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Le nouveau cadre de référence éolien (11)

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2012
  • N° : 508 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 15/02/2012
    • de EERDEKENS Claude
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    Est-il exact que l'ancien cadre de référence partait d'une distance de 350 mètres pour considérer qu'il n'y avait plus d'impact au niveau des nuisances sonores?

    Est-il exact qu'il y a une nouvelle règle que l'on peut qualifier de « règle magique » de distance de trois hauteurs d'éolienne qui est évidemment arbitraire?

    Pour quelles raisons s'écarte-t-on de la norme internationale proposée par le monde médical qui conseille de n'implanter des éoliennes qu'à 1500 mètres des habitations?

    Quelles sont les références bibliographiques et les études spécifiques qui ont permis de déduire au niveau de Monsieur le Ministre cette distance de garde nettement inférieure?

    Est-il exact que Monsieur le Ministre entend que des zones d'habitat, au plan de secteur, actuellement non bâties, pourraient se situer à 200 mètres d'une implantation éolienne?

    Est-il exact que, pour Monsieur le Ministre, des habitations implantées en dehors de la zone d'habitat et se situant en zone agricole seraient exclues de toute protection?

    Considère-t-il que des terrains à bâtir, mais non bâtis, pourraient ne plus être autorisés à la bâtisse dès lors qu'ils se situeraient à l'intérieur du périmètre non autorisé pour l'implantation d'éoliennes?

    Autrement dit, pour forcer l'implantation d'éoliennes, compte-t-il interdire la construction de nouvelles maisons d'habitations en zone à bâtir en autorisant l'implantation d'éoliennes mais en zones agricoles, à proximité de zones d'habitat?

    Monsieur le Ministre est-il conscient que la Région wallonne s'exposera à juste titre à des demandes de dommages et intérêts de la part des propriétaires lésés ou des candidats à la bâtisse?

    Que devient enfin l'indicateur HABIT_3 de la cartographie d'exclusion Feltz prévoyant une distance de 700 mètres autour des zones habitables au plan de secteur (et pas uniquement les habitations), pour « confort visuel et acoustique » ?
  • Réponse du 09/03/2012
    • de HENRY Philippe

    Le cadre de référence de 2002 a établi une norme de distance minimale à respecter entre chaque éolienne d’un parc et les premières habitations ou zone d’habitat sur base de la prise en compte de différents impacts potentiels que sont le bruit, l’impact visuel de la machine dans le paysage et l’effet d’ombre portée.

    Comme le renseigne l’honorable membre dans sa question, cette norme a effectivement été fixée à 350 mètres pour les catégories d’aérogénérateurs habituellement utilisées en 2002.

    Il convient de préciser qu’il n’existe pas de valeurs limites de bruit légales, applicables aux éoliennes, en Région wallonne si ce ne sont les niveaux de bruit applicables à un établissement classé contenus dans l’arrêté du Gouvernement wallon du 4 juillet 2002 fixant les conditions générales d’exploitation des établissements visés par le décret du 11 mars 1999 relatif au permis d’environnement (M.B. 21.09.2002 - err. 01.10.2002) . Cette réglementation repose sur la limitation du niveau de bruit provenant exclusivement de l’activité ou de l’installation étudiée (bruit particulier), en fonction de la période de la journée (jour - transition - nuit) et de la zone d’immission prise en compte. Elle s’applique pour autant que la vitesse du vent soit inférieure à 5 m/s (alors que les éoliennes ne fonctionnent pas en dessous d’une vitesse de vent de 3 m/s) et que certaines conditions météorologiques soient réunies (absence de pluie notamment).

    Lorsque la vitesse du vent dépasse les 5 m/s, les mesures de bruit sont faussées par le bruit inhérent au frottement provoqué par le déplacement de l’air dans l’environnement.

    En ce qui concerne l’impact généré par le bruit, la norme de distance de 2002 intégrait notamment la notion « d’effet de masque » qui consiste en un recouvrement du bruit propre de l’éolienne par le bruit créé par le vent sur la végétation ambiante dès lors que la vitesse du vent a dépassé une valeur seuil. Il s’avère en effet que le bruit particulier de l’éolienne est le plus émergent vis-à-vis de l’ambiance pour des valeurs de la vitesse du vent comprises entre 7 et 8 m/s. Il ne servait donc à rien de créer une norme de distance relativement à « l’impact bruit » qui prenne en compte les distances applicables, stricto sensu, pour les vitesses du vent supérieures au seuil dont objet. En effet, on estime que lorsqu’une source de bruit émet une pression acoustique qui est inférieure de 10 dB[A] par rapport à une autre source de bruit, cette première source de bruit est complètement masquée, et devient donc inaudible, globalement.

    La distance minimale à l’habitat se justifie non seulement en respect de la norme de bruit, mais également au regard de l’impact de l’éolienne dans le champ de vue des habitants. Or à 350 mètres, les éoliennes de 2002 qui culminaient à maximum 120 mètres de hauteur occupaient un angle de vision de arctg (120/350) = ±18° d’angle, soit une valeur sensiblement égale à l’angle vertical de reconnaissance visuelle au-dessus de la ligne d’horizon. Au-delà, l’observateur est amené à lever la tête pour voir l’éolienne dans son entièreté, source d’inconfort. Il se fait que les éoliennes actuelles dont la hauteur atteint majoritairement 150 mètres occupent un angle vertical de vision de arctg (150/350) = ± 23° d’angle, soit un angle bien supérieur à l’angle vertical de reconnaissance visuelle au-dessus de la ligne d’horizon. La règle qui impose la distance minimale doit donc la fixer au regard de la hauteur de l’éolienne et non pas de manière fixe et intangible, comme cela fut le cas par le passé. Cette manière de procéder permet de prendre en compte les fluctuations de la hauteur des modèles de machine. L’idée est de conserver un angle de vision similaire à celui admis dès 2002, pour le gabarit des machines de l’époque. Or, il apparaît que tg 18° = ±0,325, soit une valeur très proche du rapport de 1 à 3. Cela signifierait donc qu’une distance satisfaisante pour une vision acceptable de l’éolienne devrait être dans un rapport de 1 à 3 vis-à-vis de la hauteur totale de la machine. C’est le parti qui a été choisi par la « Cellule éolienne » lors de ses travaux. On constate que cette approche par la « règle des 3H », loin d’être arbitraire, est purement géométrique et mathématique et ne relève donc en rien de la magie.

    Cette distance est minimum et peut être nuancée à la hausse en fonction des résultats de l’étude d’incidence.

    Le troisième critère évoqué supra de l’ombre portée reste bien entendu d’application pour l’établissement de la norme de distance mais, dès lors qu’il est tenu compte de la « règle des 3H » comme distance minimale, les périodes de l’année où l’ombre projetée dépasserait le périmètre les 3H seraient clairement limitées (conjonction simultanée du soleil bas sur l’horizon (< 18°, automne - printemps), dans la ligne constituée par le soleil, l’éolienne et l’habitation, à supposer que, lors de cet alignement, les conditions de nébulosité soient telles que le soleil soit visible).

    Si malgré tout des épisodes d’ombre projetée au droit d’habitation sont envisagés lors de l’EIE, ils pourraient néanmoins être pris en compte par les « shadow modules » installés quasi de série sur les éoliennes de nouvelle conception et qui permettent la gestion de tels épisodes, à moindre perte de productible.

    L’Académie française de Médecine, dans son rapport du 23 mars 2006, recommande "[...] par précaution, que soit suspendue la construction des éoliennes d'une puissance supérieure à 2,5 MW situées à moins de 1.500 mètres des habitations".

    Cette consigne, bien que préventive et applicable à un pays voisin, attire l’attention sur les risques éventuels d'une trop grande proximité des éoliennes par rapport aux habitations ; mais le chiffre avancé est peut-être prohibitif : en effet, la plupart des éoliennes installées en Wallonie sont toujours situées à moins de 1 500 mètres d’une habitation étant donné la densité de population que nous connaissons.

    Dans ce cadre, l’AFSSET (Agence Française de Sécurité Sanitaire de l’Environnement et du Travail) a été saisie le 27 juin 2006 par les ministères français en charge de la santé et de l’environnement afin de conduire une analyse critique du rapport de l’Académie de Médecine évaluant le retentissement du fonctionnement des éoliennes sur la santé de l’homme ; le rapport du groupe d’experts de l’AFSSET s’intitule « Impacts sanitaires du bruit généré par les éoliennes », et est paru en mars 2008.

    Dans ses conclusions, ce rapport indique :  « L’examen des données relatives aux niveaux de bruit mesurés au voisinage des éoliennes, des simulations de propagation de son et des enquêtes de terrain montre que la définition à titre permanent d’une distance minimale d’implantation de 1 500 m vis-à-vis des habitations, même limitée à des éoliennes de plus de 2,5 MW, n’est pas représentative de la réalité des risques d’exposition au bruit et ne semble pas pertinente. ».

    Ce rapport recommande d’étudier les incidences du bruit générées par un projet éolien, au cas par cas, comme cela est réalisé dans le cadre de toutes les études d’incidences environnementales qui nous préoccupent en Wallonie.

    Au regard de cette conclusion, il apparaît ainsi que la fixation d’un buffer minimal entre éolienne et habitat, basé sur des critères concrets de bruit, de confort visuel et d’ombre projetée, pouvant éventuellement être revu à la hausse en fonction des résultats de l’EIE, est mieux adapté que le critère de 1 500 mètres préconisé par l’Académie française de Médecine, qui est excessif.