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Les obligations des pouvoirs locaux en cas de problème environnemental pouvant impacter la santé de la population

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2020
  • N° : 1 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 02/09/2020
    • de PECRIAUX Sophie
    • à DERMAGNE Pierre-Yves, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    Ce mardi 28 juillet 2020, la population de la Commune de Seneffe s'est plainte d'une forte odeur de gaz irritant. Les services de secours ont été sollicités à de nombreuses reprises ainsi que les impétrants tels ORES.

    Ce n'est que tard dans la soirée que l'origine de cette nuisance a été identifiée. Il s'agissait de l'usine Afton Chemicals sise à Écaussinnes qui a rencontré un problème technique sur un oxydateur thermique, ce qui a entraîné un dégagement de H2S avec des traces de mercaptans.

    Ce qui est troublant dans ce cas, c'est le manque d'information fournie aux citoyens, que ce soit via la commune ou via l'entreprise incriminée, ce qui, Monsieur le Ministre le comprend aisément, a causé pas mal d'inquiétude dans la population.

    Peut-on contraindre une commune à fournir une information directe à l'ensemble des membres du conseil communal qui ont été, il s'en doute, sollicités par la population puisque les services communaux restaient sans voix ?
  • Réponse du 25/09/2020
    • de DERMAGNE Pierre-Yves
    Je préciserai tout d’abord qu’une contrainte ne peut être valablement exercée que pour remédier à l’inexécution, constatée par l’autorité compétente, d’une obligation juridiquement consacrée.

    Aussi, avant de répondre concrètement à la présente question, il échet de déterminer si une commune est tenue d’informer les membres du conseil communal et, plus largement, la population quant à une menace pour la santé imputable à des activités humaines ou due à des causes naturelles.

    Plusieurs dispositions imposent effectivement une telle obligation dans le chef d’une commune, moyennant le cas échéant le respect de conditions déterminées :

    1) les articles D.10, alinéa 2, et D.20.17, alinéa 2, du Livre Ier du Code de l’environnement consacrent le droit d’accès à l’information relative à l’environnement détenue par les autorités publiques. La commune diffuse, de sa propre initiative et le plus rapidement possible aux personnes qui risquent d’être touchées, toutes les informations qui sont en sa possession et qui sont susceptibles de permettre au public de prendre des mesures pour prévenir ou limiter d’éventuels dommages. Cependant, l’article D20.18 du même livre permet à ladite commune d’invoquer les exceptions prévues aux articles D.18 et D.19pour se soustraire à cette obligation ;

    2) les articles D.12 à D.17 du livre Ier du Code de l’environnement soumettent les communes à l’obligation de transmettre toute information environnementale qu’elles détiennent à quiconque en fait la demande, à moins de se prévaloir d’une ou de plusieurs des exceptions reprises aux articles D.18 à D.19 du même livre.
    Par « information environnementale », il y a lieu d’entendre notamment, au sens de l’article D.6, 11°, du livre précité, « toute information […] concernant :
    a. l’état des éléments de l’environnement, tels que l’air et l’atmosphère, l’eau, le sol, les terres, les paysages et les sites naturels [;]
    b. des facteurs, tels que les substances, l’énergie, le bruit, les rayonnements ou les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets dans l’environnement, qui ont ou sont susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments de l’environnement visés au point a. ; […]
    f. l’état de la santé humaine, la sécurité, y compris, le cas échéant, la contamination de la chaîne alimentaire, le cadre de vie, le patrimoine, pour autant qu’ils soient ou puissent être altérés par l’état des éléments de l’environnement visés au point a., ou, par l’intermédiaire de ces éléments, par l’un des facteurs, mesures ou activités visés aux points b. » ;

    3) l’article L1122-10, § 1er, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, précise qu’aucun acte, aucune pièce concernant l’administration, ne peut être soustrait à l’examen des membres du conseil communal ;

    4) l’article L1122-10, § 3, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation reconnaît aux conseillers communaux le droit de poser des questions orales d’actualité et des questions écrites au collège communal conformément aux modalités prévues dans le règlement d’ordre intérieur du conseil communal concerné. Les questions doivent porter sur les matières qui relèvent de la compétence soit de décision du collège ou du conseil communal, soit d’avis du collège ou du conseil communal dans la mesure où cette dernière compétence a un objet qui concerne le territoire communal ;

    5) l’article L1122-14, §§ 2 à 6 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, consacre le droit pour les habitants d’une commune d’interpeller directement le collège communal en séance publique du conseil communal. À nouveau, le règlement d’ordre intérieur du conseil communal fixe les modalités d’application de ces interpellations et celles-ci doivent porter des objets relevant de la compétence soit de décision du collège ou du conseil communal, soit d’avis du collège ou du conseil communal dans la mesure où cette dernière compétence a un objet qui concerne le territoire communal. Il convient en outre de souligner que les interpellations doivent avoir une portée générale.

    En vertu des articles 2, § 1er, du décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration et D.20.6 du Livre Ier du Code de l’Environnement, la Commission de recours pour le droit d’accès à l’information en matière d’environnement (« CRAIE ») est exclusivement compétente dans le cadre du respect, par une commune, des dispositions du Livre Ier du Code de l’environnement relative au droit du public d’accéder aux informations environnementales. Pour sa part, l’autorité de tutelle est compétente pour contrôler le respect des articles L1122-10 et L1122-14 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation.

    En conclusion, la législation organise de façon claire l’accès à ce type d’information. Il revient aux autorités locales d’en assurer une stricte application.