à DAERDEN Michel, Ministre du Budget, du Logement, de l'Equipement et des Travaux publics
Les problèmes d'entretien des parties ardennaises des autoroutes E 411 et E 25 sont à ce point récurrents et connus que je ne dois pas les détailler ici. Les funestes économies réalisées lors de la construction ont, à cause de ce fameux phénomène de " punch out ", coûté, in fine, plusieurs dizaines de millions à la Région.
La réfection en profondeur de ces tronçons, sur une longueur d'environ 140 km, a déjà été envisagée par votre prédécesseur, selon une formule globale à financer sur une dizaine d'années. Monsieur le Ministre a poursuivi dans cette logique d'une réfection-entretien forfaitaire qui devrait approcher les dix milliards.
Monsieur le Ministre peut-il me dire :
- où en est l'adjudication de ce chantier ;
- s'il dispose enfin d'une estimation précise du coût final de ces travaux ;
- si la formule prévoyant le paiement par tranche annuelle des travaux, incluant une forme de garantie de ceux-ci, a été retenue et si oui selon quelles modalités ;
- si d'autres tronçons autoroutiers wallons doivent subir le même traitement pour stopper le punch out, je pense notamment à l'A 27 ?
Réponse du 23/11/2001
de DAERDEN Michel
Avant de répondre précisément aux diverses interrogations de l'honorable Membre, qu'il me permette un bref rappel historique.
Le phénomène de “punch out”, propre au béton armé continu, est apparu à la fin des années 1980, presque simultanément sur plusieurs tronçons d'autoroutes en Belgique.
Il s'agit de cassures situées généralement près du bord extérieur du revêtement entraînant une fragmentation du béton et l'arrachement de blocs sous l'action dynamique du trafic. Cette situation, grave, annonce la dégradation complète du béton et requiert donc une intervention d'urgence. La cause fondamentale de ces dégradations est à imputer aux économies réalisées dans les travaux routiers lors de la crise pétrolière. Ce processus louable n'a pas suffisamment tenu compte de facteurs potentiels de dégradations tels que l'accroissement important en charge et en nombre du trafic, des spécificités climatiques et topographiques des régions traversées, des épandages accrus de sels de déverglaçage, etc.
En Région wallonne, le problème concerne en particulier 144 kilomètres de voiries sur les autoroutes E25 et E411 dans les provinces de Namur et de Luxembourg. La réhabilitation des tronçons affectés représente un investissement minimum de 3,5 milliards de francs. Dans le cadre d'un budget normal, un tel montant devrait s'étaler sur près de dix ans, ce qui est manifestement incompatible avec le maintien en vie de la voirie et la sécurité des usagers. Au point de vue technique, la solution la plus satisfaisante consiste en une intervention lourde car un entretien courant s'avérerait insuffisant.
En complément à ce traitement curatif, le maintien d'un niveau de confort pour l'usager automobile est souhaité pendant une longue période. Cette double exigence impose qu'une même entreprise réalise des travaux de réhabilitation et les entretiens.
Ces raisons ont conduit mon prédécesseur, Michel Lebrun, à opter pour le marché de promotion de travaux via lequel l'entrepreneur n'est pas sollicité pour réaliser des travaux bien déterminés mais pour garantir l'obtention d'un résultat qualitatif selon les méthodes et techniques définies sous sa propre responsabilité. La Région exige cependant que, durant la période contractuelle, l'entrepreneur maintienne le niveau de qualité des chaussées.
Le marché a été divisé en deux lots, un par autoroute. L'ouverture des offres a eu lieu en novembre 1999. Quatre groupements ont remis prix et présentés plusieurs variantes techniques pour des montants s'échelonnant entre 4 et 13 milliards de francs par lot. Ces coûts élevés trouvent leur origine dans les exigences du contrat nettement plus grandes que pour un marché de travaux classiques: le maintien de la performance idéale est exigé pendant 15 ans (12 + 3) contre trois années dans une procédure traditionnelle.
En outre, aucune des quatre offres n'était strictement conforme aux exigences du cahier spécial des charges.
Devant une telle situation et conformément à la législation relative aux marchés publics, l'appel d'offres a été abandonné au profit d'une procédure négociée qui modifie quelque peu les conditions initiales du marché. Le cahier des charges fixe dorénavant la durée du contrat à 16 ans (13 + 3) et distingue trois périodes d'intervention :
- première période de trois années: l'entrepreneur détermine et réalise les travaux lourds pour obtenir, sur l'ensemble de la chaussée à traiter, le niveau de performance exigé par la Région. En outre, dès le début du marché, il assure les réparations provisoires liées à la maintenance des tronçons concernés;
- deuxième période de dix années: l'entrepreneur doit mettre à la disposition des usagers une chaussée présentant une suite de niveaux de qualité préfixés. Ce maintien des niveaux de performance doit s'effectuer dans des conditions de limitation des perturbations de trafic très strictes. L'entrepreneur fournit chaque année des mesures de l'état de la chaussée permettant ainsi à la Région de vérifier si les performances exigées sont atteintes. La Région se réserve le droit de procéder à d'autres contrôles tout au long de l'année;
- troisième période : une garantie de trois années: l'entrepreneur doit, dans certaines limites, garantir les niveaux de performance sur cette période.
Ce travail global de réhabilitation et de maintenance serait rémunéré par la Région via le versement d'une redevance annuelle constante versée pour la première fois à compter de la troisième année, une fois constaté que le niveau de performance est atteint. Les dix autres redevances seraient versées annuellement après approbation du bilan réalisé par l'entrepreneur. La charge financière de l'opération pour le budget régional serait ainsi étalée dans le temps: le coût des travaux de réhabilitation qui devraient être exécutés au cours des trois premières années du contrat serait confondu avec le coût des travaux de maintenance et supporté entre la troisième et la treizième année du contrat.
Au terme de la procédure négociée prédécrite, chaque groupement a remis son offre au début du mois de juin 2001. Ces dossiers sont toujours en cours d'examen au sein du MET, tant pour leur contenu technique que financier.
Ne disposant aujourd'hui d'aucune information précise sur ce marché, il m'est impossible de préciser les montants demandés par les différents groupes. Il m'est dès lors difficile de préjuger de la suite qui pourra être réservée à cette procédure.
Enfin, sur la base des informations recueillies auprès de mon administration, il semble qu'aucune autre autoroute wallonne ne soit autant sujette au phénomène de “punch out” que les deux autoroutes ardennaises.