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La prise en charge de l'écoanxiété

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 186 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 16/12/2022
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à MORREALE Christie, Ministre de l'Emploi, de la Formation, de la Santé, de l'Action sociale et de l'Economie sociale, de l'Egalité des chances et des Droits des femmes
    Le contexte socioculturel que nous traversons est à bien des égards, facteur de stress et d'anxiété. À tel point qu'aujourd'hui, beaucoup s'inquiètent de ce phénomène qui prend de l'ampleur comme l'écoanxiété. Le journal L'Écho posait récemment la question de savoir si nous devions nous en inquiéter.

    En effet, l'écoanxiété résulte d'une part des discours omniprésents sur les catastrophes climatiques, sociales et environnementales à venir et d'autre part sur les capacités individuelles d'y faire face.

    Dans quelle proportion évolue cette anxiété nouvelle en Wallonie ?

    Quels moyens sont envisagés en vue d'y faire face ?

    Madame la Ministre juge-t-elle nécessaire de collaborer, notamment avec la Fédération Wallonie-Bruxelles pour accompagner les jeunes qui en souffrent ?

    Si actuellement, ce phénomène ne fait pas l'objet d'une attention particulière, est-il prévu de l'observer ultérieurement ?
  • Réponse du 07/03/2023
    • de MORREALE Christie
    L’honorable membre a raison de relever l’inquiétude autour de cette problématique. Une étude menée par des scientifiques de l'UCLouvain dans huit pays d'Europe (dont la Belgique) et d'Afrique de langue française, a mis en avant qu’une personne sur 10 est fortement impactée psychologiquement par l'urgence climatique et souffre d'éco-anxiété. Ils définissent l’éco-anxiété comme "l'appréhension et les inquiétudes ressenties quant à l'étendue potentielle des impacts du changement climatique et à l'incertitude de leur nature spécifique, de leur calendrier et de leur localisation précise". La situation climatique amène en effet des personnes à percevoir l’avenir comme incertain. Or nous savons que le fait de souffrir de l’incertitude est une facette de l’anxiété en générale.

    Il semble bien que la notion elle-même d’éco-anxiété s’est imposée ces dernières années comme une conséquence du changement climatique, que la cause en soit indirecte n’en atténue ni la gravité ni l’étendue.

    Ainsi, il apparait comme un fait établi qu’une proportion importante de personnes, et plus sensiblement des femmes et des jeunes de moins de 40 ans, sont éprouvées par les questions climatiques au point d’en ressentir un mal-être et d’en souffrir.

    Quant à savoir comment les personnes réagissent, celles qui présentent des niveaux de stress plus faibles ont une réaction plus souvent positive. Si, d’un côté, l’éco-anxiété génère des peurs, elle peut, d’un autre côté, être associée positivement à la mise en place de comportements écoresponsables. Mais cela peut également inhiber, voire paralyser, les autres qui en souffrent de manière très intense ou de façon chronique. Cela veut donc dire que s’il n’est pas mauvais en soi de se préoccuper de la situation climatique, certaines personnes éprouvent une grande souffrance par rapport à ces inquiétudes. Il est donc nécessaire de pouvoir leur proposer de l’aide pour faire face à cette anxiété.

    Actuellement, aucune mesure spécifique n’a vu le jour pour atténuer ce phénomène. Il me semble nécessaire de continuer à le documenter et d’encourager la recherche en matière de prévention, ce qui implique bien entendu d’agir plus efficacement aussi au niveau des politiques du climat. Il est important de rappeler que les professionnels et les opérateurs amenés à suivre des personnes souffrant d’anxiété sont amenés à se documenter lorsque des problématiques importantes émergent, telles que l’éco-anxiété. D’un point de vue clinique, cela n’implique pas nécessairement de devoir développer de nouvelles prises en charge spécifiques.

    Je rappellerai encore le site www.trouverdusoutien.be bien que celui-ci ait une vocation très généraliste, et où les questions et l’aide éventuelle concernant l’anxiété due aux changements climatiques n’est pas spécifiquement abordée. Cependant, les mêmes services peuvent répondre à tout type de mal-être ou d’anxiété, quelle qu’en soit la cause.

    Outre les consultations organisées dans les services santé mentale, je voudrais également rappeler le dispositif des psychologues de première ligne et spécialisés du fédéral qui donnent accès de façon plus large aux soins psychologiques auprès de psychologues indépendants.

    Notre responsabilité en matière de prise en charge des troubles de santé mentale doit s’adapter constamment. Les déterminants de la santé évoluent, et avec eux les pratiques et les formations des prestataires sont amenées à évoluer pour apporter des réponses adaptées aux besoins et aux demandes.

    Ma conviction, cependant, est qu’il faut travailler davantage en amont sur tous les déterminants de santé et de société qui peuvent contribuer à soutenir la population.

    Face à la prise de conscience de l'impact du changement climatique sur l'environnement, certaines personnes sont incitées à agir, même par des gestes symboliques pour signifier leur attachement à la nature, tandis que d’autres sont tellement bouleversées par le problème qu’elles en deviennent comme paralysées. Les personnes fragilisées et « écoanxieuses » ont besoin d’une réponse spécifique pour retrouver leur énergie vitale, pouvoir se projeter dans l’avenir et trouver une place et du sens à la vie en société – et d’abord dans leur communauté de vie de proximité, leur réseau naturel.