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Respect du secret de la correspondance au sien des administrations locales.

  • Session : 2008-2009
  • Année : 2009
  • N° : 189 (2008-2009) 1

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  • Question écrite du 23/03/2009
    • de WESPHAEL Bernard
    • à COURARD Philippe, Ministre des Affaires intérieures et de la Fonction publique

    Il me revient que dans certaines villes et communes, le courrier adressé à certains échevins ou certains services est préalablement ouvert par le bourgmestre ou le secrétaire communal, voire par le service chargé de la ventilation des pièces, quel que soit le destinataire.

    Pour être clair, que Monsieur le Ministre me permette de prendre un exemple: un courrier, sur un dossier qui peut parfois s'avérer particulièrement sensible, est adressé à l'échevin des travaux et ouvert, préalablement à sa transmission, par le bourgmestre ou par le secrétaire communal.

    Bien entendu, nous pourrions considérer qu'il s'agit là d'une simple question d'organisation ou de facilité dans la gestion quotidienne.

    Il n'empêche qu'une telle pratique de gestion journalière, même si elle ne semble pas rare, n'est pas acceptable dès lors qu'elle va à l'encontre du respect même de la Constitution belge, et de ses articles 29 et 22.

    L'article 460 du Code pénal prévoit par ailleurs que «Quiconque sera convaincu d'avoir supprimé une lettre confiée Cà un opérateur postal), ou de l'avoir ouverte pour en violer le secret, sera puni d'un emprisonnement de huit jours à un mois et d'une amende de vingt-six francs à deux cents francs, ou d'une de ces peines seulement, sans préjudice des peines plus fortes, si le coupable est un fonctionnaire ou un agent du gouvernement ou (un membre du personnel d'un opérateur postal ou toute personne agissant pour son compte) ».

    Dans le respect d'un droit fondamental qui ne peut être bafoué même pour des motifs d'urgence ou de gestion courante, Monsieur le Ministre pourrait-il nous préciser sa pensée en la matière et plus particulièrement le respect strict de la Constitution belge qui garantit notamment le secret de \a correspondance?

    Je m'interroge également sur la valeur juridique de l'expression « la correspondance - de fonctionnement - peut-être gérée par le bourgmestre ». Cette disposition est reprise dans le code de la démocratie locale et de la décentralisation. C'est sur cette référence que certains bourgmestres se basent pour prendre connaissance du courrier adressé aux services et échevins. Cette disposition est-elle seulement compatible avec la Constitution?

    Pouvons-nous également espérer qu'une directive émanant de l'autorité de Monsieur le Ministre soit transmise aux administrations dépendant de sa responsabilité?
  • Réponse du 28/04/2009
    • de COURARD Philippe

    La question posée par l'honorable Membre relative au respect du secret de la correspondance au sein des administrations communales a retenu ma meilleure attention.

    Le Code de la démocratie locale et de la décentralisation ne contient pas de dispositions expresses quant à la manière dont le courrier entrant doit être traité.

    En ce qui concerne le courrier reçu à la commune, il ressort d'un examen de la doctrine et de la jurisprudence qu'il peut toutefois être déduit de l'article L 1132-3 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (la correspondance est signée par le bourgmestre et contresignée par le secrétaire) que le bourgmestre est habilité à ouvrir les lettres adressées à l'administration communale, étant entendu qu'il peut déléguer cette tâche au secrétaire communal (article L 1132-3 du CDLD) ou à un échevin (article L 1132-4 du CDLD).

    Cette disposition du Code de la démocratie locale et de la décentralisation doit toutefois être combinée avec l'article 29 de la Constitution qui précise que « le secret des lettres est inviolable ».

    La doctrine a déduit de cette combinaison les règles rappelées ci-dessous.

    Pour le courrier adressé tout simplement à l'administration communale, à la commune, au Collège communal ou au Conseil communal: le bourgmestre est seul habilité à l'ouvrir, assisté par le secrétaire communal.

    Pour le courrier adressé non nominativement à un agent ou à un échevin, désigné par sa fonction ou sa qualification administrative (exemple : une lettre adressée à l'Echevin des travaux ou au responsable du service du personnel): la doctrine présume que c'est un courrier administratif que le bourgmestre peut ouvrir. En cas de doute, il est recommandé de le remettre à la personne concernée, à charge pour elle de remettre le contenu au bourgmestre s'il présente un caractère administratif.

    Pour le courrier adressé nominativement sans la mention «personnel» ou « confidentiel » : ce courrier est présumé destiné à l'agent ou à l'échevin en tant que fonction, et non en tant que personnel, et dès lors comme se rapportant au fonctionnement de l'administration et non à la vie privée. L'ouverture de cette correspondance par le Bourgmestre ne constitue pas un acte arbitraire, mais en cas de doute, il est recommandé au Bourgmestre de le remettre à la personne concernée, à charge pour elle de remettre le contenu au Bourgmestre, s'il présente un caractère administratif.

    Pour le courrier nominatif portant la mention « personnel » ou « confidentiel» : le bourgmestre ne peut l'ouvrir et doit le remettre à l'agent ou au mandataire concerné.

    La méconnaissance du secret des lettres dans cette hypothèse peut donner lieu à des sanctions pénales et civiles, si les conditions sont réunies pour prendre de telles sanctions. Il faut, en effet, tenir compte dans ce cas de l'article 29 de la Constitution et de l'article 8.1. de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'article 151 du Code pénal qui punit tout acte arbitraire et attentatoire aux libertés et aux droits garantis par la Constitution ordonné ou exécuté par un fonctionnaire ou un officier public et de l'article 460 du Code pénal.