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Dépollution du site Carcoke.

  • Session : 2008-2009
  • Année : 2008
  • N° : 94 (2008-2009) 1

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  • Question écrite du 25/11/2008
    • de DETHIER-NEUMANN Monika
    • à LUTGEN Benoit, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme

    Le site de Carcoke à Tertre, utilisé de 1928 à 1997 par un groupe de neuf charbonnages des deux bassins houillers du Borinage du Centre et d'une superficie totale de plus ou moins 33 hectares, a été le plus important siège de production de coke en Belgique.

    Via la Spaque, la Région wallonne a dû prendre en charge les frais de dépollution du site car elle ne disposait alors pas encore d'un décret sols lors de la fermeture du site. La première phase des travaux consistait en la démolition des installations industrielles, bureaux et annexes jusqu'à une profondeur sous terre de deux mètres. La Spaque a ensuite entamé la phase 2 des travaux en juin de cette année.

    La deuxième phase des travaux d'assainissement a été prévue en deux lots.

    Un premier lot pour :

    - le ramassage et l'évacuation (vers des centres de traitement ou d'élimination agréés) des divers déchets épars à la surface des deux tas cyanurés ;
    - l'excavation des terres cyanurées ;
    - le criblage de ces terres ;
    - le pompage fond de fouille, suivi analytique, traitement éventuel de ces eaux en cours de travaux et évacuation de ces terres.

    Un deuxième lot pour la valorisation des terres cyanurées vers un centre de traitement agréé.

    A l'époque, lors de l'étude de la Spaque, la contamination avait été jugée inquiétante avec la présence dans le sol de HAP, cyanure, Btex, métaux lourds, huiles minérales et en produits purs, type goudron. Cela s'est même accentué par le fait que la pollution s'est même propagée jusqu'à la nappe phréatique avec la présence de cyanure, métaux lourds, HAP, huiles minérales et Btex.

    Cela voulait donc dire que la pollution s'étendait sur plusieurs dizaines de mètres et que la remise en état allait coûter plusieurs dizaines de millions d'euros. Or, pour la seconde phase des travaux de la Spaque, il apparaît que la dépollution ne sera faite que sur 2 mètres, avec un budget de 1.541.851,72 euros, hors TVA, pour les deux lots de la phase 2.

    Monsieur le Ministre pourrait-il faire le point sur ce dossier et nous donner des éléments sur la pollution réelle du site ainsi que ce qui est réalisé précisément par la Spaque afin que la pollution soit traitée en profondeur, notamment pour protéger la nappe phréatique qui se trouve en dessous du site ?
  • Réponse du 02/12/2008
    • de LUTGEN Benoît

    Pour la parfaite information de l'honorable Membre, je tiens à faire le point complet sur ce dossier, en vous fournissant l’ensemble des éléments que vous demandez à propos de la pollution réelle du site, et en prenant le temps de vous exposer l’ensemble des actions entreprises et programmées sur le site par la SPAQuE.

    Comme vous le rappelez, le site de Carcoke, d’une superficie de plus de 32 hectares, a été le plus important siège de production de coke en Belgique, ainsi que de sous-produits issus de la distillation de charbons (près de 50 années à haut régime, suivies de 15 années à plus bas régime).

    Cofondée à la fin des années 1920 par un groupe de neuf charbonnages exploitant les bassins houillers du Borinage et du Centre, cette cokerie a été rachetée en 1970 par la société Hainaut Sambre, qui en a confié l’exploitation à la filiale Carcoke qui gérait également deux autres sites du même type (usine du Marly à Bruxelles et de Zeebrugge).

    Au cours des années 1990, en raison de contraintes économiques, la société Carcoke a mis progressivement fin à ses activités : fermeture de l’usine du Marly à Bruxelles en 1993, suivie de celle de Zeebrugge en 1996 et de celle de Tertre en juin 1997.

    Pris en charge par la SPAQuE dès 1998, le site a fait l’objet des différentes études préalables indispensables à sa réhabilitation.

    En ce qui concerne le sol, ces études ont mis en évidence des pollutions multiples : une pollution diffuse en hydrocarbures apolaires polycycliques (HAP), une pollution très étendue en cyanures, des pollutions ponctuelles en huiles minérales associées principalement aux emplacements d’anciennes citernes, des teneurs significatives relevées très ponctuellement en plomb, mercure et arsenic, ainsi que la présence de benzène au droit de deux forages.

    Concrètement, les analyses de sol ont montré que le site présentait trois « étages » distincts de pollution :

    - une pollution étendue en surface mais limitée principalement aux trente premiers centimètres, où les contaminants principaux sont des HAP et ponctuellement des cyanures ;
    - une pollution atteignant un mètre et parfois deux mètres de profondeur, où les contaminants principaux sont les HAP et cyanures ;
    - une pollution profonde rencontrée dans la zone de battement de la nappe des craies (contaminants décelés : HAP).

    En ce qui concerne les eaux souterraines, les analyses ont mis en évidence des concentrations en nickel, en cyanures, en HAP et en sulfates. Par ailleurs, la présence d’huiles minérales en aval de l’unité de débenzolage était également mise en évidence. On retrouve également des concentrations significatives en azote ammoniacal (NH4+), nitrates, nitrites, azote Kjeldahl, cyanures totaux, sulfates, phénols, potassium, calcium, nickel, zinc, benzène, phénanthrène, et exceptionnellement en chlorure et sodium.

    C’est une évidence pour tout le monde : la réhabilitation d’un site aussi lourdement pollué ne peut se réaliser qu’en plusieurs phases, non seulement pour des raisons techniques, mais aussi pour des raisons financières.

    Comme l'honorable Membre le rappelle lui-même, la Région wallonne n’a cependant pas tardé à intervenir : les actions visant à la réhabilitation du site ont été entamées quasi immédiatement après l’arrêt des activités industrielles. Elles se poursuivent encore aujourd’hui grâce au financement alternatif organisé dans le cadre du Plan Marshall.

    L'honorable Membre peut aisément comprendre que, dans une opération d’assainissement d’une telle envergure, il est absolument impératif de faire preuve de rigueur et de méthode dans le phasage des travaux. Des opérations préalables de déconstruction ou de démolition s’avèrent nécessaires dans la plupart des cas. Par la suite, il convient de veiller à la dépollution du sol, en s’occupant prioritairement des zones les plus polluées et en procédant du haut vers le bas, afin de garantir l’efficacité et la pérennité de l’assainissement ultérieur des eaux souterraines.

    Le programme d’actions (passées et à venir) de la SPAQuE a donc suivi cette logique.

    En ce qui concerne les actions déjà réalisées, elles peuvent être résumées de la manière suivante, par ordre chronologique :

    - 1998 – 1999 : étude sur la moitié Ouest du site ;
    - 1999 – 2000 : investigations en vue de recenser les différents produits liquides encore présents sur le site dans des réservoirs, caniveaux et caves ;
    - juillet 2002 : remise du rapport final de l’étude des caractérisations en vue d’identifier les sources et natures des contaminations, les modes de transfert des contaminants et les cibles avérées potentielles ;
    - fin 2002 : début de la première phase de travaux : Excavation des terres contaminées en cyanures mises en dépôt principalement autour des installations devant être démantelées ;
    - 2003 : transport et traitement des terres contaminées en cyanures ;
    - 2003 – 2004 : désamiantage des bâtiments, déconstruction sélective des bâtiments et valorisation des produits non pollués ex situ, réalisation in situ d’un confinement synthétique et minéral complet pour le regroupement des matériaux de déconstruction non valorisables;
    - juin 2003 : la SPAQuE débute les travaux de déconstruction ;
    - 11 juillet 2003 : dynamitage de l'ancien hall de stockage ;
    - 12 décembre 2003 : dynamitage de la tour de refroidissement, de la tour à charbon et de deux cheminées ;
    - avril 2004 : le site est vierge de tout bâtiment et toute structure ;
    - mai 2004 : fin du chantier de la première phase de travaux;
    - 21 septembre 2006 : publication au Moniteur belge de l’avis des marchés pour la réalisation de l’étude des faisabilités dans le but d’identifier les possibilités d’assainissement du sol et des eaux souterraines en fonction du contexte réglementaire, de la contamination des sols et des impératifs technico-financiers;
    - 4 décembre 2006 : notification des marchés pour l’étude des faisabilités;
    - 17 janvier 2007 : début de la phase d’investigations de terrain dans le cadre de l’étude des faisabilités;
    - février 2008 : fin de l’étude des faisabilités;
    - août 2008 : début de la deuxième phase de travaux : Evacuation de deux tas de terres cyanurées issus de l’ancienne activité ainsi que des sols sous-jacents jusqu’à deux mètres de profondeur;
    - novembre 2008 : fin du chantier de la deuxième phase de travaux.

    Pour la suite, les actions programmées par la SPAQuE sur le site sont résumées ci-après :

    - janvier 2009 : début de la troisième phase de travaux : Réhabilitation des sols les plus contaminés, c’est-à-dire des noyaux de pollution en hydrocarbures volatils se trouvant essentiellement au niveau de l’ancienne unité de traitement des gaz et de l’usine à benzol. En outre, caractérisation complémentaire de certaines parties du site pour lesquelles des inconnues doivent encore être levées et pompage des eaux de la nappe des craies pour examen et traitement en vue de la préparation de la quatrième phase des travaux ;
    - décembre 2009 : fin prévue de la troisième phase des travaux ;
    - 2010-2011 : quatrième phase des travaux : traitement de la zone saturée dans le cadre d’un marché global de traitement des eaux de la nappe polluée et traitement des zones contaminées en métaux lourds, HAP et hydrocarbures volatils qui n’ont pas encore été abordées lors des phases précédentes.

    La réhabilitation du site de Carcoke est un travail long et difficile, en raison des importantes pollutions constatées dans les sols et dans la nappe phréatique.

    A ce jour, plus de 12 millions d’euros ont été engagés pour les études et les travaux réalisés ou en cours et, selon les prévisions de la SPAQuE, on s’attend à ce que près de 20 millions supplémentaires soient nécessaires pour achever complètement le travail, dont l’échéance devrait survenir à la fin de 2011.