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L'adaptation des accords de branche visant à réduire les émissions de CO2 des entreprises

  • Session : 2005-2006
  • Année : 2006
  • N° : 211 (2005-2006) 1

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  • Question écrite du 09/06/2006
    • de DETHIER-NEUMANN Monika
    • à ANTOINE André, Ministre du Logement, des Transports et du Développement territorial

    Nous disposons à présent d'une première évaluation des quotas d'émissions de CO2 alloués aux entreprises pour 2005.
    Il apparaît en effet que les émissions de CO2 des entreprises visées par ces quotas sont assez inférieures aux quotas qui ont été fixés par le Gouvernement wallon. Si le chiffre de 19% de sur-allocation se confirme, c'est un niveau plus élevé que celui qui avait été estimé. Ce constat est par ailleurs en lien avec la première évaluation des accords de branche au travers desquels les entreprises se sont engagées à augmenter leur efficacité énergétique et à diminuer l'intensité en CO2 de leurs productions. Il s'avère en effet que dans certains secteurs, le niveau des objectifs fixés pour 2012 est actuellement atteint. C'est à la fois une bonne nouvelle, puisque les entreprises ont réagi positivement aux accords de branche et contribuent donc à la réduction réelle des émissions de CO2 en Wallonie, mais c'est aussi une nouvelle plus préoccupante, parce que la sur-allocation des quotas fixés un peu partout en Europe peut déstabiliser la bourse du CO2 et donc freiner des investissements intéressants pour réduire les émissions de CO2. Nous avons d'ailleurs vu le prix de la tonne de CO2 baisser assez fortement en bourse suite aux annonces successives des niveaux d'émissions de CO2 inférieurs aux quotas dans plusieurs pays européens importants.

    Tant les accords de branche que le système d'allocations de quotas prévoient une évaluation intermédiaire de leur mise en œuvre et la possibilité, si nécessaire, de les adapter. C'est évidemment une bonne formule que de prévoir des évaluations rapides de mécanismes nouveaux et complexes, afin de pouvoir rapidement y apporter des corrections, s'il apparaît que leur mode de fonctionnement ne permet pas d'atteindre les objectifs visés, ou si les évolutions conjoncturelles sont telles qu'ils peuvent rapidement être dépassés.

    Nous pouvons d'ores et déjà estimer que la très forte hausse du prix du baril de pétrole depuis plus de deux ans maintenant influence effectivement l'attitude des entreprises et modifie considérablement l'impact de telle ou telle mesure. En effet, les accords de branche établis en 2002 ou en 2003, qui visaient à soutenir la réalisation d'investissements d'économie d'énergie rentabilisables en quatre ans maximum, sont parfois dépassés dans la mesure où aujourd'hui, ces mêmes investissements pourraient être rentabilisés dans certains cas en moins d'un an. Cela peut déjà expliquer pourquoi certaines entreprises sont déjà au niveau fixé pour 2012. Mais cela ne garantit nullement qu'elles maintiennent cet objectif jusqu'en 2012.

    Cette évolution des prix qui perturbe les accords de branche et cette première surévaluation

    générale des quotas d'émissions de CO2 au travers de toute l'Europe montrent bien qu'un premier ajustement de ces deux mécanismes complexes pour mieux coller à l'évolution du contexte et à la réalité semble donc bien nécessaire. Cet ajustement doit bien évidement se faire dans la logique et l'esprit des décisions initiales, à savoir de diminuer les émissions de CO2 des entreprises, au moindre coût pour elles et pour les pouvoirs publics.

    Je souhaite interroger Monsieur le Ministre au sujet des accords de branche. J'interpellerai par ailleurs son Collègue en charge de l'Environnement relativement au plan d'allocation.

    Monsieur le Ministre n'estime-t-il pas que cette situation, par ailleurs, dans plusieurs rapports d'évaluation intermédiaire de ces accords, on observe que si les grandes entreprises des secteurs engagés ont bien réalisé des investissements économiseurs d'énergie et de CO2, les plus petites entreprises de ces secteurs ne les ont pas suffisamment réalisés, ce qui les pénalise fortement. Cette situation m'interpelle tout particulièrement, car cela fragilise les PME face à la hausse des prix de l'énergie. Comment allez-vous tenir compte de cette situation dans l'adaptation des accords de branche ?

    Je voudrais enfin interroger Monsieur le Ministre sur la publicité des rapports sectoriels des accords de branche. D'après le Code wallon de l'environnement, ceux-ci doivent être accessibles au public. Or, il me revient que plusieurs d'entre eux ne le sont pas. Pourrait-il me confirmer cette information et m'en expliquer les raisons ? Il me paraît en effet important que nous puissions juger de ces rapports sectoriels en disposant de toutes les informations nécessaires pour ce faire, à savoir, des informations sur la réalisation des objectifs, les investissements réalisés en vue d'atteindre les objectifs, et les coûts directs et indirects que la conclusion des accords représentent pour les pouvoirs publics (exemples : prise en charge des audits, mais aussi exonération de la cotisation fédérale sur l'énergie, réduction du quota de certificats verts, …). L'ensemble de ces données devrait entre autres permettre d'apprécier le rapport coût-efficacité des accords de branche et l'impact de la hausse du coût de l'énergie sur cette efficacité.

    Après une première période de fonctionnement de ces dispositifs complexes, il me paraît utile d'utiliser tous les éléments d'évaluation disponibles, afin de les adapter pour inciter au mieux les acteurs industriels et financiers à diminuer l'impact de leurs activités sur les émissions de CO2 et d'aider au mieux nos entreprises tant dans la mise en œuvre du protocole de Kyoto que dans la perspective des futures réductions d'émissions de CO2 qui s'imposeront à elles dans les prochaines années.
  • Réponse du 28/06/2006
    • de ANTOINE André

    La question de l'honorable Membre aborde deux sujets à la fois : le plan d'allocation des émissions de CO2 et les accords de branche. Pour ce qui concerne le premier point, je laisserai évidemment mon Collègue Lutgen répondre.

    Si les deux dossiers ont historiquement été liés, ils répondent néanmoins à des conditions et modalités opérationnelles spécifiques.

    1. Les accords de branche constituent une démarche volontaire et non pas réglementaire. Par contre, les allocations de quotas relèvent du décret de transposition d'une directive européenne sur le sujet et peuvent être assorties de sanctions.

    2. La réalité des chiffres : le politique des accords de branche concerne, pour rappel, onze secteurs (bientôt douze), environ 90 % de la consommation d'énergie du secteur industriel. C'est environ 60 millions d'euros qui sont ainsi investis dans cet objectif chaque année par le secteur privé.



    Les objectifs des accords de branche concernent l'amélioration de l'efficience énergétique et la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

    Les premiers résultats de la réalisation des objectifs sont encourageants, mais nécessitent une poursuite des efforts de tous les secteurs concernés ; en outre, les résultats peuvent parfois être influencés (positivement, mais aussi négativement) au cours d'une année par des événements conjoncturels (pas uniquement liés à la variation des prix de l'énergie) qui peuvent ne pas se reproduire ensuite :

    - objectif d'amélioration de l'indice énergétique : en 2004 (- 8,25) par rapport à l'objectif 2010-2012 (- 11,1 %) ;
    - objectif d'amélioration de l'indice des émissions de GES : en 2004 (- 9,43) par rapport à l'objectif 2010-2012 (- 11,7 %).

    J'attends les rapports de l'année 2005 qui devraient parvenir sous peu.

    D'autres secteurs sont entrés dans le processus pour aboutir à la conclusion d'un accord de branche (cfr. Gouvernement wallon du 24 mai : accord de branche avec secteur brique-céramique).

    Bref, il s'agit là probablement du volet le plus « significatif » , en termes d'impact, de la politique wallonne de l'énergie.

    3. Les rapports sectoriels ne font pas de distinction entre les entreprises petites ou grandes qui adhèrent au processus d'accord de branche. Chaque entreprise a déterminé son objectif individuel, sur la base de l'audit initial. La consolidation de l'ensemble des objectifs constitue l'objectif sectoriel. C'est l'objectif sectoriel qui compte du point de vue de la Région.

    Il est clair que l'entreprise est libre des moyens à mettre en œuvre et du timing pour atteindre son objectif.

    Les PME ne me paraissent pas particulièrement défavorisées, d'autant qu'elles peuvent bénéficier des primes du Fonds « énergie ».

    4. Les rapports ont été envoyés au Parlement et aux instances d'avis que sont le CESRW et le CWEDD. J'ai demandé à mon administration de vérifier qu'ils étaient également disponibles sur les sites Internet ad hoc.

    5. Une évaluation des accords de branche à mi-parcours est prévue : il ne me paraît cependant pas opportun, au-delà de ce qui est prévu dans les accords, de remettre en question aujourd'hui les engagements pris de part et d'autre, et ce, pour deux raisons :

    - ils reposent sur un processus d'analyse relativement long, basé sur un important travail de récolte de données liées à la consommation d'énergie de chaque entreprise et de chaque secteur concernés ;

    - parce que cela créerait une incertitude juridique dans le chef des secteurs et des entreprises qui se sont engagés dans un horizon temporel connu et accepté au moment de la signature et compte tenu des moyens identifiés à l'époque de la signature de l'accord. Je rends l'honorable Membre attentif à l'effet contreproductif (perte de crédibilité) qu'une telle révision pourrait avoir auprès des acteurs concernés. Rappelons qu'il s'agit actuellement du seul secteur qui s'est fixé des objectifs précis et qui est soumis à un plan d'allocation d'émission de CO2 et au système de l'émission trading.

    6. En ce qui concerne les contreparties aux efforts demandés aux entreprises, la prise en charge des audits est mentionnée dans chaque accord. Par contre, l'exonération des accises (partielle en 2005, totale en 2006) est sans objet pour 2004, de même la dégressivité de la cotisation fédérale. La réduction du quota sur les certificats verts est entrée en vigueur en 2004. Le rapport spécifique de la CWaPE sur les certificats verts en 2005, récemment publié sur son site, établit clairement ce que représentent pour l'année 2005 les exonérations de certificats verts pour les entreprises en accord de branche.

    Cela étant dit, que l'honorable Membre croit bien que la dimension d'évaluation de la politique énergétique de la Région wallonne est un aspect que je souhaiterais voir se développer de façon plus systématique et pour les différentes actions de cette politique.