La présence possible de PFAS dans les pales d’éoliennes
Session : 2024-2025
Année : 2025
N° : 263 (2024-2025) 1
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Question écrite du 01/04/2025
de LEFEBVRE Bruno
à COPPIETERS Yves, Ministre de la Santé, de l'Environnement, des Solidarités et de l'Economie sociale
Plusieurs citoyens ont attiré mon attention concernant la publication d'une étude de l'institut allemand Fraunhofer. Selon cette étude, via leurs pales, « environ 45 kg de PFAS par éolienne sont libérés chaque année dans la nature, l'environnement et le sol ».
Des rumeurs non fondées concernant les compositions des éoliennes ont émergé à diverses reprises ces dernières années. Il est de l'ordre du possible que l'étude mentionnée ci-dessus le soit également. Néanmoins, lorsqu'il s'agit de l'impact sur l'environnement et la santé des citoyens, il convient de rapidement lever les doutes pour informer correctement les citoyens.
On sait d'ores et déjà que les pales représentent un vrai défi en termes de recyclage et de valorisation en raison de leur composition complexe. Néanmoins, un projet serait en cours, Recypale, en vue de construire une usine dédiée au recyclage des pales d'éoliennes.
M. le Ministre a-t-il pu prendre connaissance de l'étude susmentionnée ?
Est-il informé quant à la présence possible de PFAS au sein des pales d'éoliennes ? Si cette affirmation s'avère vraie, comment compte-t-il en tenir compte en vue de protéger l'environnement et les citoyens ? Cette affirmation a-t-elle été étudiée dans le cadre du projet Recypale ?
Réponse du 24/04/2025
de COPPIETERS Yves
L’actualité de ces dernières années a mis en lumière de manière évidente l’utilisation ubiquiste des PFAS et les risques environnementaux ou de santé qui pourraient résulter de ces utilisations.
En ce qui concerne le secteur des éoliennes, la présence de PFAS n’est pas systématique et lorsqu’on les emploie, ils n’interviennent pas dans la composition des éoliennes elles-mêmes, mais se retrouvent uniquement sous la forme de fluoropolymères, dans les peintures et revêtements appliqués sur les tours et les pales des installations.
Nos équipes n’ont pas pu retrouver l’étude du Fraunhofer Institut que les citoyens mentionnent. Toutefois, les quantités annoncées ici semblent particulièrement élevées. En effet, une étude de l’agence norvégienne de l’environnement de 2022 estime qu’une éolienne libère entre 0.1 et 1 kg de PFAS sur l’ensemble de sa vie, soit 30 ans, et que l’essentiel de cette libération se fait lors de son démantèlement. De même, l’Agence allemande de l’environnement considère que cette perte, liée à l’érosion des pales, est de l’ordre de 50 à 200 g de PFAS par éolienne et par an, tandis que le démantèlement libère entre 2 et 5 kg. Enfin, selon les spécialistes de l’entretien de ces installations, on peut estimer que sur une période de cinq ans, une éolienne perd un maximum de trois kilos de peinture et matériaux, tous types confondus. Nous sommes dès lors très loin des 45 kg de PFAS redoutés par les contacts de l’honorable membre.
Concernant le recyclage des éoliennes, comme l’honorable membre le rappelle, les pales représentent un défi majeur. Elles sont en effet composées d’éléments en balsa et de quelques pièces en acier, mais l’essentiel de la structure est constitué de longues fibres de verre (2 à 3 m) noyées dans une résine thermodurcissable extrêmement dure. Cela permet d’obtenir des pales à la fois légères, rigides et résistantes. On peut parfois trouver des fibres de carbone, mais c’est plus rare, vu le coût de ces matériaux.
Cette composition de matériaux complexes et composites explique l’intérêt de trouver des solutions adaptées pour la valorisation matière, alternativement à la valorisation énergétique, notamment en cimenterie.
En termes de développement de solutions, l’appel à projets déchets-ressources du plan de relance a soutenu un projet visant à faciliter la collecte des pales par leur réduction de volume sur site. Dans le cadre des programmes Interreg, le Centre Terre et Pierre, en collaboration avec d’autres partenaires (français et flamand), a eu l’opportunité d’obtenir un financement pour un projet s’intitulant Recy-Composite.
Après près de quatre années de développement, un nouveau procédé permettant de gérer le recyclage de ces composés composites a été mis au point.
Ce procédé novateur permet de récupérer 70 % à 80 % des fibres de verre et de la matrice en composant thermodurcissable qui les entoure pour leur donner une seconde vie. Il a ensuite pu être industrialisé et transféré vers le projet Recypale géré par le groupe Dufour en collaboration avec l’entreprise Wanty.
Aujourd’hui, le groupe Dufour se déclare prêt à concrétiser le projet Recypale en construisant une usine de recyclage spécifique des pales d’éoliennes.
Toutefois, pour que le projet soit viable économiquement, le gisement doit être suffisant : l’entreprise Dufour estime ses besoins à 7 à 10 000 tonnes de matière par an, soit l’équivalent de près de 300 éoliennes. Cela représente environ la moitié du nombre total d’éoliennes installées en Wallonie. Dès lors, pour la rentabilité de l’outil, il est nécessaire d’attirer des gisements situés à l’étranger, ce qui représente de nouveaux défis.
À l’heure actuelle, le groupe Dufour estime à 50 % les chances de faire aboutir le projet Recypale. Notons néanmoins qu’en parallèle, les constructeurs d’éoliennes travaillent aussi à la construction de pales davantage recyclables. À ce stade, les procédés développés ont bien pris en compte les émissions de poussières et donc, indirectement, les émissions de PFAS contenus dans les particules de polymère, mais il est clair que si ce projet aboutit et mène à une demande de permis, l’administration sera particulièrement attentive à éviter toute libération de ces substances dans l’environnement.