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L'importance du phénomène des marnières en Wallonie

  • Session : 2012-2013
  • Année : 2013
  • N° : 454 (2012-2013) 1

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  • Question écrite du 26/02/2013
    • de de COSTER-BAUCHAU Sybille
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    En Région wallonne, nous connaissons bien le phénomène de marnières. En effet, durant des siècles, de nombreuses galeries ont été creusées dans le sous-sol wallon afin d’en extraire la marne.

    Combien de maisons ou de terrains ont été endommagés en Wallonie suite à l’effondrement de l’une de ces galeries ?

    Quels ont été les coûts engendrés par ces effondrements sur des terrains ou des biens immobiliers appartenant au SPW ?

    Quel est le montant des dépenses investies par la Région wallonne afin de détecter et de prévenir les risques d’effondrement liés à ces galeries sur ses terrains ?
  • Réponse du 17/05/2013
    • de HENRY Philippe

    Je tiens tout d'abord à rappeler à l'honorable membre la réponse à la question orale à Monsieur le Député Christophe Collignon, apportée en séance du 29 janvier 2013 dont il ne s’agit pas de se départir.

    Les marnières ne regroupent qu'une partie des carrières souterraines en Wallonie (calcaires de construction, grès à pavés ou à moellons, phosphates, ardoises, silex…). Il s'agit des carrières de craie blanche ("marne"), en Hesbaye liégeoise et dans l'est du Brabant wallon, ou de sables calcareux, dans le reste du Brabant wallon ou à Bruxelles.

    Si cette distinction peut paraître anodine, elle trouve cependant un sens particulier en termes de géotechnique et d’impact probable au sol. En effet, par rapport aux autres carrières souterraines, la plupart des galeries et salles qui ont servi à l’exploitation de la marne sont généralement proches de la surface et situées dans et sous des terrains de caractéristiques géotechniques médiocres. Il ne faut surtout pas y inclure les "puits à phosphate" de Hesbaye, qui sont en fait des exploitations industrielles (fabrication d'engrais phosphatés en usine) de grande surface, mais qui ne se manifestent en surface que par des débourrages de leurs très nombreux puits d'accès de faibles dimensions. Ils occupent la même aire géographique que les marnières.

    Dans l’acception précitée, à ce jour, 210 incidents et accidents à l'aplomb de carrières souterraines ont été répertoriés depuis 1980. La majorité de cas s’est produite sur des marnières ou des carrières assimilées (incidence plus ou moins importante selon la taille des vides effondrés, leur profondeur et la qualité géotechnique des terrains en surface) et sur les carrières de phosphate (débourrages de puits sans grande incidence). L’on peut globalement dire que l’impact réel au sol (superficie) va de moins d’un mètre carré à plus de 700 m2 (30 mètres de diamètre).

    Les données antérieures à 1970 sont parcellaires. Elles ne présentent un caractère vraiment représentatif qu'à partir de 1980. Les occurrences récentes semblent liées aux phénomènes atmosphériques (pluies intenses) conjointement constatés sur la même période. Il est cependant à signaler qu’à part de rares cas où certains travaux d’excavation (fondations et autres) rencontrent ou percent le toit d’une salle d’exploitation, la majorité des événements connus sont à mettre en relation avec des infiltrations plus ou moins localisées et prolongées d'eau (périodes de fortes précipitations, orages, inondations, fuite aux canalisations d'adduction ou d'évacuation, raccords non étanches de citernes ou fosses septiques). Ces infiltrations provoquent le débourrage des remblais des puits, l'effondrement dans les galeries du contenu meuble de cheminées ou poches ou l'effondrement du toit des galeries. La plupart du temps, les effondrements de marnières se produisent dans des lieux dont la mémoire collective a perdu la trace et pour lesquels il n'existait pas d'autorisations administratives avant 1852.

    Quant au coût d’un tel événement, il dépend de sa localisation et, en conséquence, de l’occupation réelle du sol à l’endroit considéré. Cela peut aller du « coût » de quelques dizaines de litres de gasoil quand un agriculteur remblaie un vide apparu dans un champ ou une à plusieurs dizaines voire centaines de milliers d’euros. Dans le cas de Wasseiges, par exemple, le coût en personnel, pour la Direction de la Géotechnique de la DGO1, s’élève, depuis le début des interventions en mars 2011 à 70 000,00 euros, le coût en matériel et essais atteint 30 000,00 euros. Il s’agit de coût total pour les diverses interventions sous domaine privatif, communal et régional. N’y sont pas inclus, les prestations de bureau et de réunions ni les travaux de traitement des problèmes (confortement de piliers, remblayage, ventilation, aménagement d'accès, sécurisation des sites). L’on peut estimer la répartition suivante : domaine privatif, 25 % ; domaine communal, 15 % ; domaine, régional, 60 %. Je tiens à la disposition de l’Honorable Membre d’autres données chiffrées des coûts inhérents aux prestations de cette Direction dans le cadre de la problématique des marnières ou, plus généralement, des anciennes exploitations (carrières) souterraines sur d’autres sites.

    Quand le bien est assuré et qu’il est démontré que c’est l’action de l’eau qui est en grande partie responsable et l’apparition du phénomène et des dégâts consécutifs, certains assureurs acceptent de prendre en charge les travaux de stabilisation et de reconstruction. Dans de nombreux cas, soit l’assureur n’accepte pas d’assumer les dégâts, soit les propriétaires ou occupants ne sont pas assurés. En l’état de la législation, je ne puis que renvoyer l’honorable membre à la réponse qui a été fournie à Monsieur le Député Christophe Collignon.

    Par ailleurs, lorsqu’un tel événement se produit dans une zone dévolue à l’agriculture (champs cultivés, prairies), les terrains sont, la plupart du temps, remblayés sans que l’administration n’en soit informée (qu’il s’agisse de la Direction de la Géotechnique de la DGO1, de la Direction des Risques industriels, géologiques et miniers de la DGO3 ou de la Cellule « Aménagement – Environnement » du Département de l’Aménagement du territoire et de l’Urbanisme de la DGO4).

    À dire vrai, l’information relative à l’apparition de ce type de phénomène ne remonte vers ces administrations que lorsque celui-ci vient à toucher directement une structure, une infrastructure ou qu’il est localisé à très grande proximité d’une zone urbanisée. L’un des problèmes récurrents est donc que l’on ne peut prétendre à l’exhaustivité du relevé des événements visés ci-dessus.

    Du reste, les marnières sont loin de constituer les seuls phénomènes d’origine anthropique qui posent problème tant en terme d’aménagement du territoire, d’urbanisme et d’architectonique.

    Enfin, quant à la troisième question soulevée, je tiens à signaler qu’une vaste politique de compilation (sur plus de 10 ans) et de mise à disposition (depuis 2 ans) des informations relatives aux activités souterraines (toutes exploitations confondues) est menée par la Direction des risques Industriels, géologiques et miniers de la DGO3 dépositaire d'une partie des archives de l'ex-Administration des Mines depuis que cette matière est dévolue aux compétences régionales. L'Administration wallonne a investi, depuis 2001, plus de 4 000 000 euros dans les seules cartographies des mines, minières et carrières souterraines. Toutes ces données aboutiront dès fin 2013 et en 2014 à la Fiche d'Informations Sous-sol, destinées aux citoyens et permettant de mieux connaître les données relatives au sous-sol d'un bien donné.

    L’augmentation de l’identification des événements liés à la présence de marnières au cours de ces 20 dernières années (183 occurrences) s’explique aussi, sans doute, par la sensibilisation accrue de la population à l’apparition de ce genre de phénomènes et aux risques y associés, par l’extension de l’urbanisation dans des zones anciennement connues pour être exposées à ce type de risques et aussi, comme évoqué précédemment par des pratiques déplorables en matière de gestion des eaux de pluie et des eaux vannes.

    Un vaste chantier est d’ores et déjà entrepris. La collaboration de plusieurs directions générales du SPW vise à répondre de la manière la plus pertinente, dans des délais raisonnables et avec les moyens financiers dont dispose la Région, à une problématique dont les aspects sont pluriels (DGO1 – DGO3 - DGO4).