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L'installation d'éoliennes dans le périmètre de la limite territoriale des communes

  • Session : 2019-2020
  • Année : 2020
  • N° : 205 (2019-2020) 1

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  • Question écrite du 19/02/2020
    • de FREDERIC André
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    L'heure est à la production d'énergie verte. Il y a ainsi de plus en plus d'éoliennes.

    Il est important, dans le cadre d'une stratégie globale de production d'énergie verte, de continuer l'installation d'éoliennes.

    Cependant, les communes sont confrontées à la multiplication d'offres de promoteurs d'éoliennes sur leur territoire. Elles doivent arbitrer ces projets en tenant compte d'éléments impactant l'environnement et le cadre de vie des citoyens : le bruit, les dégâts sur la faune et la flore, l'ombrage, et cetera.

    Dans certains cas, les communes sont contraintes de refuser le projet tout en privilégiant d'autres installations de ce type.

    Néanmoins, si la Région est propice à l'installation d'éoliennes, le promoteur risque de trouver preneur dans une commune avoisinante.

    Une commune ayant, dès lors, refusé l'installation d'éoliennes sur son territoire peut donc voir la commune d'à côté accepter et installer une ou plusieurs éoliennes juste à sa frontière.
    La commune ayant refusé subit donc une double peine, à savoir une pollution visuelle et sonore, sans les revenus liés à la location des parcelles ou des compensations accordées par le promoteur.

    Quels sont les moyens à disposition d'une commune de se protéger contre l'installation d'éoliennes à ses frontières quand des projets similaires ont été refusés sur son territoire ?

    Ne faudrait-il pas imposer une concertation approfondie entre les communes pour ce type de projet ?

    Serait-il envisageable de prévoir une gestion partagée quand un projet se situe à la lisière de plusieurs communes ?

    Dans la perspective d'une réflexion plus globale, Monsieur le Ministre a-t-il prévu un cadre réglementaire qui baliserait de manière précise l'installation de parcs éoliens pluricommunaux ?
  • Réponse du 11/03/2020
    • de BORSUS Willy
    Il convient tout d’abord de rappeler que, dans la grande majorité des cas, les projets éoliens sont soumis à la procédure permis unique et relèvent de la compétence des fonctionnaires technique et délégué et non du collège communal, qui dispose cependant d’une compétence d’avis (article 81, §2, alinéa 3 du décret relatif au permis d’environnement et D.IV.22, 7°, k) et D.IV.22, al.2 du CoDT).

    C’est donc le plus souvent les fonctionnaires technique et délégué qui vont évaluer l’impact d’un projet au regard des incidences qu’il génère (en matière d’aménagement du territoire, de biodiversité, de potentiel venteux du site …), au regard des remarques émises lors des séances d’information, ou encore au regard des observations et réclamations émises lors de l’enquête publique.

    Afin que l’autorité compétente traite le dossier en toute connaissance de cause, nous relevons trois étapes clés de la procédure de permis unique au cours desquelles les communes impactées peuvent faire officiellement connaître leur avis sur le projet.

    Notons qu’au-delà des mécanismes détaillés ci-dessous, toute commune qui considère être impactée par un projet éolien peut faire connaître ses remarques et observations à l’occasion de la procédure de délivrance du permis.

    1) La réunion d’information préalable :
    Le législateur a fixé les conditions applicables à l’organisation d’une réunion d’information préalable à l’article D.29-5 du Code de l’environnement (article D.29-5 du Code de l’environnement).

    En l’espèce, s’agissant d’un projet soumis à étude d’incidences (catégorie B (Article D.29-1, §4, b), 1° du Code de l’environnement)), une réunion d’information préalable est réalisée, à l’initiative du demandeur, avant l’introduction de la demande.

    Au moins 15 jours avant la tenue de cette réunion d’information, le demandeur doit adresser un avis contenant au minimum les informations suivantes : identité du demandeur, nature du projet et lieu d’implantation, objet de la réunion, date, heure et lieu de la réunion préalable, personnes de contact (article D.29-5, §2 du Code de l’environnement). Cet avis est communiqué à la commune sur le territoire de laquelle le projet est réalisé, mais également à toutes les communes sur le territoire desquelles une enquête publique devra être organisée (article D.29-5, §3 du Code de l’environnement).

    Or, conformément à l’article R.41-1 du Code de l’environnement, l’autorité chargée d’apprécier le caractère complet de la demande détermine, sur la base des informations qui lui ont été transmises, les communes susceptibles d’être affectées par le projet et par conséquent sur le territoire desquelles l’organisation d’une enquête publique sera sollicitée par l’autorité compétente.

    De manière générale, le SPW-ARNE fait mention dans ses courriers que « l’expérience acquise en matière d’évaluation des incidences des parcs éoliens montre que seules les communes situées dans un rayon de 5 km autour de l’établissement (correspondant au périmètre d’étude rapproché dans les études d’incidences sur l’environnement) sont généralement susceptibles d’être affectées par celui-ci ».

    C’est donc ce rayon qui est, a priori, pris en compte pour déterminer les communes impactées par le projet et qui seront donc invitées officiellement à la réunion d’information préalable.

    À l’occasion de cette réunion, « toute personne peut, dans un délai de 15 jours, émettre ses observations, suggestions et demandes de mise en évidence de points particuliers concernant le projet ainsi que présenter les alternatives techniques pouvant raisonnablement être envisagées par le demandeur afin qu’il en soit tenu compte lors de la réalisation de l’étude d’incidences, en les adressant par écrit au collège communal du lieu où s’est tenue ladite réunion (article R.41-4 du Code de l’environnement) ».

    2) L’enquête publique :
    Lorsque la demande de permis est officiellement déposée, celle-ci est soumise aux mesures particulières de publicité, en l’espèce, l’enquête publique.

    Cette enquête est organisée dans toutes les communes considérées, par l’autorité compétente, comme étant impactées par le projet (voir le point relatif à la réunion préalable d’information ci-dessus).

    À cette occasion, les autorités communales peuvent faire état des incidences subies au regard du projet.

    Pour la parfaite information de l’honorable membre, l’article D.29-11 du Code de l’environnement fixe les règles applicables concernant la consultation des autorités compétentes d’un autre état membre de l’UE.

    À cet égard, celui-ci prévoit que la demande de permis et l’étude d’incidences soient transmises, au moment même où ces documents sont soumis à l’enquête publique en Région wallonne, aux autorités compétentes d’un autre état membre de l’UE lorsque soit, l’autorité chargée d’examiner le caractère complet du dossier de la demande constate qu’il est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement, soit lorsque l’état membre en fait la demande.

    Le Code prévoit également la transmission d’autres documents tels que les coordonnées des autorités compétentes, la nature des décisions possibles, les modalités de participation du public…(article D.29-11 du Code de l’environnement)

    Par conséquent, les communes frontalières sont également informées du contenu de la demande et de l’étude d’incidences et peuvent, le cas échéant, transmettre leurs réclamations.

    3) Le recours auprès du Gouvernement :
    Lorsque l’autorité compétente en première instance a délivré une décision, celle-ci peut faire l’objet d’un recours.

    Conformément à l’article 95 du décret relatif au permis d’environnement, le collège communal de la commune sur le territoire de laquelle le projet est situé ainsi que toute personne physique ou morale ayant un intérêt dispose d’un droit de recours en réformation auprès du Gouvernement.

    4) Le cadre pluricommunal :
    Au-delà de ces éléments qui établissent le rôle que les communes limitrophes d’un projet éolien se voient reconnaître dans les procédures de délivrances des autorisations individuelles, on doit constater que le CoDT ne prévoit pas de cadre réglementaire spécifique encadrant les projets pluricommunaux. Ainsi, s’il n’est pas exclu qu’un schéma de développement pluricommunal contienne des éléments de cadre relatif au développement éolien sur le territoire concerné, il ne peut cependant avoir cet objet exclusif puisqu’il doit concevoir une stratégie territoriale complète pour être conforme au prescrit de l’article D.II.6 du CoDT. De tels projets voient cependant régulièrement le jour, les lieux d’implantations rencontrant à la fois les impératifs en termes de potentiel venteux et les conditions du cadre de référence éolien transcendant naturellement régulièrement les frontières des communes. Un nombre significatif de demandes de permis uniques concernant le territoire de deux communes a déjà été traité par les autorités idoines dans le cadre des procédures prévues par nos législations.

    S’agissant d’une gestion partagée des projets en vue d’assurer une distribution équilibrée du bénéfice de l’implantation d’éoliennes sur un territoire pluricommunal, on peut comme nous y exhorte la « pax eolienica » et le cadre de référence éolien, encourager l’intégration de toutes les parties prenantes dans le processus de développement éolien par le biais de coopératives voire de projets communaux.