/

La situation de l'entreprise NLMK à Jemappes

  • Session : 2014-2015
  • Année : 2015
  • N° : 151 (2014-2015) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 12/03/2015
    • de MARTIN Nicolas
    • à MARCOURT Jean-Claude, Ministre de l'Economie, de l'Industrie, de l'Innovation et du Numérique

    Le 24 février, suite aux rumeurs relayées par la presse indiquant que la société NLMK projetait de mener une restructuration de ses sites wallons, je vous interrogeais en commission sur les intentions du groupe et les conséquences de celles-ci en Wallonie, et particulièrement à Jemappes.

    Les rumeurs faisaient notamment état d'une possible fermeture de ce site, entrainant la perte potentielle de 60 emplois. Très rapidement cependant, la société avait démenti ces informations, considérant qu'elles "relevaient de la spéculation".

    Il apparait cependant aujourd'hui que ces nouvelles rassurantes n'étaient pas fondées et ont induit les travailleurs du groupe en erreur.

    Nous apprenions en effet jeudi dernier que la procédure Renault avait été enclenchée par la direction et que celle-ci envisageait une fermeture pure et simple du site de Jemappes.

    Deux éléments m'interpellent dans ce dossier. Premièrement, le caractère inadmissible des messages rassurants envoyés par la direction, il y a de cela à peine deux semaines, avant de procéder à un revirement total.

    Deuxièmement, et c'est le plus important encore, le sort de ces travailleurs. À ce titre, il me semble essentiel que le Gouvernement puisse envoyer un signal clair à la société, qui est entre-temps devenue en bonne partie propriété de la SOGEPA, en vue de la concertation sociale qui s'annonce.

    Notre objectif doit être de veiller à ce que cette concertation sociale se déroule dans les meilleures conditions et envisage réellement toutes les options mises sur la table par les organisations syndicales. À cet égard, la spécificité du site de Jemappes, qui est le seul à produire de grosses épaisseurs, doit être prise en compte, car elle cadre mal avec l'argumentation avancée d'un regroupement sur un autre site hennuyer.

    On est dès lors en droit de s'interroger sur le bien-fondé d'une telle annonce.

    La direction ayant par ailleurs déjà fait preuve d'un manque de considération certain pour ses travailleurs, il est indispensable de suivre de près le déroulement de la procédure Renault.

    Compte tenu du manque de considération manifesté par la direction jusqu'à présent, quelles actions sont envisagées par le Gouvernement pour s'assurer que la concertation sociale intègrera réellement toutes les pistes permettant le maintien d'un maximum d'activités?

    Peut-on par ailleurs obtenir des informations supplémentaires sur les raisons de cette restructuration et sur le rôle et la plus-value que la SOGEPA peut apporter dans ce dossier ?
  • Réponse du 07/05/2015
    • de MARCOURT Jean-Claude

    Depuis la création de la CECA, première initiative pour coordonner à l’échelle européenne une politique industrielle, les États et les Régions qui hébergent des entités sidérurgiques se préoccupent de l’évolution de ce secteur.

    L’évolution des technologies impacte les modes de production, c’est un constat. L’arrivée de nouveaux matériaux, une concurrence mondialisée et une croissance erratique depuis plusieurs dizaines d’années ont conduit à de profondes mutations et restructurations de ce secteur symbolique de l’industrie en Europe, et plus particulièrement en Belgique et en Wallonie.

    Depuis plusieurs décennies, les ministres de l’Économie successifs ont essayé de favoriser la mutation de ce secteur en soutenant des projets d’investissement dans des branches d’activités prometteuses ou en finançant des projets de recherche pour développer de nouveaux produits.

    On peut se réjouir aujourd’hui des investissements réalisés sur les sites d’APERAM à Châtelet ou d’INDUSTEEL à Marcinelle qui opèrent dans des niches d’activités porteuses si l’Europe veille à des règles de concurrence loyale avec les autres parties du monde. Faut-il rappeler la procédure en cours au niveau de l’UE concernant les importations d’Inox chinois.

    Il faut féliciter également la qualité des projets de recherche menés au sein du CRM qui ont permis d’alimenter la diversification des filières dans l’aval de la phase à chaud. Dans la région liégeoise, les différents projets en cours et issus de partenariats avec les acteurs privés démontrent bien que l’avenir de l’acier réside dans les produits de haute technologie. Ainsi, avec la Région, ArcelorMittal développe un nouvel acier galvanisé sous vide, le JVD, dont la première industrialisation se fera à Liège.

    Citons également le projet Reverse Metallurgy, destiné à créer et développer, en partenariat avec les PME et les acteurs du monde scientifique, de nouvelles activités économiques dans le domaine du traitement et de la valorisation des métaux issus de l’économie circulaire.

    Par conséquent, si la Région s’implique aux côtés des sidérurgistes afin de conserver à long terme des emplois sur son territoire, elle réfléchit en parallèle à la reconversion des bassins, main dans la main avec les acteurs locaux. 

    Néanmoins, malgré l’attention portée à ce secteur par les ministres successifs dans la politique économique de la Région, des restructurations importantes ont encore dû être encaissées ces dernières années, avec comme déclencheur la crise financière résultant de la politique libérale menée à l’échelle européenne.

    En effet, il faut constater que depuis 2007, la chute du prix de vente du coil à chaud est telle que le groupe NLMK effectue ses ventes à perte. Par conséquent, le groupe a décidé de réduire sa production globale, et la production en Wallonie est passée d’1 M de tonnes par an entre 2005 et 2008 à 600.000 tonnes à ce jour.
    L’année 2014 s’est à nouveau clôturée sur une perte de l’exercice. Afin d’assurer la pérennité du Holding européen, il convenait de procéder à sa recapitalisation. La SOGEPA, en tant qu’actionnaire, a pris ses responsabilités et participe donc, aux côtés de la maison-mère russe, à la recapitalisation du Holding.
    Ainsi, le capital de la société « NBH » (le Holding européen) a été augmenté suite aux deux opérations suivantes :
    - apport au capital de créances à court terme détenues par NLMK sur NBH, sans émission d’actions nouvelles (220 millions d’euros) ;
    - augmentation de capital en numéraire (40 millions d’euros, 51 % NLMK – 49 % SOGEPA).

    Dans le cadre de ces opérations, la SOGEPA voit sa participation augmenter de 20,5 % à 49 %.

    Dans un second temps, NBH a procédé à une augmentation de capital de 40 millions dans « NLMK La Louvière ».

    À la suite de cette modification de l’actionnariat, la composition du Conseil d’administration de « NBH », la maison mère européenne, a été modifiée. La SOGEPA a obtenu un mandat supplémentaire, ainsi qu’une présence au sein du Conseil d’administration des différentes filiales en Europe afin de, notamment, suivre l’évolution des financements de l’activité.

    L’opération a également engendré une modification de la convention d’actionnaires, renforçant les droits de la SOGEPA tant au niveau du Conseil d’administration qu’au niveau des décisions incombant à l’Assemblée générale.

    En outre, dans le cadre de cette intervention, le groupe NLMK a pris divers engagements, scellés dans une convention signée au début de ce mois. Il s’est notamment engagé à couvrir les besoins financiers non couverts qui pourraient survenir dans les 3 ans à venir et à sécuriser l’approvisionnement des matières premières.

    En marge du renforcement des fonds propres par les actionnaires, en vue d’assurer au holding européen la mise à disposition des liquidités nécessaires, le renouvellement de la ligne de crédit du holding européen a été négocié avec la banque principale du groupe. Le groupe NLMK s’est engagé à garantir une nouvelle ligne de crédit bancaire de 250 millions, remplaçant en partie l’ancienne ligne de crédit venant à échéance en 2015. Par ailleurs, une seconde ligne de crédit bancaire de 130 millions d’euros est en cours de négociation avec un pool bancaire. Cette ligne de crédit bénéficiera de la garantie de la Région wallonne. Dans l’attente de l’obtention de cette ligne de crédit, la SOGEPA a accordé un crédit pont du même montant, qui sera libéré par tranches successives, couvert d’abord par une garantie de la maison-mère russe et ensuite via une partie des stocks et des créances. Cette ligne de crédit sera assortie des mêmes modalités que celle de 250 millions actuellement en cours de conclusion avec les banques, tant en termes de taux d’intérêt que de couverture des frais de gestion ou des garanties accordées.

    La SOGEPA intervient pour soutenir un projet industriel. Son intervention est basée sur un business plan crédible, dont les principales hypothèses sont les suivantes :
    * par prudence, le spread est maintenu à son niveau actuel durant les trois prochaines années (cet élément est très difficilement prévisible). Ensuite, une remontée du prix de vente du coil au niveau existant durant la période 2008 à 2013 est supposée. Pour rappel, ce niveau de prix était déjà dans la fourchette basse ;
    * la poursuite de l’optimalisation des outils de production, notamment via la maîtrise des frais fixes. Le business plan prévisionnel est établi après la réorganisation en cours et ne comporte pas de plan social complémentaire.
    En ce qui concerne les restructurations en cours, il convient de souligner que les plans sociaux sont intégralement pris en charge par l’actionnaire russe ;
    * une augmentation progressive des volumes.

    Ce business plan a fait l’objet d’un examen approfondi par un cabinet de consultance, qui se penche tant sur les hypothèses sous-tendant le plan que sur la valorisation qui en découle. Ce plan a été réalisé de façon conservatrice puisqu’il prévoit, au-delà de 2017, une remontée très lente du spread et une progression des volumes moins rapide que dans le business plan initial.

    Le business plan, outre des investissements de maintenance, prévoit aussi des investissements d’expansion sur les sites belges, pour plusieurs millions d’euros.
    Plus précisément, sur le site de La Louvière, 7,6 millions d’euros d’investissement sont prévus en 2015. Sur le site de Clabecq, 3,2 millions d’euros d’investissement sont prévus en 2015.

    L’opération dans son ensemble a été négociée, tout au long de celle-ci, avec la collaboration d’un cabinet d’avocats, notamment pour ce qui concerne la problématique du droit de la concurrence et des aides d’état.