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Le coût de l'éolien pour les Wallons et la Wallonie

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2012
  • N° : 401 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 28/02/2012
    • de EERDEKENS Claude
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    Dans sa note de politique générale énergie, environnement, mobilité du 5 janvier dernier (section II.2.6), le Gouvernement fédéral s'est engagé à orienter notre économie vers un modèle de croissance durable. La Belgique veut faire partie des États pionniers dans la transition vers de nouveaux modes économiques de production et de consommation durables. Dans cette perspective, le Gouvernement a défini trois axes prioritaires, dont celui de « garantir une énergie sûre, durable et accessible à tous ».

    En préalable, notons que :
    - «À cette fin, le secrétaire d'État à l'Énergie prendra une initiative coordonnée avec les Régions ainsi que les quatre régulateurs pour analyser l'ensemble des composantes des coûts de l'énergie (prix de la commodité, tarifs de transport, tarifs de distribution, taxes et prélèvements divers) et il prendra des mesures permettant de les contenir.»;
    - la facture d'électricité a augmenté, en moyenne, de 18% durant les derniers douze mois.

    Une attention toute particulière doit donc être consacrée au système des certificats verts (CV) éoliens. En effet, nul n'ignore que l'approvisionnement en électricité n'est pas un service public ni une entreprise d'Etat et que les opérations de production, transport, distribution et fourniture d'électricité sont assurées par des entreprises qui ne sont pas des institutions de bienfaisance.

    Compte tenu de l'évolution de plus en plus contraignante des quotas de renouvelables imposés, le CV éolien se négocie, en janvier 2012, à un prix (92 euros/MWh) voisin du montant de l'amende (100 Euros/MWh) imposable pour non respect des quotas obligatoires imposés aux Gestionnaires de réseaux de distribution (GRD). Toutefois, et c'est le point essentiel, le financement des sommes correspondant aux CV n'est assuré ni par le trésor fédéral ni par les dotations budgétaires régionales ni par les GRD, mais directement par les consommateurs.

    Pour l'année 2020, et si les 4500GWh/an prévu par le Gouvernement wallon sont devenus une réalité, le montant annuel des CV distribués sera de quelques 414 millions d'euros. A cette date, la somme cumulée des CV distribués aura atteint une masse de 2,93 milliards d'euros à charge des consommateurs.

    Créer une telle amputation du pouvoir d'achat, particulièrement en temps de crise, est une décision politique majeure.

    D'autre part, les investissements éoliens nécessitent de plus en plus d'argent public en primes à l'investissement et aux autres actifs amortissables, financement d'études préalables, études de vent, exonération de précompte immobilier, licences d'exploitation, brevets, crédit d'impôt et autres incitants. Rien que les primes peuvent atteindre pour une PME 50% de la base subsidiable.

    Monsieur le Ministre peut-il nous communiquer par type d'incitant et par année budgétaire, la dépense consentie depuis 2000 ?

    Autre aspect inquiétant. Afin de mettre en oeuvre des énergies alternatives pour remplacer le nucléaire, la note de politique générale énergie, environnement, mobilité, du 5 janvier dernier fédérale précitée se propose de lancer des appels d'offres en accord avec les acteurs de la filière. Dans ce contexte, il faut admettre que :
    - le nucléaire ne pourra pas être remplacé par des éoliennes eu égard au degré de substituabilité médiocre et le souci de sécurisation de l'approvisionnement (voir l'étude de la Politique scientifique fédérale CP/XX/802 March 2006)(1). Il faudra donc maintenir une forte base de production d'électricité par les centrales à gaz ;
    - les centrales à gaz devront inévitablement être subventionnées à la suite du merit order effect induit par le bas prix marginal de l'éolien, lequel aurait en 2020 un taux de pénétration de 15%. En effet, sur le marché du day-ahead, un producteur TGV n'offrira aucun MWh si le prix de ce marché est inférieur à son coût marginal de 45 euros/MWh. Signalons la tendance du prix carbone qui devrait croître de 35 euros/tC02 à 166 euros/tC02 (période 2020 à 2050)(2).

    La dotation budgétaire de la Région wallonne sera donc également sollicitée pour compenser la concurrence déloyale par l'éolien fortement subsidié aussi bien en investissement qu'en production.

    Monsieur le Ministre peut-il
    - confirmer ou non le chiffre de 2,93 milliards de ponction due aux CV sur le pouvoir d'achat des consommateurs wallons ;
    - donner des renseignements sur la compatibilité de la sur-substivation de la filière éolienne avec les contraintes budgétaires des années à venir ;
    - nous fixer sur ses contacts avec le Gouvernement fédéral au sujet d'une « initiative coordonnée avec les Régions ainsi que les quatre régulateurs pour analyser l'ensemble des composantes des coûts de l'énergie (prix de la commodité, tarifs de transport, tarifs de distribution, taxes et prélèvements divers) et il prendra des mesures permettant de les contenir »?


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    (1) Paula Sauto Pérez., Joris Saens, Edwin I-Iacscn, Ronnie Belmans, Johan Driesen. THE ROLE OF RENEWABLE ENERGY TECHNOLOGIES IN SECURING ELECTRICALSUPPLY IN BELGIUM. K. U. Leuven - ESAT/ELECTA. 2006 Appendix 3.
    (2) Loreta Stankeviciute « L'IMPACT DE LA CONTRAINTE CARBONE SUR LE SECTEUR ELECTRIQUE EUROPEEN " Ph D Sc Eco Grenoble 18 mars 2010
  • Réponse du 16/03/2012
    • de NOLLET Jean-Marc

    J’ai déjà pu répondre à de nombreuses reprises sur la question du coût de l’éolien par rapport à d’autres filières renouvelables ; je ne reviendrai plus sur ces aspects.

    Je suis étonné du prix concernant les transactions de certificats verts, évoqué par l'honorable membre. La CWaPE, qui calcule les statistiques de prix moyen des certificats verts, indique un prix en baisse constante depuis le 2e trimestre 2010. Ce prix s’est établi à 80,58 euros au dernier trimestre 2011.

    Je ne confirme donc pas le chiffre évoqué par l'honorable membre de 2,93 milliards d'euros de soutien aux projets éoliens via les certificats verts, qui est manifestement basé sur des hypothèses erronées et, à tout le moins, inconnues.

    J’ai déjà pu répondre à l'honorable membre que l’éolien ne faisait pas l’objet d’une sur-subsidiation par le biais des certificats verts. Toute personne (physique ou morale) qui investit souhaite bénéficier d’un retour sur investissement. Les pouvoirs publics doivent veiller à ce que cette rentabilité soit raisonnable, c’est-à-dire suffisamment attractive tout en évitant les effets d’aubaine. La rentabilité des investissements en électricité verte est strictement encadrée par l’arrêté gouvernemental du 30 novembre 2006 et deux arrêtés ministériels. Les taux de rentabilité de référence des différentes filières y sont déterminés.

    Concernant les chiffres précis des aides à l’investissement accordées à la filière éolienne depuis 2000, j’invite l'honorable membre à poser cette question à mon collègue Jean-Claude Marcourt qui est compétent en la matière.

    Quant à l’initiative du pouvoir fédéral relative aux prix de l’énergie, comme j’ai déjà pu le souligner, un manque de concertation avec les régions est à déplorer jusqu’à présent. La Wallonie réclame donc rapidement une réunion du Comité de concertation sur ce sujet.

    Enfin, je porte à la connaissance de l'honorable membre que le développement de l’électricité verte contribue aussi à améliorer la concurrence sur le marché électrique. On le perçoit déjà : lors des épisodes venteux ou ensoleillés, les prix du courant sur le marché de gros sont à la baisse grâce à l’apport important des sources éoliennes et photovoltaïques.