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Les biocarburants.

  • Session : 2004-2005
  • Année : 2004
  • N° : 36 (2004-2005) 1

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  • Question écrite du 24/11/2004
    • de DETHIER-NEUMANN Monika
    • à LUTGEN Benoit, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme

    Le Gouvernement fédéral doit transposer deux directives européennes sur les biocarburants pour fin 2004 et certains articles de ces directives concernent les autorités régionales.

    Plusieurs réunions de comités interministériels ont déjà eu lieu à ce propos. C'est pourquoi, je souhaite connaître la position défendue par la Région wallonne en cette matière vis-à-vis du Gouvernement fédéral.

    C'est d'autant plus important que l'adoption massive des biocarburants pourrait avoir des conséquences dommageables pour l'environnement en Wallonie, notamment en termes d'acidification, de qualité des eaux souterraines et de perte de biodiversité. Il faut d'ailleurs noter les réserves du Conseil fédéral du développement durable dans ce sens.

    J'aimerais donc savoir si ces éléments sont pris en compte dans la position défendue dans les réunions de comités interministériels et sur les balises que la Région juge nécessaires de fixer pour encadrer le développement des biocarburants.
  • Réponse du 28/07/2005
    • de LUTGEN Benoît


    La question de l'honorable Membre porte sur deux volets distincts que je vais aborder successivement.

    Tout d'abord, la transposition des réglementations européennes en droit belge et l'action wallonne dans ce processus de transposition.

    La directive 2003/30 visant à promouvoir l'utilisation de biocarburants ou autres carburants renouvelables dans les transports a été transposée le 4 mars 2005 par l'arrêté royal relatif aux dénominations et aux caractéristiques des biocarburants et d'autres carburants renouvelables pour les véhicules à moteur et pour les engins mobiles non routiers.

    Cet arrêté royal fixe les définitions des biocarburants et les parts minimales à inclure dans les carburants fossiles.

    La directive 2003/96 restructurant le cadre communautaire de la taxation des produits énergétiques et de l'électricité afin d'autoriser les facilités fiscales en faveur des biocarburants, mais sans surcompensation, a été transposée le 12 juillet 2005 par le Titre V de la loi programme - Finances/Biocarburants.

    Mes collaborateurs ont participé activement à la mise au point de ces textes qui fixent le cadre général, mais pas les modalités d'application. Il reste en effet à fixer le cahier des charges ainsi que la procédure de l'appel d'offre qui déterminera l'attribution à divers opérateurs économiques des volumes de carburants qui, pendant 6 ans, pourront bénéficier des facilités fiscales prévues par la loi programme du 12 juillet 2005. C'est à ce niveau que je viellerai à ce que soient dûment pris en compte, dans les critères d'attribution, les aspects bilan environnemental et valorisation des matières premières agricoles belges.

    Concernant le second volet de la question, en particulier les effets environnementaux du développement d'une filière biocarburants, il faut d'abord relativiser les choses. En effet, une incorporation à hauteur de 5,75 % en volume à l'horizon 2010 ne peut pas vraiment être dénommée, comme le mentionne l'honorable Membre, une « adaptation massive des biocarburants ».

    Sur le plan environnemental, je ne peux que m'insurger contre les approches réductrices de la question des effets liés à la possible intensification de l'agriculture qui serait nécessaire pour produire les matières premières. Tout d'abord, l'augmentation sensible de la demande en matières premières agricoles pour alimenter les filières non alimentaires ne va pas augmenter les superficies agricoles. Nous ne sommes pas en Amazonie. Les plans de secteur interdisent de déboiser. Et même si c'était le cas, la piètre qualité des zones forestières rendrait la rentabilité de telles cultures plus qu'aléatoire. Alors, retourner les prairies et ensemencer les jachères ? La réforme de la PAC a, en quelque sorte, gelé définitivement le pourcentage des surfaces agricoles qui sont réservées aux prairies et jachères. On peut faire une rotation, mais ce pourcentage doit rester constant sous peine de sanctions financières.

    Le choix de l'agriculteur n'est donc pas d'augmenter ses surfaces, mais plutôt de choisir ses cultures et surtout l'orientation de ses récoltes, soit vers la filière alimentaire, soit vers le non alimentaire en fonction des prix du marché.

    Autre argument classique. Une demande plus forte à un prix moindre encouragera des méthodes culturales plus intensives avec un usage plus important de pesticides et fertilisants. C'est là également un commentaire qui ne tient pas la route. Compte tenu du coût de ces intrants, les agriculteurs n'ont aucun intérêt à forcer sur les doses. En 20 ans, l'usage d'insecticides et de fongicides pour betteraves a été réduit à quasiment zéro et celui d'herbicides a été réduit de moitié. D'autre part, les conditionnalités, maintenant liées à l'obtention des primes, découragent également les excès du passé.

    Je soulignerai plutôt, en particulier à l'intention du CFDD, les effets positifs du développement de cette filière :

    - développer une filière biocarburants améliore l'indépendance énergétique ce qui, dans le contexte actuel, n'est certainement pas un aspect négligeable ;

    - les biocarburants sont une source d'énergie renouvelable. Le cycle est fermé : le CO2 émis lors de la combustion est récupéré par la photosyntèse lors de la croissance des plantes. On estime que l'on peut compter sur une économie de 1,92 tonne de CO2 par m3 de biométhanol (par rapport à l'essence). Sur la base des deux projets wallons actuellement à l'étude, cela permettrait une économie de 330.000 tonnes de CO2 à Wanze (biométhanol) et de 26.880 tonnes de CO2 à Feluy (biodiesel) ;

    - de plus, la combustion des biocarburants est plus propre que celle des carburants fossiles car les émissions de particules sont réduites.



    Comme déjà mentionné ci-dessus, un bilan énergétique positif et des bénéfices tant pour l'environnement que pour le secteur agricole sont les balises qui guident ma position et celle de mes collaborateurs à toutes les étapes de cet important dossier.