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La consommation de substances illicites durant les festivals

  • Session : 2015-2016
  • Année : 2016
  • N° : 1345 (2015-2016) 1

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  • Question écrite du 29/07/2016
    • de LECOMTE Carine
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    Le Grand-Duché de Luxembourg ne fait pas exception : la drogue s’invite aussi dans le paysage festif des mois d’été. En 2015, des données ont été récoltées lors de seize événements par le Centre de prévention des toxicomanies luxembourgeois, soit auprès d’un total de plus de 75.000 visiteurs.

    La drogue illégale la plus usitée reste le cannabis que 27,5 % des personnes interrogées indiquent avoir consommé récemment. Ensuite vient le groupe des substances stimulantes : 5,8 % pour l’ecstasy, 4,8 % pour les amphétamines et 4,6 % pour la cocaïne. Les auteurs de l’étude notent un regain d’intérêt marqué pour les drogues hallucinogènes : champignons contenant de la psilocybine, LSD et autre kétamine.

    Enfin, les hommes sont les consommateurs les plus nombreux, en particulier concernant les drogues illicites : trois fois plus d’hommes que de femmes consomment ainsi du cannabis.

    Cette année, à l’occasion du festival de Dour, un important dispositif antidrogue a été mis en place à l’intérieur et aux abords du site. Les statistiques policières montrent que d'importantes quantités de drogues ont été saisies, sur et hors du site de l'événement. Ainsi ce sont pas moins de 3.220,85 grammes d'herbe de cannabis, 348,63 grammes de résine de cannabis, 174,32 grammes de cocaïne, 2.015 pilules d'ecstasy, 140,96 grammes d'amphétamine (speed), 339,18 grammes de méthylènedioxyméthamphétamine (MDMA), 452 timbres de LSD, 154,01 grammes de kétamine, 3,61 grammes d'héroïne, 46,28 grammes de champignons et 159 pilules qui ont été confisqués sur le site même.

    A cette saisie s’ajoutent des quantités importantes de stupéfiants confisqués aux portiques de sécurité ainsi que lors des contrôles routiers, sans compter les produits simplement abandonnés sur le site.

    Autant de mesures qui n’ont pas pu empêcher le décès par overdose d’une jeune festivalière française.

    En tant que ministre de la Santé, des actions sont-elles entreprises par le département de Monsieur le Ministre afin de prévenir l'usage de substances illicites lors des festivals de musique ? Dans l'affirmative, quelles sont-elles ? Des contacts ont-ils été pris avec son collègue en charge de la Culture à la Fédération Wallonie-Bruxelles, afin d’élaborer une stratégie visant à lutter contre cette banalisation de la consommation de drogues lors des festivals ? Si oui, pourrait-il nous en donner les grandes lignes ?

    Monsieur le Ministre dispose-t-il de statistiques «ventilées» sur l'usage de substances illicites durant les festivals d'été ? Dans l'affirmative, pourrait-il nous détailler celles-ci ?
  • Réponse du 23/08/2016
    • de PREVOT Maxime

    Je répondrai sur base de mes compétences dans le domaine de la santé : le nombre de personnes consommant des substances psychoactives licites ou illicites m'alarme dans la mesure où cette consommation peut avoir un impact négatif sur la santé des consommateurs ou celle de leur entourage.

    En ce qui concerne les données sur les comportements à risque des festivaliers, je vous invite à lire les résultats de l’enquête de Solidaris intitulée "Alcool, Sexe, drogues & festivals (http://www.institut-solidaris.be/wp-content/uploads/2016/06/Sexe-drogues-et-festivals.pdf) qui a interrogé 960 festivaliers entre 14 et 30 ans (du 20 au 31 mai 2016). Les résultats mettent en lumière les risques encourus par les festivaliers, mais aussi la conscience de ces risques et l’attente de plus de prévention. Cette étude confirme que les festivals restent des lieux où la prévention en matière de santé et la réduction des risques peuvent être efficaces. Elle montre que le public est demandeur d’une prévention plus étendue et plus accessible.

    D'ailleurs, la grande majorité des festivaliers est attentive aux risques et aux moyens de protection (par exemple, consommation régulière d’eau, crème solaire, préservatifs), mais :

    - l’alcool (la bière surtout) reste largement consommé et parfois en grande quantité ;
    - 16 % des moins de 21 ans consomment du cannabis (mais 6/10ème des festivaliers disent ne jamais consommer de cannabis) ;
    - trop peu de festivaliers boivent régulièrement de l'eau ;
    - trop peu de festivaliers protègent leur ouïe avec des bouchons d’oreille ;
    - 55 % des festivaliers ont déjà eu des rapports sexuels pendant un festival. Dans 10 % des cas, les rapports sexuels avec un partenaire non régulier n'étaient pas protégés ;
    - les festivaliers sont également sensibles au confort qui leur est offert : prix et qualité de la nourriture, points d’eau propres et accessibles, douches ;
    - la population consommatrice de mélanges d’alcool et de boisson énergisante est celle dans laquelle se retrouve le plus grand taux de comportements à risque.

    Je suis donc particulièrement attentif à ces risques encourus par les jeunes durant les festivals musicaux. Depuis plusieurs années déjà, la Wallonie met en place une série de mesures afin de lutter contre les dangers liés aux différents excès durant ces évènements (alcool, drogues, sexe non protégé, mais aussi nuisances sonores et déshydratation). Je soutiens en effet, en matière de prévention, une approche générale de promotion de la santé, la seule efficace. Non seulement cette approche ne se focalise pas sur un type de produit (ce qui peut être contreproductif, particulièrement chez les adolescents attirés par l'interdit), mais elle englobe tous les comportements à risque en cherchant à promouvoir de manière générale des comportements moins risqués pour la santé.

    Différents centres de promotion de la santé sont subsidiés par la Région wallonne, comme l’ASBL Modus Vivendi. Celle-ci a notamment développé en Région wallonne depuis 2009 un projet pour réduire les risques courus par les festivaliers : le label "Quality Nights".


    Concrètement, lorsqu’un organisateur d’évènements ou un patron d’un lieu festif demande de bénéficier de ce label, une négociation se met en place dont l’objectif est d’obtenir un accord sur la mise à disposition de certains dispositifs (messages de prévention à propos du son et de ses dangers, offre de bouchons d’oreilles, messages et actions à propos des dangers liés à la consommation d’alcool et d’autres drogues, mais également distribution de préservatifs, mise à disposition d’une fontaine d’eau contre la déshydratation, etc.).

    "Quality Nights" est un projet enthousiasmant qui répond à l'augmentation de la demande des lieux festifs qui, de plus en plus, veulent prendre soin de leur public. Ce label s'est d'abord développé à Bruxelles, il s'est ensuite répandu en Wallonie et en Flandre, pour se développer maintenant dans le nord de la France. En 2015, plus de 60 lieux ont été labélisés en Belgique. Les 18 lieux labellisés en Région wallonne ont une capacité annuelle totale de plus de 500.000 personnes. Ces dernières peuvent ainsi profiter des services et du matériel mis à leur disposition, c'est-à-dire – annuellement – plus de 5.000 brochures, 14.000 bouchons d’oreille et 8.500 préservatifs. Le projet actuel vise en priorité les discothèques, soirées récurrentes et salles de concert.

    Mais la méthodologie "Quality Nights" peut également servir de support à un travail de promotion de la santé dans les cafés dansants ou les gros évènements festifs ponctuels. Des expériences pilotes "Quality Nights Bar" ont été menées en Wallonie et seront développées davantage, grâce notamment à une collaboration étroite avec l’Agence Wallonne pour la Sécurité routière (AWSR). Par ailleurs, le concept "Quality Nights Event" a été testé et deux festivals sont déjà labellisés : les festivals "Esperenzah" (2016) et "Gedinne Plein Air" (depuis 2014).

    Concernant les dangers liés à la déshydratation, un plan "Forte chaleur et pics d’ozone" est mis en place chaque année depuis 2006 par la Wallonie. Parmi les nombreuses actions mises en place, une brochure claire et synthétique a été rédigée à destination des organisateurs d’événements festifs pour recommander un renforcement des équipes de secours, l’approvisionnement en boissons fraîches, l’étude et le suivi des conditions d’ensoleillement, la mise en place d’espaces suffisamment ventilés et rafraîchis ainsi que le report ou même l’annulation de la manifestation selon les seuils d’alerte. Cette brochure intitulée "Recommandations aux organisateurs d'événements sportifs ou culturels" peut être consultée et téléchargée à l’adresse suivante : http://socialsante.wallonie.be/?q=plan-wallon-forte-chaleur-pics-ozone/recommandations.

    Je continuerai à soutenir des mesures de réduction des risques pour protéger la santé, particulièrement des plus jeunes. Si cela s'avérait nécessaire, pour compléter ces mesures, je prendrais contact avec mon collègue en charge de la culture. Mais je reste actif, via mon Cabinet, dans la Cellule générale de politique en matière de drogues afin d'élaborer des actions concertées avec le Gouvernement fédéral et les autres entités fédérées en englobant des actions qui ne relèvent pas de mes compétences, notamment ce qui concerne le contrôle du trafic de substances psychoactives, la poursuite des trafiquants, le contrôle de la prescription de médicaments psychoactifs ou encore l'interdiction de la publicité pour l'alcool.