Les modalités du mécanisme congé-éducation payé en Wallonie
Session : 2024-2025
Année : 2024
N° : 38 (2024-2025) 1
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Question écrite du 19/11/2024
de SOUPART Guillaume
à JEHOLET Pierre-Yves, Ministre de l'Economie, de l'Industrie, du Numérique, de l'Emploi et de la Formation
Le congé-éducation payé (CEP) permet aux travailleurs du secteur privé de suivre une formation tout en percevant une indemnité. Ce dispositif, ouvert pour des formations d'au moins 32 heures, nécessite la remise régulière d'attestations d'assiduité qui doivent être signées par l'enseignant et remises à l'employeur. En Wallonie, le SPW est chargé d'agréer les formations congé-éducation payé et de délivrer les attestations, tandis que le FOREm prend en charge le remboursement.
Durant la pandémie de Covid-19, les cours ont été dispensés selon un système « co-modal », alternant présentiel et visioconférence. Les présences aux cours étaient alors relevées sur Teams, permettant aux étudiants travailleurs de participer à distance et de recevoir leur attestation d'assiduité.
En Région bruxelloise, un arrêté du Gouvernement du 29 juin 2023 autorise toujours la délivrance des attestations d'assiduité pour les cours suivis à distance, sous certaines conditions. En revanche, en Wallonie, le FOREm précise depuis novembre 2021 que le CEP est basé sur la présence aux cours de telle sorte que l'enseignement à distance est exclu de ce mécanisme.
Quel est l'état actuel en Wallonie concernant la reconnaissance des cours suivis à distance dans le cadre du CEP ?
Cette modalité est-elle désormais totalement exclue ?
Étant donné l'importance d'un équilibre entre vie professionnelle et formation pour ces travailleurs-étudiants, quelles mesures est-il possible de mettre en œuvre pour leur permettre de continuer leur formation sans être limités par des contraintes de présence physique ?
Réponse du 11/12/2024
de JEHOLET Pierre-Yves
La législation relative au congé éducation payé et les dispositions encadrant l’octroi des heures de congé éducation payé reposent sur la notion de présence effective aux cours.
Pendant la crise sanitaire, les mesures ont imposé la fermeture des classes, obligeant les opérateurs de formation à recourir à des outils permettant d’assurer leurs cours à distance (visioconférences, modules d’e-learning, alternance entre présentiel et distanciel, et cetera).
Dans ce contexte, pour garantir les droits des travailleurs au congé éducation payé, il a été admis - par arrêté du Gouvernement wallon (AGW) de pouvoirs spéciaux - d’assimiler les heures de cours à distance aux heures normalement dispensées en présentiel. Cette disposition exceptionnelle s’appliquait aux formations reconnues dans le cadre du congé éducation payé.
Cependant, avec la fin de la crise sanitaire, les AGW de pouvoirs spéciaux ont cessé de produire leurs effets. Dès lors, il n’est plus possible d’assimiler les heures suivies à distance à des heures de présence effective, condition nécessaire pour ouvrir le droit au congé éducation payé. Malgré cela, les outils de formation à distance et les modes hybrides continuent d’être utilisés par les opérateurs et les travailleurs. Pourtant, la réglementation actuelle ne fait aucune mention des formations à distance et n’offre donc aucune base légale pour leur reconnaissance.
En mars 2024, le CESE Wallonie avait abordé cette question avec Madame la Ministre compétente en la matière. Plus récemment, le CESE a réitéré son interpellation auprès de mon Cabinet. Ces discussions s’inscrivaient dans le cadre des travaux du précédent Gouvernement sur la réforme des incitants financiers à la formation des travailleurs.
Le CESE a exprimé son soutien à la reconnaissance des formations à distance et des méthodes pédagogiques alternatives, tout en soulignant les implications budgétaires potentielles liées à leur utilisation accrue. Le CESE a également demandé l’établissement de critères d’agrément spécifiques pour ces formations et précisait que “[…] la vérification du suivi effectif des cours ne constitue qu’un des aspects de la problématique, d’autres aspects n’ayant pas été traités à ce jour, tels que les critères de qualité pour les formations à distance, l’impact budgétaire potentiel [...]”
Cette situation soulève aujourd’hui une question centrale : le congé éducation payé est-il encore en phase avec les évolutions des méthodes et des outils de formation et en adéquation ou non avec les besoins de formation et de conciliation entre vie privée et vie professionnelle des travailleurs ?
Notre volonté est de disposer d’un système d’incitants à la formation capable de répondre aux besoins de formation et de développement des compétences des travailleurs, tout en tenant compte des évolutions du marché du travail et de la formation. Toutefois, l’assimilation de l’enseignement à distance à la notion de présence effective aux cours pourrait engendrer des impacts budgétaires significatifs sur les budgets disponibles pour le congé éducation payé. Dès lors, il nous paraît nécessaire d’évaluer les impacts de ce type de disposition, de déterminer des critères d’application et de contrôle et d’envisager d’éventuelles limites afin de garantir une gestion optimale des budgets disponibles.
Ces réflexions seront intégrées aux travaux liés à la réforme des incitants à la formation. Nous pourrons également nous inspirer des dispositions mises en place dans d’autres dispositifs en Région wallonne (chèque-formation) et à Bruxelles.
Ceci est en effet prévu dans la Déclaration de politique régionale, qui prévoit que : “Dans une perspective de formation tout au long de la vie, de transitions professionnelles des travailleurs et d’évolutions technologiques indispensables au dynamisme économique, les dispositifs d’aide à la formation seront réformés afin d’en assurer l’efficacité et l’adéquation avec les besoins prioritaires en matière de compétences.”