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Le projet de construction d'une turbine hydroélectrique sur l'Ourthe à Fechereux

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 128 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 14/12/2022
    • de LEONARD Laurent
    • à DE BUE Valérie, Ministre de la Fonction publique, de l'Informatique, de la Simplification administrative, en charge des allocations familiales, du Tourisme, du Patrimoine et de la Sécurité routière
    L'hydroélectricité a beaucoup d'avantages qui compensent son coût plus élevé que l'éolien : une production prévisible et stable, particulièrement durant les 6 mois frais de l'année, une période d'exploitation deux fois plus longue qu'une éolienne et enfin, le meilleur bilan CO2 de toutes les sources connues de production d'électricité.

    Voici plusieurs années, un programme pour l'Ourthe a été élaboré prévoyant l'implantation de trois projets sur la commune d'Esneux : un à Mery (aujourd'hui terminé), un à Tilff et le dernier à Fechereux, sur lequel je souhaite interroger Madame la Ministre. En effet, ce projet se situe dans le cadre des boucles de l'Ourthe, site classé.

    Il y a plusieurs mois, la Commission royale des monuments et sites et fouilles (CRMSF) a émis un avis défavorable sur base d'arguments contestés par le porteur de projet. Le dialogue semble rompu entre les différents intervenants, au détriment de l'émergence d'un projet profitable à notre environnement, et le projet stagne malheureusement.

    Nous connaissons l'intérêt du Gouvernement pour ce type de production d'énergie. La CRMSF étant un organe consultatif sous la tutelle de Madame la Ministre, entend-elle prendre contact avec les intervenants afin de relancer ce projet et lever les blocages éventuels ?

    Compte-t-elle en discuter avec son collègue en charge de l'Énergie ?
  • Réponse du 09/01/2023
    • de DE BUE Valérie
    Comme l’honorable membre le sait, les enjeux liés au Patrimoine et à l’Énergie sont au cœur de mes préoccupations. Si la voie à suivre est claire à mes yeux, à savoir conjuguer et non opposer ces deux, il convient de nuancer la position à adopter face à chaque projet spécifique.

    Le classement du « grand site paysager de la boucle de l’Ourthe » a été pris en vertu d’un double intérêt scientifique et paysager. Celui-ci englobe le périmètre de la boucle de l’Ourthe, classée antérieurement, qui vise la protection et la conservation d’un paysage remarquable, fruit d’un rapport séculaire entre structure hydrogéologique avantageuse et activité humaine.

    Après avoir interrogé mon Administration et la CRMSF, il apparait que l’historique du projet qu’il évoque remonte à 2016, avec comme conclusion un avis défavorable rendu par le Comité d’accompagnement, lequel jugeait le site choisi pour l’implantation de cette future centrale hydroélectrique fort peu opportun.

    En octobre 2018, un deuxième projet est introduit. Il est validé et un certificat de patrimoine délivré. Les membres du comité d’accompagnement, composé entre autres de la CRMSF, de l’AWaP et du maître d’ouvrage, sont arrivés à un compromis entre production d’énergie verte et respect du patrimoine. Le projet était accepté à la condition exclusive d’aménagements paysagers et d’une valorisation du patrimoine, en compensation de la perte patrimoniale. Ces aménagements incluaient notamment une rivière de contournement aux fins de passe à poissons, ainsi que la mise en valeur des vestiges du canal de l’Ourthe. Malgré un déroulement encourageant des procédures, aucune demande de permis d’urbanisme n’a été introduite ensuite par le maître de l’ouvrage.

    En septembre 2019, un nouveau projet est présenté, sans compensation patrimoniale et avec une passe à poissons enterrée sous le chemin qui borde les berges de l’Ourthe. Ce projet vise l’installation d’une turbine VLH (« very low head ») immergée, légèrement plus en aval, et prévoyait l’installation d’une cabine à haute tension. La passe à poissons est quant à elle enfouie dans un tuyau souterrain de plus de 40 mètres de long.

    Pour ce troisième projet, l’ensemble du comité d’accompagnement a réitéré les mêmes réserves que celles émises sur le précédent projet de barrage hydroélectrique. Le comité est resté a priori défavorable à cette installation, de nature à fortement dénaturer un site de très haute valeur patrimoniale, et a demandé plus de précisions pour pouvoir se positionner en toute connaissance de cause sur le projet.

    Comme il l’aura compris, des aménagements dans un site classé ne sont ni impossibles ni refusés de manière brute. Néanmoins, de tels projets doivent se réaliser dans le respect des valeurs patrimoniales pointées lors du classement et au travers d’un dialogue entre toutes les parties prenantes. Le but de cette concertation vise la réalisation la plus qualitative possible des projets, au bénéfice du Patrimoine d’abord et des objectifs poursuivis par le demandeur ensuite.

    Enfin, je souhaite lui rappeler que, si j’ai effectivement la tutelle sur la CRMSF, il s’agit d’un organe consultatif situé au sein du Conseil économique, social et environnemental de Wallonie. Ses avis sont rendus de manière totalement indépendante. Il est acquis que le Patrimoine, qu’il soit naturel ou bâti, doit bénéficier d’un régime particulièrement attentif pour lui assurer sa conservation. Cependant j’estime également qu’il faut envisager le patrimoine dans la vie de la société. C’est ce à quoi je m’emploie au quotidien avec l’aide de l’AWaP comme de la CRMSF.