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La valorisation et l'exportation de carbonate de calcium

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2020
  • N° : 11 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 11/09/2020
    • de LENZINI Mauro
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Nous apprenions récemment qu'à la demande de la société Burgo Ardennes, le Gouvernement wallon a décidé de requalifier le carbonate de calcium issu de la production de papier en « sous-produit », autorisant ainsi sa valorisation et son exportation.
    Cette reconnaissance est une première en Wallonie.

    Suite à cette requalification, la société Burgo Ardennes exprime qu'elle va pouvoir désormais exporter les surplus de production de carbonate vers la France où ils trouveraient un débouché dans l'épandage agricole notamment. Elle évoque environ 12 000 tonnes de carbonate de calcium excédentaire par an.

    Monsieur le Ministre peut-il nous en dire un peu plus sur ce dossier ?

    D'autres sociétés wallonnes sont-elles concernées par cette reconnaissance ?

    Quels sont les débouchés et exportations possibles pour la valorisation de ce composant et en quelles quantités ?

    Enfin, quelles sont les exigences qui devront être remplies afin de valoriser et exporter ce sous-produit en toute sécurité ?

    Qu'en est-il ainsi des exigences de traçabilité ?
  • Réponse du 05/10/2020
    • de BORSUS Willy
    L’évolution du statut de déchet constitue certainement un des enjeux de l’économie circulaire. Ainsi, l’ambition de la stratégie régionale de déploiement de l’économie circulaire - dont le Gouvernement a adopté l’avant-projet en 1re lecture au mois de juillet - est de rompre avec le schéma traditionnel de production linéaire, qui va de la fabrication d’un produit à sa destruction. Mais elle lui substitue une logique de « boucle » où la création de valeur serait réalisée en continu, à la manière des écosystèmes naturels, grâce à l’optimisation de l’usage de la matière.

    Dans cette perspective, la notion de déchet revêt une importance particulière, puisque le déchet constitue une externalité résiduelle négative du bout de la chaîne de production et de consommation linéaire. En effet, le déchet doit être soit placé en décharge, soit être incinéré. Ce traitement est d’ailleurs (très) coûteux, surtout quand il s’agit de gros volumes, et implique de facto la destruction de matières qui pourraient être des intrants dans d’autres filières.

    Autrement dit, sur le plan économique comme sur le plan juridique, le statut de déchet est un frein à la valorisation de gisements susceptibles de constituer des ressources à part entière. La sortie du statut de déchet et les sous-produits ouvrent des perspectives aux matières secondaires : accès au marché facilité, sécurité juridique et simplification administrative.

    De fait, les déchets font déjà l’objet, depuis de nombreuses années, d’opérations de valorisation, lesquelles ont vocation à leur redonner les caractéristiques d’une ressource, au même titre que les ressources primaires. Ces opérations sont essentielles à la structuration d’un modèle d’économie circulaire puisqu’elles permettent la constitution de boucles résilientes et durables, dans une démarche d’optimisation progressive des chaînes de valeur.

    Concernant Burgo Ardennes, à travers son procédé kraft de production de pâte à papier, l'usine, située sur le zoning de Latour près de Virton, produit environ 12 000 tonnes par an de carbonate de calcium (CaCO3) excédentaire. La décision d'octroi du statut de sous-produit porte sur ce carbonate de calcium excédentaire, pour lequel les modes d'utilisation autorisés sont la briqueterie et l’agriculture.

    Pour valoriser en agriculture tout ou partie de son carbonate de calcium en France, Burgo Ardennes devra satisfaire aux exigences de la norme française NF U44-001 relative à cette utilisation de carbonate de calcium issu de la production papetière. Cette norme fixe des critères de teneur en calcium, de finesse, de valeur neutralisante, de matière organique et d'éléments traces métalliques (ETM).

    En effet, l'usine papetière Burgo Ardennes produit annuellement 360 000 tonnes de pâte à papier et 400 000 tonnes de papier. La production de la pâte se fait au départ de bois de feuillus, en valorisant les produits forestiers de moindre qualité. Le bois est transformé en pâte via un procédé chimique de mise en pâte appelé procédé kraft.

    Le carbonate de calcium est un des dérivés du procédé chimique qui permet la décomposition du bois en pâte. Lorsque le processus tourne correctement, le carbonate de calcium est transformé en chaux vive dans un four pour être réinjecté dans le processus de production, qui fonctionne donc en circuit fermé. Mais si pour une raison déterminée ou indéterminée, le four à chaux doit être mis à l’arrêt, le carbonate de calcium s’accumule et ne peut plus être absorbé une fois la production relancée. Dans le cadre des arrêts du four à chaux, pour des raisons de maintenance ou en cas d’incidents techniques, le processus génère environ 12 000 tonnes de carbonate de calcium excédentaire par an. Selon les données fournies par Burgo à la Région wallonne dans sa demande de reconnaissance, 8 600 tonnes proviennent du processus de maintenance et 3 600 tonnes proviennent des arrêts inopinés.

    Jusqu’ici, en Wallonie, ce résidu ne pouvait pas être valorisé. Il devait être envoyé vers un site de production en Flandres où il était utilisé notamment dans la production de briques et de tuiles. Cette reconnaissance du carbonate de calcium excédentaire comme sous-produit permettra notamment à Burgo d’exporter ses surplus de production vers la France, où ils trouveront des débouchés dans l’épandage agricole notamment. L’idée n’est pas d’en faire un business en soi, mais plutôt de simplifier la chaîne logistique et l’élimination de ces résidus.

    Cette première reconnaissance du statut de « sous-produit » en Wallonie permettra certainement d’apprécier, à travers des retours d’expériences pratiques, le rôle de la procédure de sortie du statut de déchet ainsi que les enjeux et opportunités qu’elle représente. Nous pourrons ainsi dégager des pistes de clarification et d’amélioration du statut de déchet, sous forme de propositions, de nature à faciliter la formation des cycles de valorisation.

    Cette dynamique est dans la droite ligne du Plan d’action européen pour l’économie circulaire à travers lequel la Commission européenne prévoit notamment d’évaluer, en 2021, le développement de nouveaux critères de fin de statut de déchets. Sont actuellement visés par des critères européens de fin de vie des déchets : la ferraille, le cuivre et le verre, ainsi que les déchets biodégradables. Des flux complémentaires seront déterminés compte tenu des enjeux de circularité, des transferts intracommunautaires et des taux de valorisation actuels. La Wallonie suivra ces travaux de près afin d’accélérer la transition vers une économie circulaire.