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Le projet de modification de l'arrêté du Gouvernement wallon du 23 octobre 2008 relatif aux mesures de prévention applicables en Natura 2000

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 427 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 24/03/2011
    • de DUPRIEZ Patrick
    • à LUTGEN Benoît, Ministre des Travaux publics, de l'Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine

    Le 27 janvier dernier Monsieur le Ministre proposait en première lecture au Gouvernement wallon un avant-projet d’arrêté modifiant l’arrêté du Gouvernement wallon du 23 octobre 2008 relatif aux mesures préventives générales applicables en Natura 2000. Ce projet, motivé par un souci de simplification, a suscité – comme Monsieur le Ministre le sait – une réaction inquiète de l’ASBL Natagora qui dénonce la présence dans la proposition de plusieurs éléments qui apparaissent, à ses yeux, comme autant de régressions pour la protection de la nature dans les zones concernées.

    Il est ainsi notamment proposé :
    - de réduire à une bande de 12 mètres (au lieu de 25) l’interdiction de plantation de résineux en bordure de cours d’eau sur les sols alluviaux et hydromorphes à nappe temporaire en dehors des bois soumis au Code forestier ;
    - d’assouplir les possibilités d’enrichissement de peuplements forestiers feuillus en essences exotiques (épicéas, douglas notamment) ;
    - de supprimer la nécessité d’obtenir une autorisation avant de remettre en fonction d’anciens drains en zone agricole;
    - d’alléger les mesures relatives aux pesticides;
    - de supprimer l’interdiction de labours des terres agricoles à moins de 6 mètres des eaux de surface.

    J’aimerais donc connaître l'avis de Monsieur le Ministre à ce sujet et ses réponses concernant les points ci-dessus évoqués par Natagora.

    Qu’en est-il par ailleurs de l’avis du Conseil supérieur wallon de la conservation de la nature s’il a été consulté à ce sujet ?

    Par ailleurs, le principe du « standstill » impose au pouvoir public de maintenir un niveau de protection de l’environnement au moins équivalent à l’existant. Or le rapport du Conseil d’Etat semble relever à différents égards le non respect de ce principe. Monsieur le Ministre peut-il aujourd’hui nous assurer que ce principe sera respecté dans le cadre de l’évolution du régime général de protection du réseau Natura 2000 et comment ?
  • Réponse du 15/04/2011
    • de LUTGEN Benoît

    Je m’étonne de la réaction de Natagora car, comme je l’ai déjà signalé à maintes reprises, la mise en œuvre de Natura 2000 se fait en étroite collaboration avec le forum Natura 2000 au sein duquel Inter Environnement Wallonie est présent en tant que représentant des associations environnementales.

    Par l’adoption de ce nouvel arrêté, le gouvernement a voulu :
    - simplifier la législation pour la rendre plus compréhensible, moins complexe et par là, plus applicable, gage de l’effectivité du régime juridique de Natura 2000 ;
    - accorder dès à présent une protection à l’ensemble des sites du réseau Natura 2000 (donc, y compris à ceux non encore couverts par un arrêté de désignation) ;
    - rendre les mesures contrôlables, exigence de la Commission européenne ;
    - simplifier la législation Natura 2000 en supprimant les mesures rencontrées par d’autres dispositions légales ou réglementaires, relevant ou non de la loi sur la conservation de la nature.

    J’ai répondu au courrier que m’a adressé l’ASBL Natagora en explicitant chaque point soulevé.


    Pour en venir aux remarques précises que l'honorable membre relève.

    1° Réduction à une bande de 12 m (au lieu de 25) de l’interdiction de plantation de résineux en bordure de cours d’eau sur les sols alluviaux et hydromorphes à nappe temporaire en dehors des bois soumis au Code forestier.

    Dans le système précédent, l’interdiction à 25 mètres ne s’appliquait que dans les propriétés de plus de 5 ha. A présent, la mesure s’applique partout. Il en résulte qu'une bande continue de 12 mètres de part et d'autre du cours d'eau sera protégée, sans distinction entre les différents types de propriétaires. Ceci devrait être biologiquement plus intéressant que le système précédent puisque la zone la plus sensible du cours d’eau sera protégée sur l’ensemble du parcours alors qu’avant, il y avait protection à 25 mètres pour certaines propriétés mais aucune protection pour de nombreuses autres.
    Complémentairement, la nouvelle formulation va plus loin que l’interdiction de plantation, de replantation et de semis artificiel puisqu’elle interdit toute sylviculture favorisant les semis naturels de résineux et notamment les éclaircies à leur profit.
    La référence aux sols alluviaux et hydromorphes à nappes temporaires a été supprimée car cette notion est difficilement applicable, la carte des sols ne donnant pas une information suffisamment précise.


    2° Assouplissement des possibilités d’enrichissement de peuplements forestiers feuillus en essences exotiques (épicéas, douglas notamment).

    Dans l’arrêté du Gouvernement wallon initial, l’enrichissement de peuplements forestiers feuillus indigènes par des espèces exotiques dans les habitats naturels d’intérêt communautaire étaient soumis soit à dérogation, soit à autorisation suivant que cela portait sur plus ou moins de 2 ha.
    La référence aux habitats d’intérêt communautaire montre qu’il s’agit d’une mesure particulière, applicable dans certains habitats, et non d’une mesure générale. C’est la raison pour laquelle, cette mesure sera reportée dans les mesures liées aux unités de gestion concernées. Ainsi, quelle qu’en soit la superficie, les enrichissements en espèces exotiques devront faire l’objet d’une dérogation dans les forêts prioritaires, d’une autorisation dans les forêts indigènes de grand intérêt biologique et les milieux aquatiques et d’une notification dans les forêts habitats d’espèces.


    3° Suppression de la nécessité d’obtenir une autorisation avant de remettre en fonction d’anciens drains en zone agricole.

    Le nouvel arrêté ne supprime pas cette mesure.


    4° Allégement des mesures relatives aux pesticides

    Les mesures relatives aux pesticides (à l’origine une dizaine) ont dû être revues dans un souci de contrôlabilité.
    L’utilisation des herbicides, en dehors de cas bien spécifiques, est soumise à autorisation, ce qui donne un niveau de protection suffisant.
    En ce qui concerne l’usage des fongicides et des zoocides (rodenticides, insecticides, etc.) - usage qui est dans les faits limités et particulièrement peu contrôlable - il n’est plus réglementé. Toutefois, en cas d’utilisation de ce type de produits entraînant un impact majeur sur les espèces protégées ou d’intérêt communautaire, les articles 2 et suivants et 28 de la loi sur la conservation de la nature restent d’application.
    Notons aussi que l'article 42 du Code forestier régit ces aspects sur l’ensemble des forêts.


    5° Suppression de l’interdiction de labour des terres agricoles à moins de 6 m des eaux de surface.

    Cette disposition est remplacée, en zone de cultures, par la création d’une nouvelle unité de gestion dite « bandes extensives » située entre autres le long des cours d’eau sur douze mètres de large avec des contraintes beaucoup plus fortes.


    Au vu de ces réponses, l'honorable membre comprendra que les craintes quant à un non respect du « Standstill » ne sont pas justifiées d’autant que la contrôlabilité des mesures a été fortement améliorée et que la violation des mesures de protection intégrales des oiseaux, des espèces animales et végétales ainsi que les atteintes à leurs habitats naturels, prévues par les articles 2, 2bis et 3, de la loi du 12 juillet 1973 sur la conservation de la nature, constituent des infractions de troisième catégorie punissables d’une amende de 100 à 100.000 euros ;

    Enfin, il a été répondu aux remarques du Conseil d’Etat relatives au principe de stand-still lors de l’examen du texte en dernière lecture par le Gouvernement wallon qui l’a approuvé définitivement lors de sa séance du 24 mars dernier.

    Le Conseil supérieur wallon de la Conservation de la Nature n’a pas été consulté dans la mesure où cette consultation n’est pas requise par la loi, ce qui a été confirmé par le Conseil d’Etat. Toutes les mesures reprises dans la réforme ont été concertées, négociées et validées lors de réunions entre le forum (réunissant les représentants des propriétaires (NTF), des agriculteurs (FWA), des communes (UVCW) et des environnementalistes (IEW)) et les différents services concernés de la Direction générale de l’Agriculture, des Ressources naturelles et de l’Environnement. Cette consultation a permis de rechercher les consensus et est une garantie de l’applicabilité et de la contrôlabilité des mesures prises.