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Les concours de mini miss et leurs conséquences sur la santé des enfants

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 257 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 16/05/2011
    • de PECRIAUX Sophie
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des chances

    Plusieurs associations tirent la sonnette d'alarme au sujet des concours de mini-miss, estimant que les risques pour la santé mentale et physique des enfants sont réels.

    Il y a quinze jours, la RTBF dans son reportage « Questions à la Une » attirait l’attention des téléspectateurs sur ce genre de concours.

    Les concours de beauté mettent trop précocement les enfants en situation de séduction à un âge où cela ne devrait pas être une préoccupation, estiment en effet les responsables des associations, qui craignent notamment que ces concours contribuent à "sexualiser les enfants" et à promouvoir le culte de la minceur, des normes de beauté et des stéréotypes.

    Venue des Etats-Unis, la mode des mini-miss s'étend de par le monde. Au Brésil, une reine de carnaval de sept ans crée la polémique. En Belgique, un échevin de la jeunesse subventionne un concours de mini-miss. Ces manifestations sont pourtant néfastes au développement de l'enfant.

    Car à côté des concours sympathiques, sorte d'école des fans ou de fancy-fair améliorées, on trouve en Wallonie des concours où de très jeunes enfants défilent dans des tenues très équivoques. 

    Pour grandir, l'enfant a besoin d'être porté par le désir de ses parents, mais en même temps, il a besoin que ce désir ne l'étrangle pas. L'équilibre est parfois difficile pour les uns comme pour les autres.

    Déjà bien avant la naissance, les parents imaginent le futur de leur enfant. De même en lui donnant son prénom, ils le relient à une figure aimée. Déjà, ils l'espèrent brillant à l'école, charmant en société et le rêvent astronaute, menuisier ou reprenant l'entreprise familiale. Quoi de plus naturel que de souhaiter le mieux à son enfant.

    Mais il arrive que les désirs des parents soient à ce point pressants qu'ils devancent le développement de l'enfant, qu'ils ne permettent pas à celui-ci de savoir ce que, lui, veut faire de sa vie. Ce qui pourrait être encouragement devient obligation ; inconsciemment, l'enfant absorbe le désir de ses parents.

    Pousser un enfant à devenir champion de mathématiques, de piano, de motocross, danseuse étoile ou reine de beauté peut provoquer des dégâts ; c'est souvent le priver de son enfance.

    Pour grandir la petite fille a besoin de s'identifier à sa mère, aux femmes de son entourage, aux personnes qu'elle admire. A la recherche de ce qui la différentie du petit garçon, elle essayera les signes, justement, les plus distinctifs : talons hauts, rouge à lèvre et Barbies, et se rêvera en princesse.

    Les stéréotypes ne sont jamais que les points de repères des enfants : c'est donc avec tendresse que l'on peut laisser les petites filles rêver devant leur miroir ou sous le regard enchanté d'un entourage attentif et privé.

    L'adulte doit laisser à la petite fille le temps de devenir femme et laisser le temps faire son œuvre de maturation, de transformation de la sexualité enfantine en sexualité adulte.

    Par contre, quand l'adulte se saisit de la sexualité enfantine pour l'emmener sur son terrain, il abuse de l'enfant. La mise en avant des enfants comme des petits adultes que ce soit dans la publicité, dans les émissions de télévision ou dans les concours de mini miss les arrachent à l'enfance pour les projeter violemment dans un monde qui n'est pas le leur, le monde adulte.

    S'il y a bien des raisons de regretter les concours de miss, on devrait, à mon avis, exclure les concours de mini miss.

    Face à cette polémique, les deux collègues de Madame la Ministre, Fadila Laanan et Evelyne Huytebroeck, ont demandé au délégué général aux droits de l'enfant de rédiger un rapport sur la question.

    “En développant l'hypersexualité des enfants, on peut causer des dommages incroyables ”, déclare ce dernier.

    Les conclusions de ce travail sont terribles. “ Il est évident que ces concours sont très mauvais pour les enfants, au niveau de leur intégrité physique, morale et psychologique ”.

    Anorexie, stress, peur de décevoir les parents, les dégâts peuvent être terribles ” mais ce qui m’interpelle le plus, c’est le risque pour ces jeunes fillettes ou adolescentes de développer une anorexie dont nous savons comment il est difficile de guérir.

    Je suis persuadée que l'attention de Madame la Ministre a déjà été attirée par ce genre d’événement, ses collègues l'ont-elles associée à leur démarche ?

    Si c’est le cas comment Madame la Ministre a-t-elle réagi au problème.

    Dans le cas contraire, comment pourrait-elle aborder ce problème dans la limite de ses compétences ?
  • Réponse du 15/06/2011
    • de TILLIEUX Eliane

    Comme l'honorable membre l'évoque, il existe différents types de concours de mini miss. Ces concours sont organisés par des asbl voire par des sociétés dont l'objet est le profit. Ce phénomène relativement récent alarme aujourd'hui les pouvoirs publics. Les compétences en la matière sont à mon estime partagées entre la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Région Wallonne.

    En effet, en tant que partie à la convention internationale des Droits de l'enfant, la Belgique doit à ce titre assurer à l'enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, mais aussi doit protéger l'enfant contre toutes formes de violences, ( ... ) de mauvais traitement ou d'exploitation.

    Il faut examiner si, dans le cadre des concours des mini-miss, le choix de l'enfant est respecté. La volonté de participer à ce concours provient-elle des enfants eux-mêmes ou de leurs parents? Une logique d'épanouissement de l'enfant, sans approche concurrentielle préside-t-elle à l'organisation d'un tel concours? Quelles sont les motivations autour de l'organisation d'un tel concours? Est-ce le loisir des enfants qui est recherché où les répercutions financières d'un tel concours?

    Il revient aux pouvoirs publics de déterminer un cadre permettant l'épanouissement plein et entier des enfants et d'attirer l'attention des adultes et des enfants eux-mêmes sur les balises de ce cadre général.

    Lorsque des petites filles défilent en tenues considérées comme sexy par certains adultes, on peut estimer qu'il est nécessaire de rappeler l'existence de ce cadre en tirant en quelque sorte la sonnette d'alarme.

    C'est le rôle délégué par la Région wallonne aux Centres de planning familial en matière d' hypersexualisation des enfants. En effet, les Centres de planning familial alertent les citoyennes et les citoyens sur les dangers de l'hypersexualisation. Par ailleurs, je rappelle que le décret aux centres de planning familial leur confie comme missions l'accueil, l'information, l'éducation et l'accompagnement des personnes, ainsi que l'animation des groupes, notamment de jeunes, dans le cadre de la vie affective, sexuelle et relationnelle.

    Les enfants, futurs citoyens de demain, doivent être formés et informés. Il me semble donc qu'une action en matière de sensibilisation, d'éducation aux droits reste fondamentale afin d'encourager les enfants à poser leurs choix en connaissance de cause. En ce qui concerne la prévention et la sensibilisation, je me permets de renvoyer l'honorable membre vers mes collègues de la Communauté française et de la COCOF compétentes en la matière.

    L'honorable membre évoque les conséquences sur la santé des enfants, et les risques d'anorexie. Dans ce domaine, l'action de la Région wallonne est structurée à plusieurs niveaux.

    Il existe en Wallonie des unités spécialisées situées au sein d'hôpitaux psychiatriques ou d'hôpitaux généraux disposant de service de psychiatrie ou de pédopsychiatrie. La principale unité est organisée par le Domaine, à Braine­l'Alleud, lié à l'ULB. On citera, également, le CHU de Liège et les Cliniques universitaires de Mont-Godinne. Il va sans dire que cette liste n'est pas exhaustive.

    Avant d'envisager une hospitalisation, il convient de recourir à une prise en charge ambulatoire précoce et donc plus légère. Il est évident qu'une prise en charge en unité hospitalière n'est envisagée que dans des situations extrêmes que je ne souhaite pas. Il est donc essentiel d'intervenir en amont via une bonne information et sensibilisation dans le cadre notamment de l'éducation à la parentalité.

    En outre, il existe des troubles des conduites alimentaires peu spécifiques mais apparentés à l'anorexie qui, déjà, sont prémonitoires et qui ont des conséquences relationnelles ou comportementales sur certaines jeunes filles.

    A un stade précoce, le recours à des professionnels généralistes, soucieux de la qualité de la relation thérapeutique, permet d'agir sur certains facteurs prédisposant ou sur certains facteurs déclenchant dont les situations de stress ou d'agression. L'intervention de ces professionnels de première ligne permet aussi d'éviter la stigmatisation. Dans ce cadre, les médecins généralistes et les centres de planning familial, notamment, ont bien sûr toute leur importance.

    Je terminerais en soulignant que l'objectif fondamental est le respect et la garantie des droits des enfants. Un écueil reste à éviter, celui de la stigmatisation. Il convient, en premier chef, aux parents d'assurer le meilleur développement pour leurs enfants. Quel parent n'a pas un jour regretté certains choix posés pour ses enfants? Comment être un bon parent? Ces questions restent sans réponse et c'est pourquoi, l'action politique à privilégier est, à mon estime, celle de l'information sur les risques et dangers potentiels que représentent ces concours aux accents sexistes afin que chaque parent, puisse, en toute autonomie, se forger sa propre opinion.