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Introduction d'une taxe au kilomètre

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2009
  • N° : 129 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 24/11/2009
    • de PREVOT Maxime
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    Le Secrétaire d'Etat fédéral à la Mobilité, Etienne Schouppe, s'est déclaré, ce week-end favorable à l'introduction d'un système de tarification au kilomètre en Belgique. Il réagissait, ce faisant à l'annonce faite la veille par les Pays-Bas de la création d'un tel système dès 2012.

    Le système qui semble devoir être introduit aux Pays-Bas prévoit que chaque véhicule, exception faite des taxis et des transports publics, sera équipé d'un GPS afin de surveiller son kilométrage. La taxe sera évolutive selon la taille du véhicule, ses émissions de C02 et les heures de pointe. Démarrant à un montant de 3 centimes au km en 2012 pour une voiture moyenne, elle augmentera progressivement jusqu'en 2018. Il est prévu, en contrepartie, de supprimer les taxes à l'achat d'un véhicule.

    L’objectif de cette nouvelle taxe est de réduire les embouteillages et les rejets de C02. Le Gouvernement néerlandais table, grâce à ce mécanisme, sur une réduction globale de 15 % du trafic, de 10 % des rejets de C02 et de 7 % du nombre de tués sur les routes.

    Cette annonce a également provoqué la réaction du Secrétaire d’Etat bruxellois à la Mobilité, M. Bruno De Lille, qui a appelé les deux autres Régions à élaborer une norme commune pour parvenir à une tarification kilométrique en Belgique.

    Comment Monsieur le Ministre se positionne-t-il par rapport à cette mesure ? A-t-il pris contact avec ses Collègues en charge de la mobilité afin d'évoquer cette question ?

    A l'instar de son Collègue bruxellois, Monsieur le Ministre envisage-t-il de rencontrer le Ministre néerlandais des Transports pour étudier en détail le modèle hollandais ou d'autres options sont-elles à l’étude? Si oui, lesquelles?

    Le Collègue bruxellois de Monsieur le Ministre s'est déclaré favorable à un prélèvement selon le modèle hollandais, à tout le moins dans la zone desservie par le RER. Monsieur le Ministre est-il favorable à cette idée? J'attire son attention quant au fait qu'une telle proposition induirait indubitablement une discrimination entre les citoyens selon qu’ils fréquentent cette zone ou non. Elle risquerait également d'avoir pour conséquence de dévier tout un trafic de transit, qui est en grande partie responsable du congestionnement de la Capitale, vers d’autres axes.

    Monsieur le Ministre envisage-t-il, dans les modèles étudiés, un mode de contribution pour les véhicules étrangers, je pense notamment ici aux poids lourds qui transitent par notre pays? Si oui, peut-il nous en présenter les modalités? Des clés de répartition entre les Régions sont-elles étudiées? Si oui, sur quelles bases?
  • Réponse du 13/01/2010
    • de HENRY Philippe

    J'ai le plaisir de communiquer à l'honorable Membre les précisions suivantes relatives à sa question concernant le projet d'introduction d'une taxe kilométrique.

    Pour commencer, il faut préciser que l'introduction d'une telle taxe ne relève pas uniquement de mes compétences. Je pense qu'une telle taxe ne peut être raisonnablement imaginée qu'au niveau belge, dans un contexte européen cohérent, et non uniquement à l'échelle régionale. C'est pourquoi les concertations avec les Ministres fédéraux et régionaux concernés sont impératives.

    Je répondrai en deux temps : pour les véhicules privés tout d'abord, et pour les poids lourds ensuite.

    Actuellement, notre fiscalité automobile est basée sur la possession d'une voiture et non sur son usage. Ce système n'est que partiellement efficace, car il incite peu les gens à utiliser leur voiture de manière plus rationnelle. Il est aussi injuste, car il taxe de la même manière les gens qui font, ou ne font pas, des efforts pour se déplacer « mieux ».

    En effet, la congestion et les pollutions diverses engendrées par les voitures ont un coût pour la collectivité. Une manière de réduire ces coûts est de les imputer directement à ceux qui les engendrent, par application du principe du pollueur-payeur. La taxation des déplacements en fonction des kilomètres parcourus, en lieu et place d'une taxation forfaitaire, va dans ce sens, et serait de nature à améliorer sensiblement la situation sur nos routes.

    Ainsi que le mentionne le communiqué de presse du Ministère hollandais du trafic du 13 novembre 2009, l'introduction de la taxe implique, aux Pays-Bas, une abolition de la vignette et de la taxe à l'achat des véhicules, la neutralité budgétaire de cette initiative étant mise en avant. Il est d'emblée important de souligner que, dans ce pays, la taxe de mise en circulation à l'achat des véhicules est de 25% du prix d'achat, ce qui est nettement supérieur à ce qui se pratique chez nous. De plus, les problèmes de congestion qui ont motivé les Hollandais à revoir leur système sont différents de ce que nous connaissons en Région wallonne, et les possibilités de report modal y sont plus importantes.

    Le système qui sera mis en œuvre aux Pays-Bas ainsi que les autres systèmes existants actuellement sont bien sûr examinés avec la plus grande attention par mon administration. Une éventuelle application de ces principes en Région wallonne ne pourrait se faire sans une adaptation complète pour tenir compte des spécificités wallonnes.

    Pour ce qui concerne le risque de créer une discrimination entre les personnes fréquentant les zones les plus congestionnées, comme la Région bruxelloise, et les autres, je lui répondrai que cette discrimination est justement le moyen utilisé pour inciter les personnes à modifier leur comportement. Toute la difficulté réside donc dans la nécessité de trouver le juste niveau de taxation, qui incite les gens à se déplacer autrement, par transport en commun, par covoiturage ou en modifiant leurs horaires, sans pour autant créer de délocalisation ou de report du trafic. Les bénéfices escomptés d'une telle mesure se mesureront donc surtout sur les plans de l'environnement et de la congestion, de sorte que le surcoût de la taxation soit compensé par les gains de temps.

    L'honorable Membre le voit, si les avantages d'un tel système de taxation au km sont potentiellement importants, il y a aussi de nombreux obstacles et défis à relever, tant techniques que par rapport à l'évolution des mentalités, à la prise en compte des spécificités wallonnes, et face à la nécessaire concertation avec les autres Régions. Aussi, la déclaration de politique régionale prévoit l'ouverture d'un débat sur ce sujet au cours de la législature.

    Pour ce qui concerne les poids lourds, la déclaration de politique régionale prévoit d'établir, d'ici 2012, un système de tarification à l'usage de la route pour le transport routier de marchandises négocié au niveau belge (paiement en fonction des kilomètres parcourus), et ce, pour l'ensemble des poids lourds, y compris étrangers.

    La condition pour qu'un tel système puisse être envisagé est de dégager un accord sur :
    - le périmètre du réseau concerné ;
    - le mode de contrôle et de perception ;
    - la gestion et l'affectation des recettes, y compris l'affectation à d'autres modes de transports alternatifs afin de favoriser les transferts modaux.

    Il y a lieu, également, de tenir compte des directives européennes en matière d'interopérabilité.

    Un système comparable à celui mis en place en Allemagne, ou à celui prévu aux Pays-Bas permettrait, une fois les accords obtenus, de mettre en place des modalités de perception autorisant de différencier le péage en fonction de l'endroit, de l'heure de passage, des émissions du véhicule...

    Il est important de noter que, si les Pays-Bas mettent en œuvre une tarification au kilomètre, la cohésion entre les 6 pays du groupe d'origine de l'Eurovignette s'en verra altérée, puisqu'à l'instar de l'Allemagne en 2005, les Pays-Bas sortiraient du groupe Eurovignette en 2012. Ceci renforce encore davantage la nécessité de s'accorder sur un système de tarification à développer.

    La décision des Pays-Bas devrait être suivie de près en Wallonie et en Belgique afin que d'éventuelles décisions politiques puissent intervenir le moment opportun tout en tenant compte des échéances fixées chez nos voisins.

    La compatibilité des systèmes de contrôles et la cohérence des principes de tarification devraient être privilégiées de manière à éviter toutes distorsions intra européennes et conserver le principe de globalité tel qu'instauré initialement par l'Eurovignette.