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Séquestration du CO2

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2009
  • N° : 123 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 20/11/2009
    • de EERDEKENS Claude
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    Les émissions de C02 étant responsables du réchauffement climatique, selon le GREC, des études ont-elles été menées en vue d'explorer la possibilité d'assurer la séquestration du gaz carbonique.

    L'une des pistes envisagées consiste à injecter le gaz carbonique dans des réservoirs profonds à l'état de fluide supercritique.

    Cette méthode semble être expérimentée au Canada, en Mer du Nord, en Australie, en Pologne et en France.

    La Wallonie s'est-elle hautement intéressée à cette technique? A-t-on consacré des programmes de recherches à ce propos?

    Le secteur industriel wallon et la multinationale qui maîtrise l'énergie en Belgique, SUEZ, disposent-ils de programmes de recherches à ce sujet?

    Ces programmes de recherches seront-ils exclusivement français? La Wallonie sera-t-elle à nouveau écartée d'un créneau de recherches important en matière énergétique?
  • Réponse du 07/01/2010
    • de HENRY Philippe


    Avant de détailler la situation régionale, je voudrais d'abord préciser que le captage et le stockage du CO2 (CSC) des grandes installations émettrices ne constituent qu'une solution de transition au potentiel limité, et dont la faisabilité, la durabilité et la rentabilité sont loin d'être assurées.

    En effet, si le GIEC estime que cette technique permettra de traiter en 2050, « de 20 % à 40 % environ des émissions mondiales de CO2 émanant des combustibles fossiles », de nombreux points posent question :
    - au niveau de la sécurité: stocker le CO2 signifie ne pas le détruire. Il est donc très important d'étudier la sécurité de l'enfouissement, l'imperméabilité des cavités, la résistance à l'activité sismique, la surveillance afin d'éviter les fuites;
    - au niveau de la consommation d'énergie: le CSC induit une consommation supplémentaire d'énergie pour permettre la capture, le transport et l'injection souterraine. Cette surconsommation d'énergie a un coût non négligeable. Selon le GIEC, le CSC élèverait le coût de production de l'électricité de 35 à 70 % dans une centrale au gaz naturel.

    De plus, cette technologie ne sera pas disponible à grande échelle avant 2030. Or, pour limiter le réchauffement climatique à moins de 2° C, les émissions mondiales de GES doivent diminuer à partir de 2015.

    Pour ces raisons, j'estime qu'il est nécessaire de fixer des règles très strictes pour la mise en œuvre de cette technologie.

    Au niveau wallon, mon administration finalise actuellement une note faisant le point sur les différentes méthodes de stockage de CO2 envisageables en Wallonie, d'après les données géologiques, leurs capacités estimées et les risques existants ou liés à une connaissance peu précises de la géologie. Ce document prendra également en compte la concurrence potentielle du stockage avec la préservation de ressources fossiles et avec le développement de la géothermie profonde.

    Il ressort de cet examen qu'en Wallonie, les réservoirs géologiques suivants pourraient être envisagés :
    - les faisceaux de veines de houilles inexploitées, essentiellement au sud des zones concédées existantes et anciennes (dans le Hainaut et peut-être au sud de Liège), il s'agirait d'injecter le CO2 entre 700 et 1500 mètres dans les veines de houille au préalable fracturées; en piégeant le CO2 par adsorption, sur la houille;
    - les stampes stériles à dominante gréseuse situées entre ces veines de houille, le CO2 y serait stocké dans les pores de la matrice gréseuse et, partiellement inerté par réaction chimique avec certains composés minéraux;
    - les aquifères profonds (en-dessous de 2.000 mètres et vers 5.000 mètres) du Hainaut, le CO2 y serait dissout dans l'eau et réagirait en partie avec la roche calcaire.

    Le stockage dans d'anciens travaux miniers ou dans des faisceaux de veines sous ceux-ci n'est pas envisagé pour des raisons de sécurité. Tout ces massifs ont été disloqués et fracturés suite à l'exploitation de la houille et sont percés d'au moins 6 à 7.000 puits connus (sans doute de plus de 20 à 25.000 si on tient compte des données historiques sur huit à neuf siècles d'exploitation). Sans compter que ces zones se trouvent sous les parties les plus densément peuplées du territoire wallon.

    Il reste en outre à régler certaines questions de droits d'utilisation du sous-sol, celui-ci n'appartenant pas, en vertu du Code civil, à l'Etat ou à la Région mais bien aux propriétaires de la surface, sans limites de profondeur. Dans les bassins houillers, il existe, en outre, toujours plusieurs dizaines de concessions minières, qui appartiennent à des sociétés industrielles ou financières ou à des particuliers : dans ces concessions, la houille (et le grisou y lié) appartiennent à ces concessionnaires, pour une durée illimitée, jusqu'à retrait de leur concession, après sécurisation des ouvrages miniers.

    Enfin, je n'ai pas connaissance d'études de rentabilité financière réalisées pour la Wallonie. De telles études restent liées à la connaissance suffisamment détaillée des gisements, qui conditionnerait la réalisation concrète d'un projet particulier.