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Les conséquences d'un permis unique attribué sur base d'une déclaration de superficie incorrecte par un exploitant agricole

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 497 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 28/01/2011
    • de DUPRIEZ Patrick
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    J'ai été informé l’été dernier d'un dossier dont je n'exposerai que brièvement le contenu. Il ne devrait en effet pas être inconnu de Monsieur le Ministre.

    Au départ, il y a une demande de permis unique pour extension d'une exploitation agricole à Hotton par la construction et l'exploitation d'une porcherie industrielle. Le permis, initialement refusé par la commune, a été délivré sur recours par le Ministre Antoine, en février 2009.

    L'étude de ce dossier laisse apparaître plusieurs « erreurs » dans les superficies déclarées pour calculer le taux de liaison au sol de l'exploitation dont des erreurs d'addition manifestes.

    A l'observation attentive, c'est toutefois la déclaration de superficie de l'exploitation elle-même qui semble largement incorrecte.

    Il apparaît ainsi que:
    - des terrains se trouvant sur le domaine de la défense (camp militaire de Marche en Famenne) ont fait l'objet de déclaration par l'exploitant alors qu'il n'y dispose d'aucun droit et n'y a nullement accès. Qui plus est, des primes MAE relatives à ces parcelles ont été obtenues par celui-ci;
    - d'autres surfaces déclarées par l'exploitant sont erronées dans la mesure où elles n'ont fait l'objet d'aucun accord avec les propriétaires des terrains concernés qui sont, soit à l'abandon, soit exploités dans le cadre privé.

    Il apparaît donc clairement que la superficie totale de cultures et de prairies pouvant recevoir les effluents d'élevage qui a été prise en compte pour estimer le taux de liaison au sol dans le cadre de la délivrance du permis a été surévaluée, avec comme conséquence un taux de liaison annoncé nettement plus bas qu'il ne le sera dans la réalité.

    J’ai eu l’occasion d’interroger le Ministre Lutgen sur les points le concernant (cf. question écrite sur « les conséquences d'une déclaration de superficie incorrecte par un exploitant agricole » du 16 juillet 2009 et réponse ministérielle du 8 septembre 2009), notamment sur les conditions entourant les procédures de déclaration de superficie ainsi que sur les conséquences de l'octroi de subsides calculés sur des déclarations erronées.

    Néanmoins, je voudrais poser les questions suivantes qui sont plutôt du ressort de Monsieur le Ministre.

    Quelles conclusions tirer lorsqu’il est prouvé qu’un permis unique aurait été accordé sur base d'informations erronées, voire mensongères ?

    En outre, le fait que cet établissement ait obtenu un permis unique sur base d’un taux de liaison au sol incorrect, il apparait également que celui-ci a pu bénéficier non seulement de DPU et de MAE mais aussi de subsides à l’investissement. Monsieur le Ministre ne pense-t-il pas que le préjudice pour la collectivité justifie une demande de remboursement de la part de la Région wallonne ? Son collègue, le Ministre Lutgen me répondait que, « conformément aux dispositions des règlements CE 769/2004 et 1975/2006, une procédure existe pour recouvrir les paiements indus ». Monsieur le Ministre sait-il si, en l’espèce, une telle procédure a été activée ?

    Enfin, il semblerait dans ce dossier que les promoteurs ne respectent pas le permis unique (PU/08.166) qui leur a été accordé par le Ministre André Antoine le 02 février 2009. Une plainte à ce sujet a d’ailleurs été adressée par des citoyens à l'administration de Monsieur le Ministre à Arlon. Dès lors, comment Monsieur le Ministre de l’Aménagement du territoire s’est-il assuré du respect du permis unique ou envisage-t-il de le faire ?

    Comment faire en sorte que la commune de Hotton suspende (ou retire) le permis délivré pour non respect des conditions et oblige les promoteurs à introduire un nouveau permis correspondant au bâtiment construit ? Quelles actions envisager sur cet établissement vraisemblablement en infraction par rapport à la législation relative au permis d’environnement ?
  • Réponse du 05/04/2011
    • de HENRY Philippe

    La question de l'honorable membre appelle, de ma part, les réflexions suivantes :

    Quant au permis unique:
    A l'heure actuelle, les polices administratives relatives au bail à ferme et à la gestion durable de l'azote en agriculture sont indépendantes de la police·relative aux établissements classés pour l'environnement de sorte que le permis ne pourrait souffrir, dans le cas d'espèce, d'aucune irrégularité de ce strict point de vue. La jurisprudence du Conseil d'Etat est claire et constante à cet égard.

    Il n'en reste pas moins vrai que des infractions au permis délivré sur recours, tant sur le volet environnemental que sur le volet urbanistique ont été constatées par l'autorité communale et par mes services de la DGARNE et de la DGATLPE. Des procès verbaux ont été dressés et des amendes administratives ont été adressées à l'exploitant, à charge pour ce dernier d'introduire des demandes de régularisation dès qu'il se sera acquitté du paiement des amendes. Tel est le cas, à ce jour, pour le volet environnemental. Pour le volet urbanistique, le délai de paiement expire le 28 avril 2011.

    Enfin, selon la théorie du retrait, une autorité qui a pris une décision ne peut retirer celle-ci que si elle est irrégulière. Le Conseil d'Etat considère qu'est irrégulière une décision entachée d'une erreur d'appréciation de la part de l'autorité compétente.

    Si, suite à des informations erronées communiquées à l'autorité compétente, celle-ci a commis une erreur d'appréciation, elle pourrait donc retirer sa décision et restatuer. Cependant, lorsque la réglementation prévoit des délais de rigueur pour statuer, ce retrait ne peut intervenir qu'endéans ce délai.

    Par ailleurs, lorsqu'une action a été introduite devant le Conseil d'Etat - tel n'est pas le cas en l'espèce - le retrait peut également être opéré au-delà de ce délai.

    Indépendamment de tout retrait, si l'erreur d'appréciation commise par l'autorité l'a conduite à délivrer une autorisation qui engendre des dangers, nuisances ou inconvénients non prévus au moment où elle a statué, cette autorité peut toujours modifier ou ajouter des conditions d'exploiter (via l'article 65 du décret du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement), voire, à certaines conditions, suspendre ou retirer le permis. Au vu des éléments que l'honorable membre évoque, je vais solliciter le fonctionnaire technique aux fins d'examiner si, dans le cas d'espèce, il n'y a pas lieu de proposer l'activation d'une telle procédure.



    Quant aux déclarations de superficie et aux mesures agro-environementales :
    Comme indiqué par mon collègue Benoît Lutgen, mon administration est amenée, de par la Réglementation européenne, à effectuer des contrôles et enquêtes. Ces activités sont, elles-mêmes, vérifiées par diverses instances indépendantes tant internes qu'externes.

    Dans le cas d'espèce, il y a lieu de tempérer les allégations faites «d'erreurs d'addition manifestes». Les contrôles effectués par mon administration ont, certes, permis de corriger, sur certains points, les données figurant dans la déclaration de superficie mais pour l'essentiel de confirmer les autres données.

    En ce qui concerne le préjudice éventuel, un recouvrement des paiements indus est prématuré à ce stade. Pour le calcul des superficies, l'administration, en vertu de la Réglementation européenne, prend uniquement en compte l'exploitant de la parcelle déclarée pour une année déterminée, peu importe le titre de son occupation (propriétaire, locataire fermier, contrat de culture, usufruitier, ... ) qu'il ne doit pas mentionner ni justifier sauf si une nécessité particulière l'exigeait. Tel sera le cas, par exemple, lorsqu'une même parcelle est reprise dans deux déclarations de superficie. Si un citoyen estime devoir contester la légitimité d'une éventuelle occupation de terrain, il lui appartient d'abord de le faire auprès du prétendu occupant. Il s'agit d'un conflit privé relevant, le cas échéant, des cours et tribunaux. A l'issue de cette procédure, l'administration pourra éventuellement être amenée à revoir l'une ou l'autre de ses décisions antérieures, y compris en assortissant la nouvelle décision de pénalités forfaitaires.

    A ce stade, aucun autre élément ne remettrait en cause l'occupation de ces terrains donc de nature à permettre un recouvrement des paiements.