à DALCQ Anne-Catherine, Ministre de l'Agriculture et de la Ruralité
Le concept d'hydrologie régénérative est appliqué dans de nombreuses régions du monde dans des systèmes agricoles et sociaux très variés, comme par exemple dans la vallée de la Drôme en France. Une association vient de se créer en Belgique pour promouvoir la réflexion et partager des idées de solutions adaptées à notre climat, nos sols et nos régimes de précipitations.
Mme la Ministre connait-elle ce concept ?
A-t-elle pu l'analyser et évaluer s'il peut apporter des réponses pertinentes et permettre à l'agriculture wallonne d'être plus résiliente ?
Existe-t-il des exploitations qui ont mis en place des pratiques d'hydrologie régénérative ?
Avec quel bilan ?
Ces pratiques sont-elles généralisables à l'ensemble des exploitations et à quelles conditions ?
Réponse du 25/06/2025
de DALCQ Anne-Catherine
Le concept d’hydrologie régénérative vise à restaurer le cycle de l’eau dans les paysages agricoles en favorisant l’infiltration, la rétention et la redistribution lente de l’eau. Il repose sur des pratiques agricoles et des aménagements paysagers destinés à limiter le ruissellement, recharger les nappes phréatiques et renforcer la résilience des sols face aux sécheresses et inondations. En Wallonie, ce concept gagne en reconnaissance, notamment à travers des projets tels que la modélisation hydrologique du bassin de la Vesdre après les inondations de 2021. Mon administration y a activement contribué, notamment via un voyage d’études en 2023 dans la Drôme et la diffusion d’un rapport de mission.
Un cycle de conférences et rencontres de terrain sur le concept d’hydrologie régénérative a été réalisé en Wallonie en avril 2024 par l’ASBL éponyme, avec les spécialistes français en la matière et en collaboration avec l’Unité d’hydrologie et de physiologie des sols de l’ULG/Gembloux AgroBioTech.
La Wallonie participe également au projet européen LIFE AFAKTIVE (2023–2028), par le biais de l’AWAF et de la Cellule Intégration agriculture environnement du Département Eau et Environnement. Ce projet s’inspire aussi de la notion d’hydrologie régénérative. Il promeut l’agroforesterie comme solution fondée sur la nature pour renforcer le cycle de l’eau : - en combinant arbres et cultures pour augmenter la rétention d’eau, limiter l’érosion et atténuer les effets des événements climatiques extrêmes ; - en développant des outils de planification intégrant l’agroforesterie dans la gestion des bassins versants ; - en soutenant des fermes pilotes en Belgique, aux Pays-Bas et en Allemagne.
Des exploitations wallonnes participent à ces projets pilotes, notamment dans le cadre de LIFE AFAKTIVE ou encore dans le cadre de la convention « Modrec 2 hydrologie » avec l’ULG/Gembloux AgroBioTech. Ces projets-pilotes visant notamment à étudier les possibilités d’aménagements sur des parcelles agricoles et forestières en vue de proposer des territoires d’innovation hydrologique.
Des pionniers expérimentent la nouvelle technique de syntropie ou agroforesterie successionnelle au sein du Centre Technique Horticole de Gembloux, du CRA-W et des parcelles d’Agrécolibre en vue de concilier production agricole et régénération du paysage et des sols.
Il y a également des pionniers en viticulture, dont le domaine viticole de Moirpus.
Ces exploitations pionnières expérimentent des pratiques telles que : - la création de noues sur les versants (ou keyline design) pour ralentir l’eau lors des pluies intenses et la conserver en prévision des épisodes de sécheresse ; - la plantation de haies et bandes boisées au sein du parcellaire agricole afin de ralentir les eaux de ruissellement et renforcer l’infiltration ; - la création de mares-tampons et autres ouvrages d’hydraulique douce. Certains de ces ouvrages réalisés sur terres agricoles sont d’ailleurs éligibles depuis la PAC 2023 à la mesure « Investissements non productifs en faveur de l’environnement et du climat ».
Les premiers bilans sont prometteurs, avec une amélioration de la résilience hydrique des sols et une réduction des pertes agricoles lors d’événements extrêmes.
La généralisation de ces pratiques dépend : - du soutien technique et financier aux agriculteurs (AWAF, Natagriwal, …) ; - de l’intégration dans les politiques agricoles (PAC, aides régionales) ; - de la formation et sensibilisation des acteurs du monde rural.
La future PAC, sur laquelle mon administration commencera à travailler prochainement, sera l’occasion de mener une réflexion à ce propos.