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Les villes manufacturières

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2017
  • N° : 23 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 05/10/2017
    • de FOURNY Dimitri
    • à DE BUE Valérie, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives

    L’article L1123-24 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation prévoit que : « Dans les villes manufacturières, le collège communal veille à ce qu’il soit établi une caisse d’épargne. Chaque année, dans la séance prescrite à l’article L1122-23, il rend compte de la situation de cette caisse. ».

    Combien de villes manufacturières compte la Wallonie ?

    Quelles sont ces communes ?
  • Réponse du 24/10/2017
    • de DE BUE Valérie

    Il n’est plus possible à l’heure actuelle d’établir une liste des villes manufacturières au sens de l’article L1123-24 cité par l’Honorable Membre, qui évoluait dans un contexte historique bien révolu. En transposant, on pourrait penser à toutes les grandes – voire moyennes – villes wallonnes actuelles.

    Cette disposition trouvait tout son sens au début de la première moitié du dix-neuvième siècle avec le transfert des forces de travail de l’activité agricole, secteur économique primaire, vers le secteur secondaire des nouvelles formes d’industrie. La classe de salariés de l’industrie manufacturière se concentrait dans les villes et y engendrait un certain paupérisme.

    Ce travail industriel produisait un grand potentiel d’épargne disponible. Afin de sortir la classe ouvrière de son état d’indigence et de la sensibiliser à « l’épargne prévoyance », le législateur de l’époque a inscrit dans la loi communale du 30 mars 1836, à l’article 92 (repris ensuite à l’article 124 de la nouvelle loi communale, puis à l’article L1123-24 précédemment cité), l’obligation, dans les villes manufacturières, d’établir une caisse d’épargne. La sanction de cette disposition était dans l’article 88 de l’ancienne loi communale qui permettait à la députation permanente d’envoyer, après l’inutilité de deux avertissements successifs, un commissaire sur les lieux qui ferait exécuter la loi.

    L’article L1123-24 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation est certes devenu obsolète, mais cette disposition garde une réelle valeur historique et nostalgique liée au passé de la Wallonie.

    L’on peut lire dans un ouvrage de 1844 commentant l’ancienne loi communale que le législateur de l’époque « n’a cependant pas voulu imposer aux communes l’obligation d’établir à leurs frais une caisse d’épargne. Ainsi il suffisait qu’il soit établi dans la commune une caisse d’épargne, soit par la Société générale, la banque de Belgique, ou toute autre société ». À notre époque, il est aisé de percevoir que cette « obligation » est rencontrée quasi partout.

    Le législateur de l’époque « a senti combien était utile et morale l’institution des caisses d’épargne et il a fait une obligation aux bourgmestres et échevins des villes manufacturières de tenir la main à ce qu’une semblable caisse y fût établie. Le bien-être moral et matériel qui résulte de cette belle institution pour la classe ouvrière fait désirer de voir en étendre le bienfait à d’autres villes et communes où travaillent de nombreux ouvriers. La première condition pour faire prospérer ces établissements, c’est de présenter une garantie telle que l’ouvrier ne puisse jamais craindre de perdre les épargnes qu’il y placera. » 

    À titre anecdotique, dans le but d’encourager la création et le développement des caisses d’épargne, le conseil provincial de Hainaut avait statué, par résolution du 5 juillet 1839, qu’aussi longtemps que le besoin en sera reconnu, un crédit spécial serait porté annuellement au budget de la province. Une partie de ce crédit est employée en subsides aux administrations des villes et communes rurales manufacturières, dont les ressources ordinaires sont reconnues insuffisantes, pour les aider à supporter les frais d’établissement et d’organisation des caisses à créer. L’autre partie est distribuée en récompenses et en primes aux ouvriers qui seront le mieux entrés dans l’esprit de l’institution.

    La dernière caisse d’épargne communale, qui était celle de la Ville de Tournai créée en 1825, a cédé ses activités à la banque du Crédit professionnel du Hainaut (CPH) en 2012, eu égard notamment aux exigences fédérales en matière de contrôle et de fonctionnement des institutions bancaires et à l’obligation imposée par la Commission bancaire et financière de prendre une forme juridique permettant d’assurer la séparation du patrimoine de la caisse d’épargne et de la gestion de la commune dont elle dépend.