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La qualité chimique de nos eaux souterraines

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2010
  • N° : 140 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 21/10/2010
    • de de LAMOTTE Michel
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    Le dernier rapport d’activités de la Société wallonne des eaux (SWDE) relève que la qualité chimique de nos eaux brutes souterraines subit une légère détérioration due à la présence des nitrates et que la situation n’est pas susceptible de s’améliorer dans les prochaines années.

    Quelles actions Monsieur le Ministre va-t-il entreprendre pour améliorer la qualité de nos eaux souterraines en matière de nitrates ? Autrement dit, comment compte-t-il atteindre les objectifs de qualité de bon état des eaux souterraines fixés par la directive cadre de l’eau pour 2015 ? Quelles actions va-t-il prendre en matière de sensibilisation du public et de promotion des bonnes pratiques ?

    Monsieur le Ministre pourrait-il également faire le point en matière de pesticides ? Les mêmes constats peuvent-ils être dressés ?
  • Réponse du 14/12/2010
    • de HENRY Philippe

    La légère détérioration constatée par la SWDE entre 2008 et 2009 et concernant la qualité de ses captages quant aux teneurs en nitrates dans l'eau prélevée, est un élément supplémentaire qui indique qu'il faudra du temps pour que la qualité des eaux souterraines s'améliore suite à la mise en œuvre du programme de gestion durable de l'azote en agriculture et de son renforcement adopté en février 2007 (PGDA2). Cette information va dans le sens du rapport « Etat des lieux des masses d'eau souterraines » réalisé par l'administration début 2010 en vue de l'élaboration des Plans de gestion par Districts hydrographiques de la directive cadre de l'eau (DCE).

    Ce rapport « Etat des lieux » a suscité de nombreuses questions (l) auxquelles il a déjà été répondu en long et en large. Le tableau ci-dessous résume le diagnostic posé par l'administration à partir des données disponibles (de 1994 à 2008) en ce qui concerne les nitrates dans les 33 masses d'eau souterraine de la Wallonie:


    Masses d'eau Masses d'eau
    destinées à servant d'autres
    l'alimentation en usages (agricoles, ... )
    eau potable

    Masses d'eau en bon état N03 sans détérioration 15 3
    Masses d'eau en bon état N03 avec détérioration 4 0
    Masses d'eau localement affectées avec détérioration 2 0
    Masses d'eau en mauvais état N03 sans détérioration 2 4
    Masses d'eau en mauvais état NO} avec détérioration 1 2

    Total masses d'eau souterraines 24 9


    Suite à la présente question, la mise à jour des indicateurs du Survey Nitrate (surveillance organisée par l'article R.226 du Code de l'eau) a été réalisée pour l'année 2009. En annexe sont reprises les évolutions des concentrations moyennes en nitrate pour les masses d'eau qui sont situées au moins partiellement en zone vulnérable.

    On observe d'abord l'effet - plus ou moins prononcé et décalé suivant les masses d'eau - des variations climatiques (période humide 1999-2002; période sèche 2003-2006; période de précipitations moyennes 2007-2009) qui influencent le lessivage des nitrates tant au sol qu'au niveau de certaines nappes. Ces phénomènes rendent l'analyse des tendances assez complexe et ne permettent pas d'en globaliser les conclusions.

    Toutefois, la détérioration apparaît assez générale quand on compare la situation la plus récente à celle de départ (soit 1992-1994, début d'application de la directive nitrate 91/676/CEE); par contre, on peut parler de stabilisation si l'on prend comme référence le maximum historique de 2002-2003 pour les nappes, avec même des améliorations constatables depuis pour certaines d'entre elles.

    A l'intérieur d'une même masse d'eau, la situation peut encore être contrastée et la teneur en nitrates dans certains captages peut parfaitement évoluer en sens opposé.

    En conclusion, le diagnostic de qualité des eaux souterraines est à nuancer géographiquement et les tendances observées ne sont pas uniformes.

    A partir de ce constat, les programmes de mesures en cours d'élaboration en application de la DCE visent bien à inverser toutes les tendances à la détérioration et à restaurer le bon état de plusieurs masses d'eau.

    Toutefois, par rapport aux objectifs 2015 de la DCE, des reports d'échéance devront effectivement être sollicités soit pour des motifs naturels (délai nécessaire à la restauration des eaux souterraines profondes) ou économiques (rapport coûts/bénéfices disproportionné pour les masses d'eau non destinées à la consommation humaine).

    Les mesures envisagées dans le cadre des plans de gestion en matière de nitrates dans les eaux souterraines sont déclinées autour de 3 axes: surveillance, contrôles et protection des captages.

    Il est proposé de définir des zones de surveillance correspondant aux bassins d'alimentation de tous les captages à risque de manière à rendre leur protection au moins équivalente à ceux situés en zone vulnérable.

    Parallèlement, le respect du PGDA actuel (capacités de stockage des effluents azotés, périodes d'épandage, couvertures hivernales, ... ) devrait faire l'objet de contrôles plus systématiques. En particulier, les contrôles APL, c'est-à-dire de l'azote potentiellement lessivable après culture, seront augmentés et ciblés dans les régions où la situation des nappes évolue peu par rapport aux prédictions établies par la modélisation (2) des pratiques agricoles et du PGDA2.

    Une plus grande sensibilisation des agriculteurs sera également exercée dans les zones de prévention ou de surveillance de certains captages par le biais de contrats de captages.

    Ces trois axes se traduiront par une bonne dizaine de mesures spécifiques dont l'impact est en ce moment analysé et qui seront prochainement dévoilées par l'enquête publique des projets de plan de gestion des districts hydrographiques qui commencera en 2011.



    Pesticides

    En ce qui concerne les pesticides, la recherche et le suivi de ces paramètres ne se font de manière suffisamment complète et régulière que depuis quelques années et ne, permettent pas encore, faute d'un recul suffisant, de réaliser des analyses de tendance fiables et exploitables.

    Certaines évolutions caractéristiques se marquent cependant de manière générale pour certaines masses d'eau souterraine. Bien que se maintenant encore localement à des niveaux de concentration significatifs, l'atrazine et son principal métabolite, la déséthylatrazine, sont en nette diminution de leur concentration dans les nappes, associée de manière logique à l'interdiction d'utilisation de cette substance depuis 2005. En contrepartie, d'autres substances actives (et leurs métabolites), qui se substituent aux anciens composés interdits, peuvent se rencontrer de plus en plus régulièrement et à des niveaux de concentration croissants dans ces mêmes nappes. Il s'agit par exemple de la bentazone et du 2,6-dichlorobenzamide.

    Le constat de l'« Etat des lieux » concernant les pesticides montre que cette problématique a une plus forte connotation non-agricole que celle des nitrates.

    Trois des 33 masses d'eau souterraine sont considérées comme en mauvais état et 8 autres présentent des risques ou des impacts locaux.

    Les programmes de mesures en cours d'élaboration en application de la DCE comportent des mesures de base de compétence fédérale mais aussi régionales comme la révision de la législation wallonne relative à l'utilisation des produits phytosanitaires dans les endroits publics.

    Plusieurs mesures complémentaires spécifiques à la protection et à la non-détérioration des eaux souterraines sont également étudiées, visant notamment les pratiques de pulvérisation; elles seront prochainement dévoilées par l'enquête publique des projets de plan de gestion des districts hydrographiques qui commencera au début de l'année 2011.



    (1) Questions d'actualité du Parlement wallon du 5 mai 2010; QO-7 (J.FERNANDEZ-FERNANDEZ) et QO-22 (C. DI ANTONIO) déposées le 11 mai 2010.
    (2) Modèle EPICgrid et travaux de simulation de la convention QUALVADOS II.