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Avenir des agrocarburants

  • Session : se2009
  • Année : 2009
  • N° : 49 (se2009) 1

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  • Question écrite du 16/09/2009
    • de EERDEKENS Claude
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    Il y a quelques années, suite à la volonté de réduire l'impact de l'énergie fossile, la piste des agrocarburants a été mise en valeur.

    Ceux-ci étaient considérés comme allant dans le sens d'une recherche d'énergie alternative et d'autres y voyaient une façon de soutenir l'agriculture locale ou régionale.

    A-t-on pu à ce jour dresser le bilan des points positifs et négatifs des agrocarburants en Belgique ou ailleurs?

    Faut-il poursuivre de nouveaux investissements en la matière ou se contenter des outils actuellement existants?

    Sur le plan éthique, le premier réflexe peut être de considérer qu'un agrocarburant peut aggraver la crise alimentaire. C'est dire qu'il s'agit d'un débat complexe sur le plan éthique, sur le plan des relations nord-sud, sur le plan environnemental, économique et écologique.

    Pour conclure, quel est, sur ce point précis, la position de l'actuel Gouvernement wallon?
  • Réponse du 12/10/2009
    • de NOLLET Jean-Marc

    Sur le territoire belge, huit unités de production ont reçu un agrément pour produire un certain quota de biocarburants (également appelés agrocarburants). Les mélanges d'essence et de diesel qui utilisent ces quotas sont en partie défiscalisés (système d'incitant fiscal à l'incorporation de « composant bio » dans les carburants fossiles). Ces quotas ont été fixés pour 6 ans (2007-2013) afin de permettre à la Belgique de tendre vers l'objectif de 5.75 % en 2010. Afin de garantir l'écoulement de la production de ces agrocarburants auprès des entreprises pétrolières. le Gouvernement fédéral a récemment décidé d'imposer aux pétroliers un pourcentage minimum d'incorporation d'agrocarburants dans les carburants classiques.

    En Région wallonne, deux unités de production d'agrocarburants sont actuellement en service:

    - Neochim S.A, située à Feluy, qui produit du biodiesel depuis fin 2007, avec une capacité de production de 7.60.000 tonnes par an ;
    - Biowanze, filiale de CropEnergies S.A .• située à Wanze, qui produit du bioéthanol avec une capacité de production de 300.000 m3 par an.

    Les matières premières agricoles alimentant ces deux sites de production sont principalement le colza, le froment et les betteraves sucrières.

    La biomasse utilisée dans les unités belges de production répond à un cahier des charges défini dans la loi du 10 juin 2006 relative aux biocarburants, laquelle fixe notamment des critères environnementaux (bilan des gaz à effet de serre le plus favorable possible, meilleure efficacité énergétique de l'ensemble de la filière), agronomiques (doses les plus faibles de pesticides et d'engrais), de proximité (distance la plus courte entre le lieu de la production de biomasse et l'unité de production), etc. Cette approche a incité une production de biomasse énergétique centralisée en Europe avec une importation marginale de composés importés tels que l’huile de palme et de soja.

    Cette biomasse d'origine extra européenne devrait représenter moins de 10 % du volume de biomasse nécessaire pour produire les agrocarburants agréés en vue d'atteindre les objectifs de 5,75 %. En dehors de ces deux systèmes d'encouragement, rien n'empêche un producteur de mettre sur le marché des agrocarburants (dans le respect des normes de qualité minimum des carburants et de la législation en matière d'accises).

    Dans le cadre de la directive européenne relative à la promotion de l'énergie produite à partir de sources renouvelables (2009128/EC), les Etats membres vont devoir transposer les critères de durabilité pour les biocarburants et les bioliquides, tels que prévus à l'article 17. Les critères de
    durabilité principaux sont les suivants : .

    - un pourcentage croissant de réduction des émissions de gaz à effet de serre par rapport aux carburants fossiles ;
    - les biocarburants ne peuvent être produits à partir de matières premières provenant de terres de grande valeur en termes de diversité biologique ou présentant un important stock de carbone;
    - les matières premières agricoles cultivées pour la production de biocarburants doivent être obtenues conformément aux règles « environnement » d'application dans le cadre de la politique agricole commune.

    Le travaux des Etats membres ne sera pas négligeable en matière de critères de durabilité. Je compte bien participer activement, de concert avec mon collègue Philippe Henry, à la nécessaire concertation entre t'Etat fédéral et les entités fédérées à ce sujet. En effet, une obligation est prévue pour les opérateurs économiques de montrer que les critères de durabilité ont été respectés. Par ailleurs. dans le cadre de son rapport à la Commission sur les progrès réalisés en matière d'énergies renouvelables, chaque Etat membre devra examiner une série d'Impacts potentiel des biocarburants tels que:

    - les développements Intervenus dans la disponibilité et l'utilisation des ressources de la biomasse à des fins énergétiques;
    - les changements intervenus dans le prix des produits et l'affectation des sols au sein de l'Etat membre, liés à son utilisation accrue de la biomasse et d'autres formes d'énergie provenant de sources renouvelables;
    - les incidences prévues de la production de biocarburants et de bioliquides sur la biodiversité, les ressources en eau, la qualité de l'eau et la qualité des sols dans l’Etat membre;
    - les impacts éventuels de la production et de la consommation de ces biocarburants seront donc étudiés de près, en se basant notamment sur l'expertise développée en Belgique (en particulier les résultats des projets de recherche de la politique scientifique fédérale) et en Wallonie (notamment l'expertise de Valbiom).

    En ce qui concerne l'enjeu éthique que l’honorable Membre évoque à la fin de sa question, je tiens à porter à sa connaissance que la Commission présentera en 2012 un premier rapport qui, outre les mesures nationales prises en vue de respecter ces critères de durabilité, contiendra une analyse de l'incidence de l'augmentation de la demande en biocarburants dans les pays tiers sur la viabilité sociaIe, sur la disponibilité des denrées alimentaires à un prix abordable, sur le respect des droits d'usage des sots ainsi que sur la mise en œuvre des conventions fondamentales de l'Organisation internationale du travail. La Commission proposera, s'il y a lieu, des mesures correctrices. Je serai particulièrement attentif à ce rapport.

    Enfin, quant à l'avenir des investissements en agrocarburants en Région wallonne, il faut savoir que la capacité installée en Belgique en bioéthanol et en biodiesel est actuellement supérieure à la demande. Dans le cadre du régime légal de soutien actuel aux biocarburants prévalant en Belgique, de nouveaux Investissements ne se justifient donc pas. Par contre, il serait pertinent de poursuivre et, le cas échéant, d’accentuer la Recherche et Développement afin d'améliorer le fonctionnement des installations existantes en diversifiant et assurant l'utilisation des co-produits (glycérine, solubles de blé, ... ) et en diversifiant les sources de matières premières. A cet égard, je tiens à souligner que la directive sus-citée prévoit que la contribution éventuelle des biocarburants de seconde génération et au-delà sera considérée comme équivalant à deux fois celle des autres biocarburants. Il y a donc là un réel enjeu pour la recherche et développement que je compte bien soutenir.