Le point sur la réforme en matière d'infractions urbanistiques
Session : 2010-2011
Année : 2011
N° : 955 (2010-2011) 1
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Question écrite du 28/06/2011
de de LAMOTTE Michel
à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité
Voici quatre ans, les infractions urbanistiques ont fait l'objet d'une réforme conséquente.
Ainsi, le 24 mai 2007, le législateur wallon adoptait un décret relatif aux infractions urbanistiques et sanctions en matière d'urbanisme.
Un des objectifs poursuivis par le décret était de mettre fin à une mauvaise compréhension, à une non application, voire au laxisme dans l'application des règles relatives aux infractions urbanistiques.
Je pense qu'il est temps, aujourd'hui, de dresser un premier bilan de la situation.
Quels constats peut-on tirer de l'application du nouveau décret?
Quelles sont les difficultés rencontrées sur le terrain ?
Comment Monsieur le Ministre apprécie-t-il la nouvelle procédure mise en place ainsi que le choix des différents acteurs qui interviennent au cours de celle-ci ?
Combien de constats d'infractions ont-ils déjà été dressés? Par qui ont-ils été dressés? Le système mis en place pour inciter les communes à procéder aux constats d'infractions, à savoir le versement du montant de la transaction entre les mains du receveur communal, porte-t-il ses fruits ?
De manière générale, quels enseignements Monsieur le Ministre tire-t-il de la réforme opérée ?
Quelles améliorations propose-t-il ? Quelles sont ses pistes de réflexion en la matière? Quelle est sa politique en matière d'infractions?
Par ailleurs, dans la DPR 2009-2014, le gouvernement s'est engagé, d'une part, à intensifier les efforts visant à réconcilier le citoyen avec la règle en matière d'urbanisme pour lutter en amont contre les infractions urbanistiques et, d'autre part, à poursuivre l'exécution des démolitions ordonnées définitivement par décision judiciaire.
Où en est Monsieur le Ministre dans la réalisation de ces objectifs ?
La balance plus ou moins positive ou négative d’une réforme législative n’est pas une tâche aisée à remplir.
Le bilan à tirer de la réforme de 2007 suppose que l’administration qui a en charge la question des conséquences de la réforme puisse dresser un « actif » et un « passif ». Pour ce bilan de la réforme de 2007, je dois associer les collèges communaux, les services de police, les procureurs du Roi, … Toutes ces autorités appliquent ou participent à l’exécution des dispositions votées en mai 2007. C’est d’ailleurs une des raison d’être de l’évaluation globale de la politique régionale en matière de sanction.
Pour reprendre la terminologie comptable, le bilan de départ, à la date de la réforme, n’existe pas ; des problèmes furent identifiés à l’époque et des objectifs énoncés. Pour simplifier à l’extrême, je les résume : - irrecevabilité d’une demande de régularisation lorsque le Ministère public est saisi (159bis) et paiement obligatoire de la transaction avant examen de la demande de régularisation éventuelle ; - transaction possible en cas de dérogation et reformes de procédures ; - produit des transactions à la suite des p.v. de police ou d’agents communaux revenant à la commune.
Nonobstant l’intérêt reconnu des réformes, il faut bien revenir aux évidences. Certains parquets ne poursuivent pas, d’autres très peu, les infractions listées dans le CWATUPe. En ce qui concerne les contrôleurs wallons habilités à verbaliser, leur nombre n’est pas optimal. Mais, comme vous le savez, les moyens sont limités. De son côté, Le Gouvernement fédéral n’encourage pas les policiers à exercer des tâches qui relèvent d’autorités administratives, notamment les fonctionnaires communaux ou régionaux. Les « directives pour l’allégement et la simplification de certaines tâches administratives de la police locale » (Moniteur belge du 29 décembre 2006, p. 76210) expose :
« Nous soumettons à la réflexion des chefs de corps et des autorités compétentes que certaines tâches effectuées par la police relèvent également de la compétence d’autres fonctionnaires, personnes ou entreprises de gardiennage.
Ainsi, par le biais de concertations et la mise en place de collaborations efficaces avec ces partenaires, il est possible d’alléger les tâches des fonctionnaires ou agents de police, sans porter préjudice aux compétences ou responsabilités respectives. ».
Il s’ensuit que le CWATUPe est cité au titre d’exemple par les ministres fédéraux de l’intérieur et de la justice.
Ceci me permet de conclure provisoirement que même si nous disposions de diverses données ou de statistiques uniformes pour la Région wallonne, leur analyse ne pourrait s’envisager qu’avec beaucoup de précautions dès lors que, par exemple, un fonctionnaire délégué doit collaborer avec des procureurs du Roi aux préoccupations et priorités différentes, avec des zones de police qui ont d’autres préoccupations, …
Nonobstant ces observations générales, des problèmes sont identifiés. Certains déplorent une certaine lenteur de la procédure, ce qui donne un sentiment d’impunité.
Lorsque l’autorité est « susceptible » de délivrer le permis d’urbanisme, elle doit parfois statuer sans dossier. La procédure gagnerait à être formalisée moyennant une habilitation au Gouvernement (cf. art. 155, § 6, al. 1er). Ceci permettrait également de ne pas faire fi de l’évaluation appropriée des incidences avant de régulariser, … De manière générale, certains estiment que l’article 159bis du CWATUPe provoque un effet de « blocage », alors qu’aucune juridiction ne s’est prononcée sur le bien-fondé de l’infraction.
Autre option retenue par le Parlement en 2007 : c’est le gouvernement ou le fonctionnaire délégué qui « propose », de commun accord avec le collège, une transaction au contrevenant (cf. art. 155, § 6, al. 2 et 3). En pratique, le Service public de Wallonie calcule la transaction. Se pose donc la question de savoir si cette obligation matérielle doit être maintenue à charge du Service public de Wallonie lorsque la transaction revient aux communes.
Le décret du 24 mai 2007 ne traite pas de l’hypothèse d’un désaccord quant au calcul, ce qui empêche ou retarde une régularisation éventuelle. Se pose également la question de savoir s’il ne faut pas trouver une sanction adaptée à l’hypothèse de l’infraction maintenue lorsque les autorités ont écrit que l’infraction est régularisable et que le contrevenant reste en défaut de payer ou de déposer une demande de permis de régularisation.
Depuis la réforme, à défaut pour le Procureur du Roi d'avoir marqué son intention de poursuivre dans les nonante jours de la demande qui lui est faite, le fonctionnaire délégué poursuit devant le tribunal civil l'un des modes de réparation lorsque les actes et travaux maintenus en infraction ne sont pas susceptibles de recevoir le permis d'urbanisme. Je n’ignore pas que cette obligation suscite des difficultés matérielles pour le SPW.
Ces constats ou ces interrogations ne justifient pas une réforme ponctuelle, a fortiori lorsque l’ensemble du régime des sanctions est un des domaines dont l’évaluation se poursuit.
Au début de la législature, j’ai demandé que les statistiques produites par les fonctionnaires délégués soient standardisées. Un système d’encodage uniformisé des données est opérationnel depuis mai 2011. Les éléments de base pour un bilan tel que souhaité par l’honorable Membre seront donc clarifiés et mis en balance avec les réalités des contentieux pénaux et civils dont les résultats, il faut le reconnaître, sont diversement sinon insuffisamment appréciés, alors que ces contentieux mobilisent des ressources humaines importantes.
Par ailleurs, les moyens consacrés aux exécutions d'office sont maintenus.
Enfin, en annexe, un tableau récapitulatif relatif aux infractions d’urbanisme en Wallonie.