La nouvelle étude concernant les risques que représentent les TFA pour l’homme et l’environnement
Session : 2024-2025
Année : 2024
N° : 92 (2024-2025) 1
2 élément(s) trouvé(s).
Question écrite du 06/12/2024
de LAMBELIN Anne
à COPPIETERS Yves, Ministre de la Santé, de l'Environnement, des Solidarités et de l'Economie sociale
Selon une étude scientifique récente, le acide trifluoroacétique (TFA) présente un risque pour l'homme et l'environnement.
Ce PFAS à chaîne ultracourte s'élimine plus rapidement du corps humain. Sa toxicité est encore peu documentée bien que plusieurs études indiquent ses effets nocifs. Leurs résultats ont conduit l'Allemagne à déposer un dossier auprès de l'Agence européenne des produits chimiques pour classer le TFA comme substance présumée toxique pour la reproduction humaine.
Jusqu'à présent les études étaient financées principalement par l'industrie chimique. Dans sa note compilant les informations sur la toxicité des TFA, le CSI a repris des données qui « proviennent principalement » de scientifiques dont la crédibilité a plusieurs fois été remise en question par leurs pairs. En novembre, la présidente du CSI a reconnu la réputation polémique des auteurs repris dans la note.
Concernant la politique sanitaire et phytosanitaire, la Déclaration de politique régionale (DPR) prévoit que « le Gouvernement fonde son action sur la méthode science-based en inscrivant son action dans le concept One Health et en intégrant le principe de précaution en cas de risque avéré pour la santé et l'environnement ».
Le principe de précaution, à savoir l'absence de certitude scientifique du risque, et la méthode « Science-based » ne sont-ils pas antagonistes ?
Monsieur le Ministre pourrait-il éclaircir les intentions de la DPR : pour les TFA son action est-elle « basée sur la science » ou sur le principe de précaution ?
Cette nouvelle étude scientifique concernant la toxicité des TFA sera-t-elle intégrée dans la note du CSI ?
Compte-t-il, au nom du principe de précaution, prendre des mesures concernant la pollution des eaux au TFA ?
Compte-t-il interdire l'usage de pesticides contenant des TFA ?
Va-t-il demander au Fédéral de revoir les autorisations de pesticides émetteurs de TFA ?
Réponse du 30/12/2024
de COPPIETERS Yves
Concernant le principe de précaution et la méthode « Science-based », ils ne sont pas antagonistes, mais plutôt complémentaires. En effet, la méthode « Science-based » est basée sur les connaissances scientifiques comme son nom l’indique, mais lorsque celles-ci sont insuffisantes il est courant d’employer des facteurs d’incertitude afin de définir une valeur qui est utilisée selon le principe de précaution.
Toute décision autour du TFA s’appuiera donc sur ces deux démarches.
Comme l’honorable membre le sait, fin août 2024, le Conseil scientifique indépendant PFAS (CSI) a rédigé une note à l’attention du Gouvernement wallon concernant la toxicité de l’acide trifluoroacétique (TFA) ainsi qu’une réflexion sur une norme de concentration dans l’environnement (et plus spécifiquement dans l’eau).
Selon l’état des connaissances à ce moment, il est apparu que les effets du TFA sur le foie constituaient l’effet le plus critique de ce produit. Néanmoins cette toxicité apparaissait à des concentrations relativement élevées et impliquerait un mécanisme non pertinent chez l’Homme. Le CSI a donc considéré qu’une toxicité du TFA sur l’Homme aux concentrations environnementales était peu probable. De plus, au vu du nombre limité de données toxicologiques disponibles dans la littérature, le CSI a estimé que déduire une dose journalière acceptable (TDI = Tolerable Daily Intake) pour le TFA est très hasardeux. Le CSI a proposé donc une approche différente : utiliser la valeur guide pour le TFA du RIVM, l’institut néerlandais de l’environnement, fixée à 2 200 ng/l, pour le suivi de ce dossier du TFA en attente de données toxicologiques qui permettront dans un futur proche d’affiner une valeur guide pour le TFA.
Fin octobre 2024, une étude de Hans Peter H. Arp et al. a été publiée dans la revue Environnemental Science & Technology à propos de l’accumulation croissante et irréversible du TFA au niveau mondial. Dans cet article, il est fait mention notamment des différentes sources d’émission du TFA.
Concernant la toxicité du TFA sur l’Homme, à l’heure actuelle elle n’est pas reconnue. Malgré le fait que l’Allemagne ait déposé un dossier auprès de l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) pour classer le TFA comme substance présumée toxique pour la reproduction humaine.
Des études complémentaires concernant la toxicité du TFA au niveau de l’environnement sont également nécessaires afin de déterminer l’impact de cette substance sur les écosystèmes.
L’étude en cours à l’ECHA, dont le financement est indépendant de l’industrie chimique, pourrait motiver une évolution de l’avis du CSI si celui-ci le juge pertinent.
Enfin, concernant le suivi du TFA dans les zones les plus impactées, sur ma proposition, le 17 octobre dernier, le Gouvernement wallon a arrêté une valeur guide de 2,2 µg/l dans l’eau de distribution. De plus, ce 19 décembre 2024, le Gouvernement a adopté une circulaire qui fixe le plan d’action pour la surveillance du TFA dans les eaux brutes et dans l’eau de distribution.
De surcroît, comme annoncé en octobre dernier, les analyses TFA se poursuivent, de sorte qu’en février 2025 nous pourrons refaire le point utilement.
En particulier, les actions en cours consistent à confirmer et à comprendre les teneurs les plus élevées en TFA dans les eaux de distribution en Wallonie, par un nouveau contrôle des eaux de chaque zone de distribution dont la teneur en TFA est supérieure à 1,5 μg/l. Cela représente 36 zones de distribution.
Ces mesures en cours visent également à identifier la ou les origine(s) responsable(s) de la présence du TFA dans l’eau de distribution. À cette fin, toutes les eaux brutes exploitées pour alimenter en eau potable les 36 zones de distribution dont la teneur est supérieure à 1,5 μg/l seront contrôlées. Cela représente 100 contrôles.
Comme recommandé par le Comité scientifique indépendant, ces données permettront aux distributeurs d’identifier la ou les eaux brutes qui alimentent dans l’eau de distribution une teneur en TFA supérieure à 2,2 μg/l. Ces informations factuelles sont indispensables aux distributeurs pour prendre les mesures opérationnelles adéquates.
Plus globalement, la situation sera régulièrement réévaluée en fonction de l’issue des travaux en cours au sein de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur lesquels la Commission européenne s’appuiera pour réévaluer l’opportunité de revoir la directive 2020/2184.
Concernant le TFA dans les pesticides, et l’usage des pesticides de manière générale, c’est à travers le programme wallon de réduction des pesticides que je compte travailler.