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Les risques de déforestation du Plan "Fit-for-55" européen en Wallonie

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 232 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 14/12/2022
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Parmi les enjeux auxquels la Wallonie devra faire face demain, deux se démarquent par leur importance : l'autonomie énergétique et l'autonomie alimentaire.

    Ainsi, comme le souligne la Déclaration de politique régionale, la Wallonie s'engage à soutenir les initiatives et politiques qui vont dans ce sens et rejoint aussi le plan climatique européen ambitieux « Fit-for-55 ». Le plan européen vise à réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre de l'Union européenne d'ici à 2030 et prévoit notamment de porter la part des énergies renouvelables à 45 % à cet horizon (contre 22 % en moyenne en 2020).

    Répondre à ces enjeux, demande de la disponibilité en termes de terres agricoles et par extension cultivables. Ce qui enjoint certaines entreprises à sacrifier des terres au profit de l'économie dans la bioénergie et l'agroalimentaire. Certains allant même jusqu'à favoriser la déforestation pour gagner de nouvelles terres.

    Le journal Le Monde publiait récemment, le cri d'alarme lancé par des scientifiques sur les risques d'une déforestation indirecte induite notamment par des mesures encourageant la combustion de biomasse.

    En effet, selon les modélisations qu'ont effectuées ces chercheurs sur le climat et l'usage des terres, en s'appuyant sur les projections de la Commission européenne, les mesures de l'UE nécessiteraient de consacrer 22 millions d'hectares à des cultures énergétiques en 2050, soit 20 % des terres arables européennes, de multiplier par quatre les importations de bois pour l'énergie et de convertir la moitié des prairies semi-naturelles. « Le Plan Fit-for-55 sacrifie le stockage du carbone et la biodiversité au profit d'un recours extensif à la bioénergie ». Ils pointent par conséquent, le risque d'augmenter la déforestation ailleurs dans le monde en consacrant des terres à la production de bois-énergie ou de biocarburants. Nous pouvons aussi envisager que l'Europe et la Wallonie ne seront pas épargnées.

    Madame la Ministre a-t-elle pris connaissance de ce rapport scientifique ?

    Comment la Wallonie compte-t-elle répondre à ces enjeux ?

    Quelles mesures sont à ce jour proposées ou d'application en vue de résoudre cette équation : répondre aux enjeux de climatiques et environnementaux de demain tout en préservant la nature aujourd'hui ?

    A-t-elle des échanges avec son homologue ayant en charge l'agriculture sur ces questions ?
    Le cas échéant, qu'en est-il ?
  • Réponse du 25/04/2023
    • de TELLIER Céline
    La Wallonie ne compte pas déforester son territoire ou celui d’autres pays pour répondre aux objectifs du paquet « Fit-for-55 » européen. Le code forestier garantit déjà la préservation de nos forêts. Complémentairement de nombreux projets sont en cours pour permettre à la fois de répondre à l’objectif climatique, tout en préservant nos ressources et les services écosystémiques essentiels qu‘elles nous offrent.

    En tant que Ministre de la Forêt, j’ai pu défendre les derniers mois une position ambitieuse dans le cadre de la règlementation européenne sur la déforestation importée. La Commission européenne, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne sont parvenus à un accord décisif sur le règlement visant l’interdiction de la déforestation importée. Le Parlement a également fait reprendre au texte la définition de la déforestation retenue par la FAO, permettant ainsi d’inclure tous les écosystèmes boisés sans se cantonner aux forêts primaires. Ce règlement ne vise pas que les produits d’importation, mais intègre également les bois issus des forêts européennes.

    Complémentairement à ces avancées internationales, le Plan Air Climat Énergie (PACE), adopté en première lecture par le Gouvernement le 16 décembre dernier, couvre ces deux thématiques et liste des mesures pour d’une part atteindre les objectifs de réduction des émissions, et d’autre part accroître la séquestration du carbone à travers notamment le boisement et la préservation des sols agricoles et forestiers wallons.

    En termes de régénération et plantations, les projets « Yes We Plant » et « Forêt Résiliente » se prolongeront dans les prochaines années, encourageant notamment les plantations d’arbres et de haies, la régénération et la reconstitution d’une forêt plus résiliente, mieux adaptée aux impacts des changements climatiques. Les Assises de la forêt, dont la phase de concertation s’est terminée en janvier, abordent également, avec l’ensemble des acteurs forêt bois, les thématiques de préservation de la forêt, tout en intégrant ses valorisations multiples et durables.

    D’autres appels à projets récents, destinés aux communes, visent à végétaliser leurs territoires (développement de parcs urbains, renforcement des maillages bleu et vert, végétalisation de quartiers) et développer les espaces verts pour être plus résilients et s’adapter aux impacts des changements climatiques.

    Enfin, le plan stratégique adopté dans le cadre de la nouvelle PAC impose également le maintien des arbres, haies et bandes boisées en zone agricole.

    Tous ces développements montrent la nécessité de traiter ces enjeux climatiques, énergétiques, agricoles, environnementaux, de façon transversale et intégrée.