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La nuisance pour la santé des éoliennes "on shore" en Wallonie

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 335 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 15/07/2011
    • de EERDEKENS Claude
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des chances

    «Vent de Raison» fédère les opposants à +/- 70 projets éoliens on shore wallons réalisés ou en projet.

    De nombreuses personnes se plaignent à Estinnes, à Bourcy, à St Maur et St Ode de vivre un enfer en fonction des nuisances sonores des éoliennes installées.

    Une étude de santé publique a-t-elle été menée à ce propos en Wallonie et, dans la négative, une telle étude ne devrait-elle pas être réalisée?

    Il semblerait, en effet, que les infrasons, pour les citer, pourraient avoir des conséquences particulièrement dommageables sous certaines fréquences pour les riverains de ces éoliennes.

    Existe-t-il des études menées en Belgique et, plus précisément, en Wallonie, sur les conséquences de certains infrasons sur la santé?

    Serait-il envisageable qu'une étude acoustique puisse être menée concernant les infrasons dont se plaignent les riverains de Ghislenghien et d'Estinnes ?

    Il s'agit de nuisances apparentes pour la santé de ces riverains quand bien même la norme de 40 dB(A) la nuit n'est pas dépassée.

    La polémique faisant rage entre partisans et opposants à l'éolien on shore. Sur le site des partisans de l'éolien appelé: « Eolien.be » diffusé par APERe, il est exprimé que certains n'hésiteraient pas, à tort selon APERe, à utiliser les craintes des riverains pour transformer les éoliennes en danger public n° 1.

    Très clairement et pour les partisans de l'éolien, il n'y a aucun problème de santé publique, cela étant affirmé comme une pétition de principe.

    Du côté des opposants, il est exprimé que les infrasons constituent une arme invisible et inaudible car étant un son dont la fréquence est inférieure à 20 Hz, ils sont inaudibles pour l'homme, mais certains affirment qu'au-dessous de sept cycles par seconde, l'émission d'infrasons serait mortelle.

    Où est la vérité en terme de santé publique?

    Il semble être communément admis par la littérature scientifique qu'un infrason est un son dont la fréquence est inférieure à 20 Hz et qu'il est donc trop grave pour être perçu par l'oreille humaine car sa fréquence est trop basse.

    Il est aussi exprimé que les infrasons peuvent avoir des effets destructeurs et que des essais d'utilisation ont été faits pendant la seconde guerre mondiale par l'armée allemande et qu'à plus faible puissance, il constitue une gène physiologique pour les animaux et les humains pouvant produire, lors d'une ou l'autre exposition prolongée, un inconfort, une fatigue, voire des troubles nerveux ou psychologiques.

    Il est aussi exprimé que si la fréquence de ces infrasons est un sous-multiple de la fréquence de résonance du système auditif, celui-ci entre en résonance. Cela se traduit par un bourdonnement d'oreilles extrêmement pénible, dont l'intensité varie avec celle des infrasons, le système nerveux étant alors mis à rude épreuve.

    Tout cela n'est pas très rassurant.

    Les deux questions posées auxquelles il est demandé à Madame la Ministre de répondre sont celles-ci :
    - les infrasons produits par les éoliennes d'Estinnes notamment, sont-ils ou non susceptibles de poser un problème de santé publique ;
    - n'y a-t-il pas urgence à réaliser une étude de santé publique à ce propos, plus particulièrement à Estinnes, et ,sur base des résultats de cette étude, d'en tirer des conclusions s'il se pose un véritable problème de santé publique?
  • Réponse du 19/08/2011
    • de TILLIEUX Eliane

    Avant de répondre aux différentes questions, un petit rappel scientifique concernant les infrasons me semble nécessaire.

    Un infrason (1) est un son dont la fréquence est inférieure à environ 20 Hz (2). Par comparaison, la voix humaine correspond à une fréquence d'environ 500 à 4000 Hz. De façon exceptionnelle, les infrasons peuvent être perçus par l'oreille humaine et le corps. Dans ces cas, ils doivent être produits avec une puissance très élevée. Par exemple, un son de 10Hz sera ressenti seulement s'il provient d'une source sonore dont la puissance est supérieure à 100 dB (3). Il sera ainsi « détecté » sous forme de murmure très bas, de vibration générale et de pression sur le tympan.

    Les infrasons sont présents partout dans l'environnement. Ils sont produits notamment par les sécheuses à linge, les véhicules motorisés, les climatiseurs, le vent, les vagues et aussi les éoliennes. Ces dernières en émettent avec une puissance inférieure à la limite de la perception humaine.

    En effet, les informations fournies par les manufacturiers d'éoliennes montrent qu'à 100 mètres de l'éolienne, l'intensité sonore à 16 Hz se situe aux alentours de 50 à 55 dB, ce qui est nettement en deçà du seuil de perception humaine pour cette fréquence, qui est d'environ 85 dB.

    Les revues de littérature internationale montrent qu'on ne peut établir de lien entre les infrasons non entendus et quelque effet néfaste que ce soit. À ce sujet, certains diront qu'ils sont ressentis par le corps et non pas perçus par l'oreille. Or, plusieurs études avec des sons de fréquences très basses jusqu'à 8 Hz ont été menées avec des gens sourds et d'autres dont l'audition était normale. Les résultats de ces études ont révélé que l'oreille est le récepteur le plus sensible du corps. Aucune perception n'a été ressentie dans les deux groupes avant d'avoir préalablement été entendue par le groupe dont l'audition était normale.

    Les infrasons se retrouvent donc partout et selon les connaissances scientifiques actuelles, ceux émis par les éoliennes en représentent une quantité négligeable sans effet nocif pour la santé puisque leur intensité est inférieure au seuil d'audition, même à une distance rapprochée.

    Plusieurs études ont été menées concernant l'acceptabilité sociale des installations éoliennes et plus de dix facteurs ont été identifiés comme notamment des doutes concernant la technologie, la perception d'inégalité, d'injustice ou le manque de participation à la planification du projet. Il faut ajouter à cela, le sentiment subjectif éventuel pour certaines personnes que la production d'infrasons (4), c'est-à-dire de sons inaudibles, de très basse fréquence, serait susceptible d'entraîner des troubles divers: maux de tête, anxiété, dépression. En France (5), une étude confirme qu'en dessous de 500 m entre éolienne et habitation l'acceptabilité d'un projet devient difficile.

    Pour répondre à l'honorable membre, concernant les études sur les conséquences des infrasons sur la santé, il n'y en a pas à ma connaissance en Belgique ou en Wallonie mais les études réalisées au niveau international suggèrent que les niveaux d'infrason près des éoliennes modernes sont en général imperceptibles pour les humains, que ce soit par des mécanismes auditifs ou non. Or on ne peut établir de lien entre les infrasons non entendus et quelque effet néfaste que ce soit.

    D'après la revue de la littérature, et en termes de santé publique, les infrasons émis par les éoliennes ne semblent pas constituer une nuisance ni une menace pour la santé des riverains.

    Finalement, aucune étude de santé publique n'a été menée en Wallonie concernant les nuisances sonores des éoliennes installées. Cependant, le « Cadre de référence pour l'implantation d'éoliennes en Région wallonne », approuvé par le Gouvernement wallon le 18 juillet 2002, fait actuellement l'objet d'une révision.

    Dans le cadre de cette réflexion, une étude a été confiée à un bureau agréé (I.C.A. sprl) afin de réactualiser les normes de bruit des éoliennes en fonction des connaissances les plus récentes de leurs effets sur l'être humain.

    L'étude a aussi pour objectif de déterminer la meilleure méthode acoustique prévisionnelle d'évaluation des incidences sonores d'un futur parc éolien. Ce travail doit bien sûr déterminer tous les éléments spécifiques aux émissions sonores des parcs éoliens et proposer les moyens de les prendre en compte. Ces travaux sont donc destinés à apporter la meilleure réponse possible à la compatibilité des éoliennes avec leur voisinage, notamment dans le cadre des émissions sonores.



    (1) « Eoliennes et santé publique, synthèse des connaissances », institut national de santé publique du Québec, direction de la santé environnementale et de la toxicologie, septembre 2009.
    (2) Herz : Unité de fréquence permettant de mesurer le nombre de fois où un événement survient par seconde et dont le symbole est Hz.
    (3) Décibel: est un sous-multiple du bel, correspondant à 1 dixième de bel dont le symbole est dB. Le bel est unité de mesure logarithmique du rapport entre deux puissances, connue notamment pour exprimer la puissance du son.
    (4) Les rumeurs « scientifiques » concernant les infrasons existant déjà depuis les années '60 : LEVENTHALL G. - How the "mythology" of infrasound and low frequency noise related to wind turbine might have developed. First International Conference on Wind Turbine Noise: Perspectives for Control proceedings, Berlin 17-18 oct 2005, 15 p.
    (5) AFFSET, mars 2008, « Impacts sanitaires du bruit généré par les éoliennes État des lieux de la filière éolienne Propositions pour la mise en œuvre de la procédure d'implantation ».