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La situation préoccupante des apiculteurs en Wallonie

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2010
  • N° : 346 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 26/05/2010
    • de BAYET Hugues
    • à LUTGEN Benoît, Ministre des Travaux publics, de l'Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine

    Plusieurs sources ont mentionné récemment que le taux de mortalité des abeilles enregistré dans les ruches au sortir de l'hiver a frappé 30 à 40 % des abeilles, avec un taux très préoccupant de 60 % en Hesbaye, sans compter celles qui ont carrément quitté les ruches.

    Ces chiffres inquiètent grandement le monde de l'apiculture wallonne et les fruiticulteurs. Ils inquiètent également tous les défenseurs de l'environnement, d'autant plus que les pesticides semblent encore être montrés du doigt par les spécialistes.

    Que Monsieur le Ministre me permette de lui poser les questions suivantes:

    - a-t-il plus d'informations à nous communiquer sur le sujet;
    - a-t-il eu des rencontres avec l'Union royale des ruchers wallons;
    - prévoit-on des aides financières pour les apiculteurs touchés qui ne perçoivent aucune aide lorsqu'il y a perte d'exploitation, contrairement à d'autres métiers;
    - dispose-t-on de données similaires dans d'autres pays de l'Union européenne ou des études seront-elles menées en ce sens ?

    Monsieur le Ministre ne pense-t-il pas que les cultures bio, les zones Natura 2000 ou les zones de flore spontanée devraient être étendues pour la protection des abeilles?

    Je profite de l'occasion pour inciter Monsieur le Ministre à discuter de la problématique de l'apiculture dans le cadre de la présidence belge de l'Union européenne.
  • Réponse du 08/09/2010
    • de LUTGEN Benoît

    Je voudrais nuancer les résultats présentés en juin par les chercheurs de Gembloux Agro-Bio Tech.

    Premièrement, les résultats 2009-2010 ne sont que partiels : seuls 95 apiculteurs se sont manifestés contre 175 pour la période précédente et certaines régions sont largement sous-représentées. Il faut ensuite signaler que la moitié des ruchers présentent un taux de mortalité normal (0 à 10 %) ; les mortalités anormales sont très ponctuelles tout en étant le plus souvent très graves : 15 % des ruchers touchés présentent un taux de mortalité supérieur à 70 %. Etablir une mortalité moyenne à l'échelon régional ou national est donc périlleux dans ces conditions. Enfin, la participation à ce monitoring étant volontaire, il est à craindre qu'un biais ne soit présent dans les données récoltées : les premiers répondants sont probablement les apiculteurs confrontés au phénomène de dépérissement et ce dernier risque donc d'être surestimé. Conclure sur l'amplification générale du problème est donc dangereux.

    Ceci dit, le problème de la surmortalité des abeilles reste un sujet de préoccupation majeur en Wallonie comme d'ailleurs dans le reste du monde et la saison 2009-2010 semble apporter plus de désagréments que celle de 2008- 2009, qui avait été exceptionnellement favorable. En plus de dépérissements localisés très graves et inexpliqués, des comportements anormaux des colonies ont été observés dernièrement, comme une propension exacerbée à l'essaimage. Pour expliquer la surmortalité des colonies, la pression exercée sur les colonies par le parasite Varroa destructor est certainement une priorité.

    Il est à noter qu'à côté du monitoring organisé par Gembloux, le CARI (Centre Apicole de Recherche et d'Informations) procède de manière complémentaire à un recueil d'informations basé sur des déclarations d'incidents. Le projet d'encadrement des apiculteurs wallons porté par le CARI, et soutenu par la Région, a été reconduit jusqu'en septembre 2011. Il est destiné notamment à aider les apiculteurs à faire face à ce parasite. Trois objectifs prioritaires, en rapport avec la lutte contre la varroase, sont visés :

    - favoriser la mise en place de colonies plus résistantes;
    - assurer un suivi de l'évolution des populations de varroas au fil des années avec un système d'alerte en cas de situation inquiétante;
    - faciliter la mise en œuvre de moyens de luttes (produits vétérinaires notamment) efficaces.

    En rapport avec ce dernier point, le problème de la diversité des moyens de traitement, de leur disponibilité et de leur accessibilité reste crucial. Par exemple, les procédures actuelles pour se procurer ces produits ne seront probablement plus possibles en 2011. En ce qui concerne la diversité des produits disponibles sur le (petit) marché belge, seule une action concertée au niveau européen permettrait de faire évoluer la situation: une procédure d'agrément centralisée serait la bienvenue.

    A ce sujet, la Présidence belge de l'Union apparaît comme une opportunité à saisir: la DG SANCO devrait produire une communication sur la politique à mener en matière de santé des abeilles, pour décembre 2010 (discussions prévues à partir de septembre).
    Une théorie communément admise au niveau international voudrait que les abeilles soient affaiblies par une série de stress primaires sur lesquels viendraient se greffer des stress secondaires comme des virus, des bactéries, des champignons, etc. Au rang des stress primaires, sont cités bien sûr le Varroa, mais aussi la raréfaction des ressources en nourriture de qualité pour les abeilles, les contaminants environnementaux, etc.

    Au vu de tous ces éléments et de leurs interactions possibles, on se trouve face à un écheveau dont il est difficile de tirer le premier fil.

    Les trois pistes qui se dégagent cependant tant de la littérature internationale que des constats que l'on peut faire en Wallonie (virus, contaminants, appauvrissement des ressources) vont être traitées prochainement avec le soutien de la Région.

    Je voudrais préciser également que l'apiculture dans nos contrées est constituée essentiellement d'amateurs; il s'agit donc d'une apiculture de loisir. Seuls trois apiculteurs (possédant plus de 150 ruches) sont recensés comme professionnels en Wallonie. Leur nombre devrait augmenter dans le futur tout en restant très limité; il s'agirait plutôt d'un développement d'une apiculture de service, orientée vers la pollinisation, par exemple.