbal conclu avant l'entrée en vigueur du décret resterait parfaitement valable, et ce même en l'absence d'écrit.
Comme chacun le sait, parmi la réforme figure l'arrivée, dans le paysage du bail à ferme, de la fin de plein droit des baux par la seule échéance d'un terme. Auparavant, un bail à ferme s'est toujours renouvelé par périodes successives de neuf ans et il n'a jamais été possible d'y mettre fin par la seule arrivée de son terme (sous réserve du bail de carrière).
C'est dorénavant possible en droit wallon. En cas de bail ordinaire, c'est-à-dire lorsque la première période d'occupation est de neuf ans, le bail prend fin ainsi à l'arrivée de son terme, soit après 36 ans d'occupation.
Cet enjeu pourrait amener à des situations dramatiques où des locataires pourraient perdre du jour au lendemain une partie de leur exploitation.
Comment Monsieur le Ministre va-t-il agir sur la problématique de l'application immédiate du nouveau décret aux baux écrits en cours lorsqu'ils arrivent à échéance ?
De quelle manière pourrait-il envisager une tolérance applicable sous réserve du bail de carrière ?
Comment expliquer cette situation où des titulaires de baux écrits en cours semblent être plus exposés que les détenteurs d'un bail verbal ?
Réponse du 03/06/2021
de BORSUS Willy
Des informations en ma possession, il ressort que plusieurs questions juridiques sont actuellement débattues devant les Cours et tribunaux concernant les dispositions transitoires prévues par le décret du 2 mai 2019 modifiant diverses législations en matière de bail à ferme.
La première question est de savoir si le nouveau décret est immédiatement applicable aux baux écrits en cours. Parmi les spécialistes du droit, la réponse à cette question ne semble pas faire l’unanimité mais, si la réponse est affirmative, cela peut avoir un effet significatif. A titre d’exemple, tous les baux écrits classiques dont la première période est de 9 ans et qui ont été conclus avant 1984 auraient pris fin au 1er janvier 2020. Pratiquement, les deux premiers jugements rendus relatifs à cette question concluent différemment.
La deuxième question concerne la différence que le décret a opérée entre les dispositions transitoires des baux verbaux et celles relatives aux baux écrits. Aujourd’hui, un bail classique dont la première période est de 9 ans et qui a été conclu en 1980 ne prendra pas fin au même moment s’il a été conclu oralement ou par écrit. Certains spécialistes se demandent dès lors si les dispositions transitoires du décret ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution, qui garantissent le principe d’égalité et de non-discrimination. Une question préjudicielle vient d’ailleurs d’être posée à la Cour constitutionnelle par un Juge de paix à ce sujet.
Envisager une modification législative à ce stade est donc prématuré. Changer des dispositions transitoires est en effet un exercice très délicat dès l’instant où des actes juridiques ont déjà été posés depuis l’entrée en vigueur du décret. De plus, je souhaite d’abord connaître la position de la Cour constitutionnelle avant d’envisager quoi que ce soit.