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Le "locked-in syndrome"

  • Session : 2016-2017
  • Année : 2017
  • N° : 729 (2016-2017) 1

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  • Question écrite du 22/03/2017
    • de MARTIN Nicolas
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    Une centaine de Belges souffriraient du syndrome de l’enfermement. Aussi appelé le « locked-in syndrome », la personne qui en est atteinte suite à une lésion cérébrale (pouvant être causée par un AVC par exemple) est paralysée, enfermée dans son propre corps, consciente de ce qui se passe autour d’elle, mais ne pouvant réagir que par clignements d’œil. Une souffrance énorme tant pour la victime que pour son entourage, incapable d’échanger avec elle.

    À l’heure actuelle, les infrastructures pouvant accueillir les personnes atteintes du syndrome de l’enfermement sont peu nombreuses, voire inexistantes. En général, les patients sont pris en charge au sein de centres neurologiques spécialisés tant que « l’on peut voir une évolution » comme l’explique la Docteure Anne Frédérick, neurologue dans le Centre hospitalier neurologique William Lennox à Louvain-la-Neuve.

    Le problème c’est que ce syndrome ne permet pas de grandes évolutions, ce qui contraint généralement les proches à reprendre le patient chez eux ou à le placer dans des institutions peu adaptées, ce qui constitue de lourds investissements pour les familles. L’idéal serait un lieu où ces patients puissent être pris en charge de manière adaptée, entourés d’aides telles que des ergothérapeutes, des kinésithérapeutes, des logopèdes, des psychologues, etc.

    De telles structures sont-elles envisageables en Wallonie ? Certains hôpitaux publics présentent-ils une spécialisation spécifique en la matière ? Quel accompagnement est offert aux familles confrontées à cette maladie si particulière ?
  • Réponse du 06/04/2017
    • de PREVOT Maxime

    Le Locked-in syndrome (LIS) a été défini par l’American Congress of Rehabilitation Medecine comme étant un tableau clinique associant une ouverture des yeux, des capacités cognitives relativement préservées, une atteinte sévère de la parole, une quadriplégie ou une quadriparésie et une communication basée sur les mouvements oculo-palpébraux. Le LIS est la plupart du temps la conséquence d’un AVC du tronc cérébral, les causes traumatiques étant plus rares. Généralement, il prive le patient de tout mouvement excepté du clignement des paupières et du mouvement vertical des yeux. La conscience reste intacte.

    Diagnostiquer un LIS n’est pas aisé et requiert une grande expertise. Une étude menée par l’Association française du Locked-in Syndrome (ALIS) à la fin des années 2000 a laissé apparaître que dans près de 40% des cas, c’était la famille et non le médecin qui réalisait que le patient était conscient et qu’il pouvait communiquer avec des mouvements oculaires. Or, il est essentiel de ne pas perdre de temps pour sortir au plus vite le patient de son isolement, car il a été démontré que des soins rééducatifs intensifs, commencés dès la phase aiguë du LIS, améliorent l’évaluation fonctionnelle et diminuent le taux de mortalité. Avec des soins appropriés, l’espérance de vie peut atteindre plusieurs décennies et permettre réellement au patient de mettre en place de nouveaux projets de vie.

    De façon traditionnelle, les AVC étaient pris en charge dans les services de médecine interne (neurologie) des hôpitaux. Mais, notamment depuis l’avènement des traitements thrombolytiques, il est devenu nécessaire de pouvoir agir extrêmement rapidement, 24h/24, et avec un haut degré de technicité. C’est pour répondre à cette nécessité que sont apparues les “unités neurovasculaires” (Stroke Units, du mot anglais «stroke» qui désigne l’AVC) qui permettent notamment de mettre en œuvre immédiatement les techniques de diagnostic et les traitements de thrombolyse, ainsi que d’autres améliorations spécifiques des soins, de façon à diminuer la mortalité et à améliorer les chances de récupération. Une Stroke Unit est une unité d’hospitalisation s’occupant exclusivement de patients atteints d’AVC. Le personnel est formé à l’approche multidisciplinaire du traitement médical et des soins paramédicaux. Les objectifs de cette équipe multidisciplinaire sont les soins médicaux, infirmiers, de kinésithérapie, logopédie, ergothérapie et la prise en charge des problèmes socioprofessionnels. Il existe différents types d’unités de traitement des AVC. Les plus efficaces en termes de mortalité et handicap sont celles qui combinent la prise en charge de la phase aiguë de l’AVC avec la rééducation pendant plusieurs semaines ou mois. La prise en charge au sein d’une Stroke Unit permet de réduire d’environ 20 % la mortalité, mais aussi d’améliorer le devenir du patient sur un plan fonctionnel.

    Après la prise en charge aiguë en soins intensifs, le patient est généralement orienté vers un centre de revalidation. De nombreux centres de notre région sont susceptibles de prendre en charge les patients atteints du LIS, certains ayant même acquis une expertise dans le domaine (ex : le Centre de revalidation d’Esneux du CHU de Liège qui prend en charge une patientèle jeune, dont certains patients atteints du LIS).

    La revalidation dure en moyenne de 1 à 2 ans. Les patients font l’objet d’une prise en charge pluridisciplinaire (médecins, infirmiers, psychologues, ergothérapeutes, kinésithérapeutes, éducateurs, logopèdes, assistants sociaux,…). L’objectif de l’équipe soignante est d’une part de stabiliser l’état du patient, d’aller ensuite le plus loin possible dans la récupération de certaines fonctions (déglutition, mobilité,…) et d’instaurer une certaine forme de communication, via le soutien d’aides techniques pouvant être financées par l’AViQ. L’entourage familial et social du patient joue un rôle fondamental dans la reconstruction de cette nouvelle vie. La famille est soutenue, informée et « coachée » par l’équipe pluridisciplinaire, notamment dans le cadre d’un retour au domicile.

    Au terme de cette revalidation, le patient peut être orienté en maison de repos et de soins, en institution d’accueil de jour ou résidentielle pour personnes handicapées atteintes de troubles moteurs ou polyhandicapées (agréée ou bénéficiant d’une autorisation de prise en charge par l’AViQ), ou encore retourner à domicile.

    L’offre en institution ne correspond pas toujours aux souhaits des familles et des patients. Il faut laisser le libre choix et une prise en charge non institutionnalisée efficace, permettant au patient de rester le plus longtemps possible dans son milieu de vie, avec des services se déplaçant au domicile du patient, doit être possible sur notre territoire. C’est, notamment, un des objectifs de l’assurance autonomie que je suis en train de mettre en place en Wallonie.

    Ainsi, selon leur degré d’autonomie, les patients atteints du LIS se verront octroyer l’aide de services agréés déterminés en collaboration avec les centres de coordination des soins et de l’aide à domicile (CASD). Les centres de coordination disposent en effet en interne ou par voie de conventions de toute une série de services à proposer au bénéficiaire pour favoriser son maintien à domicile (ex : soins infirmiers, aides à domicile, ergothérapeute, repas, coiffeuse, transports…). La planification des intervenants se fait en fonction des souhaits du bénéficiaire, de ses besoins, des ressources disponibles et en concertation avec le médecin traitant.

    Le domicile des patients pourra être également aménagé de manière adéquate. Je rappelle à cet égard l’action de la plate-forme « Bien vivre chez soi » dont l’action se décline en 4 axes :

    - information sur les services et aides existantes pour pouvoir garder une autonomie maximale à son domicile ;
    - conseil et suivi en matière d’aménagement de domicile et d’aides techniques ;
    - programmes d’aides techniques et d’aménagement du domicile à mettre en place pour les plus de 65 ans ;
    - programmes de formation et d’échanges de bonnes pratiques à destination des professionnels du secteur.

    Concrètement, l’ensemble du territoire de la Wallonie est desservi par des services offrant gratuitement à chaque personne qui les sollicite, le diagnostic du logement par un ergothérapeute dans le but de l’adapter au mieux aux besoins de la personne. Des possibilités de financement de ces adaptations existent également via l’AViQ.