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Les interrogations de la Commission européenne à l'égard de la Caisse d'investissement de Wallonie (CIW)

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2010
  • N° : 5 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 23/09/2010
    • de de LAMOTTE Michel
    • à MARCOURT Jean-Claude, Ministre de l'Economie, des P.M.E., du Commerce extérieur et des Technologies nouvelles

    Début septembre, on apprenait que la Commission européenne avait adressé au Gouvernement wallon une liste de 28 questions concernant la Caisse d'investissement de Wallonie (CIW) – dont la Commission attendait les réponses dans les vingt jours, soit cette semaine, si mes calculs sont bons, …

    Ces questions sont loin d’être anodines, puisque, en fait, la Commission s’interroge globalement sur le bien-fondé de la CIW et demande au Gouvernement de justifier l’existence même de celle-ci ! En effet, selon la Commission, « la Région wallonne a déjà créé des organismes publics ayant un but similaire à celui de la CIW, comme la SRIW, la Sowalfin ou la Sogepa ».

    Cette crainte de la création d’une nouvelle structure « doublonnant » inutilement avec des organismes existants n’est toutefois pas une nouveauté : déjà lors des débats au Parlement wallon autour du décret instituant la CIW, cette problématique avait été soulevée. Tous s’accordaient sur la pertinence de l’objectif poursuivi …mais plusieurs se demandaient s’il n’était pas possible d’atteindre cet objectif dans le cadre des structures déjà existantes, sans créer la CIW.

    Mon ancien collègue René Thissen avait ainsi insisté pour rappeler que, pour lui et pour le Groupe cdH, il devait s’agir avant tout de « mettre en place un simple véhicule financier, largement adossé à un organisme existant (soit la SRIW) ». Rejoignant et précédant les interrogations de la Commission européenne, il avait également " fait part de certains doutes sur la nécessité de créer « de toutes pièces » un nouvel outil (avec tout ce que ça comporte en termes de personnel, de moyens budgétaires, de dépenses de fonctionnement, etc.), alors qu’il existe déjà de nombreux organismes publics spécialisés en la matière qui aurait probablement pu assumer, d’une manière ou d’une autre, les nouvelles missions confiées à la CIW (la SRIW, la Sogepa, la Sowalfin, les invests…). ". René Thissen craignait donc (comme la Commission européenne aujourd’hui ?) qu’on « doublonne » à nouveau et qu’on disperse ses efforts dans un trop grand nombre de structures parallèles.

    À l’époque, en avril 2009, les explications de Monsieur le Ministre nous avaient toutefois quelque peu rassurés. En effet, il avait indiqué que son premier choix aurait été d’intégrer ce nouveau dispositif à la structure de la SRIW, que cela n’avait pas pu se faire mais que son souhait était bien que la CIW soit la plus proche possible de la SRIW, que son personnel soit réduit au minimum, et qu’à terme, dès que possible, l’intégration de la CIW au sein de la SRIW soit beaucoup plus complète.

    Je ne doute pas que cette vision du dossier reste toujours valable – je l’espère en tous cas ! Comme j’espère également que Monsieur le Ministre parviendra aussi à convaincre la Commission européenne. Néanmoins, celle-ci va probablement lui demander des preuves concrètes plutôt que des intentions – d’autant plus que la CIW est maintenant bien en place.

    Mais la Commission pose aussi d’autres questions, notamment sur les mandats au sein de la CIW, sur l'éventuelle rémunération des administrateurs en fonction des résultats, sur l'existence d'un business plan, sur le mécanisme des « partenariats », sur les conditions des prêts et leur conformité aux règles en matière d’aides d’État, etc. Ce sont là des sujets qui avaient aussi été évoqués en avril 2009, en particulier pour regretter les larges renvois du décret aux futurs statuts de la CIW.

    Bref, on le constate, la Commission européenne examine attentivement la CIW et la nouvelle structure ainsi mise en place. Au-delà de ce que j’ai déjà évoqué, pouvez-vous nous indiquer de manière exhaustive les questions que la Commission a transmises au Gouvernement ? J’imagine que vous avez déjà pris contact avec ses services pour préparer les discussions et mettre en place un dialogue constructif ? Quelle est maintenant la procédure à suivre dans le cadre de cet échange de questions-réponses ? Enfin – et surtout – Monsieur le Ministre peut-il nous présenter globalement les réponses qu'il a (ou qu'il va) envoyer à la Commission ? Quelle est la stratégie de la Région wallonne dans ce dossier ?

  • Réponse du 07/10/2010
    • de MARCOURT Jean-Claude

    Le questionnaire adressé par la Commission européenne à la Région wallonne entend vérifier que la création et les modalités de gestion de la Caisse d'Investissement de Wallonie (C.I.W.) ne contiennent aucune aide d'Etat en faveur d'entreprises, et ce à quelque niveau du mécanisme mis en place :
    - au niveau de la caisse d'investissement;
    - au niveau des épargnants;
    - au niveau des sociétés internes;
    - au niveau des co-investisseurs privés;
    - au niveau des entreprises bénéficiaires.


    On peut classer les questions de la Commission européenne dans les 5 thèmes suivants :
    1° Les obligataires personnes morales : La Commission, vu la garantie dont ils bénéficient pour les obligations souscrites, se demande s'il ne faut pas les considérer comme bénéficiaires d'une aide d'Etat.

    2° Le fonctionnement de la C.I.W, notamment en ce qui concerne son caractère « d'entreprise commerciale », la rémunération de ses administrateurs - nulle par ailleurs -, et le rôle de son Comité d'investissement.

    3° Le fonctionnement des sociétés internes, notamment le rôle de l'associé-gérant et de l'associe simple, la comptabilité, la rémunération des gestionnaires, les avantages éventuels - virtuels je peux le dire -, consentis aux partenaires publics ou privés.

    4° Les prêts consentis, leur caractère subordonne ou non, leurs modalités, et particulièrement le taux pratiqué. Notons que la Commission s'interroge sur la possibilité de disposer pour chaque intervention dans une PME, d'une notation de type Standard & Poors ou Moody's pour ne citer que les plus connues. Est-ce bien raisonnable pour des interventions dans des PME wallonnes ?

    5° Les éventuelles participations en capital qui ne seront effectuées que dans la cadre de sociétés internes créées avec des partenaires privés et encore le partage effectif des risques avec ce partenaire privé.


    Ces questions avaient déjà été abordées lors de la rencontre intervenue en juin dernier entre la Commission et les représentants du Gouvernement wallon. La Commission a souhaité que les réponses à toutes ses questions lui soient confirmées par courrier officiel, ceci afin de faciliter une compréhension complète du mécanisme.

    Cela permettra à la Commission de se positionner dans ce dossier où elle agit sur la base d'une plainte qui lui a été adressée à l'encontre de la C.I.W. Les éléments développés, ont systématiquement été transmis dans le dossier de plainte de la Commission.

    Il faut admettre, que l'on s'en tient à des éléments relativement factuels pour avoir encore la chance d'exposer sereinement les réponses et arguments à la Commission européenne. Dès que ce dossier sera clôturé, nous ne manquerons pas d'en faire le bilan avec l'honorable Membre.

    La C.I.W. a débuté son travail et procédé à l'examen d'un certain nombre de dossiers. Cela a débouché sur des accords d'octroi de divers prêts.

    Mais, vu la demande d'informations de la Commission européenne et dès lors que, compte tenu de celle-ci, il est toujours possible que des adaptations doivent être apportée aux modalités de fonctionnement de la C.I. W., il a été estimé préférable de ne pas procéder encore à des libérations de fonds dans le cadre de ces prêts.

    Afin que l'examen de nouveaux dossiers puisse avancer efficacement, il est primordial que la procédure en cours aboutisse le plus rapidement possible.

    Pour ceux qui parient sur l'échec de la caisse d'investissement de Wallonie, c'est faire peu de cas, d'une part de la confiance que les épargnants wallons ont accordée au Gouvernement en y souscrivant pour plus de 80 millions, et d'autre part, des besoins de financement des PME qui sont toujours aussi criants. Effet, le fort ralentissement des crédits bancaires aux entreprises belges a commencé début 2008. II y avait avant ce ralentissement une croissance annuelle de crédit aux entreprises qui, mesurée en avril 2008, s'élevait en base annuelle à 16,4% et, qui un an plus tard était ramenée à 3,2%.

    La BNB note la remontée en juin 2009 à 5,1% (1), Ce fort ralentissement a touché particulièrement les crédits à CT; leur croissance annuelle en juin 2009 était négative à -2%, alors que début 2008, on observait une croissance de plus de 15%.

    Outre le ralentissement, la Banque Nationale insiste sur le durcissement significatif des critères qualitatifs d'octroi des crédits, et cite notamment les exigences de garantie ou, malgré des taux d'intérêt de référence significativement peu élevé, une hausse des marges d'intérêt.

    Dans le deuxième baromètre 2010 réalisé par le CEFIP concernant l'accès des petites entreprises au financement bancaire, il y a plus d'entrepreneurs qui pensent « qu'il est un peu plus difficile d'obtenir un nouveau crédit de caisse ou une nouvelle ligne de crédit pour les affaires courantes », et ces entrepreneurs ont la même position en ce qui concerne le coût d'un crédit de caisse ainsi que le niveau de garantie demandé par les banques.

    L'argent investi par les Wallons pour leurs PME, quoi que certains en pensent, répond donc bien à une demande qui pourra être bientôt satisfaite, et ne souffrira à l'avenir plus de manœuvres de retardement dans sa mise en route.

    Pour ceux qu'il faudrait rassurer sur la manière dont dans l'intervalle sont gérés leurs fonds, la plus grande partie de ceux-ci ont été placés à long terme, à un taux fixe moyen de 3,79%. Dès lors, la baisse actuelle des taux est sans impact sur le rendement desdits placements.

    Pour en finir avec les chiffres, et avec toute la prudence quant à ceux-ci, le montant total en 2009 de la réduction d'impôt s'élève à 919.227,5 euros. La prudence est de mise, car il ne s'agit pas des montants qui auront été imputés réellement dans les déclarations fiscales. Ce chiffre définitif ne sera connu qu'au terme de la période d'enrôlement de 3 ans.

    Les réponses à la Commission ont été transmises fin de la semaine passée. Une réunion avec la Commission doit être organisée rapidement pour clôturer définitivement ce dossier, et faire en sorte que la caisse d'investissement effectue son travail et investisse ses fonds dans l'économie wallonne.




    (1) Groupe de travail « crédits aux entreprise s» - rapport de synthèse BNB - septembre 2009