Les allergies, particules fines et désensibilisation
Session : 2010-2011
Année : 2011
N° : 256 (2010-2011) 1
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Question écrite du 16/05/2011
de WESPHAEL Bernard
à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des chances
Il semblerait que depuis le 1er janvier 2011, Herstal a dépassé 55 fois le taux admissible de concentration en particules fines alors que l’Europe n’en tolère que 35 par an.
Une étude actuellement menée par l’ISSeP déterminera s’il s’agit d’un réel problème de pollution ou d’une défectuosité de la sonde.
D’autres communes comme Saint-Nicolas, Jemeppe, Angleur, Liège à certains endroits, sont elles aussi proches du seuil des 35 dépassements annuels.
Aux dires des scientifiques, les personnes sensibilisées au pollen représentent près de 20% de la population actuelle, ce qui était loin d’être le cas il y a quelques dizaines d’années, mais ce phénomène s’expliquerait par le fait que des particules fines accolées à un grain de pollen multiplient le risque d’allergie par dix.
Sachant que les conséquences peuvent aller de la simple rhinite allergique (pouvant durer plusieurs semaines) à des cas beaucoup plus graves tels que l’asthme, je m’interroge sur le fait qu’aucun des deux types de traitement de désensibilisation ne soit remboursé par les mutuelles et soit entièrement à charge du patient.
Ces traitements sont : 1° la désensibilisation par injections (inoculations d’allergènes) dont le coût est d’environ 300 euros et la durée du traitement peut aller jusque trois ans. Cette technique plus ancienne présente l’immense inconvénient, dans des cas rares (encore heureux !) de réaction allergique violente ayant entraîné la mort du patient ; 2° la désensibilisation par ingestion (qui nécessite des doses beaucoup plus fortes d’allergènes puisque une partie de ceux-ci sont détruits par le tube digestif) dont le coût est d’environ 700 euros et la durée du traitement beaucoup plus courte.
Point n’est besoin d’être grand clerc pour faire le lien entre la santé et l’environnement, vu que les normes fixées par l’Europe semblent allègrement dépassées.
Madame la Ministre pourrait-elle me dire ce que peuvent faire les parents non nantis d’un enfant allergique, bien plus nombreux que l’on ne pense ?
Renoncer à le faire désensibiliser, le condamnant ainsi au mieux (à supposer qu’il ne s’agisse pas d’un asthmatique) à vivre toute son adolescence avec le nez qui coule et les yeux qui pleurent d’avril à septembre ?
Le faire désensibiliser avec la première méthode en croisant les doigts pour qu’il ne décède pas en cas de réaction grave (cas rare, je le répète, mais non exclu) ?
Se tourner vers le CPAS au budget parfois tellement serré qu’il se verra dans l’obligation de refuser l’intervention ?
Il me semble qu’il y a là matière à réflexion tant en termes de santé publique que d’égalité des chances, c’est pourquoi j’aimerais être informé sur ce que Madame la Ministre a pu initier ou mettre en place avec l’aide de ses services pour remédier à cette situation ?
Réponse du 08/06/2011
de TILLIEUX Eliane
Les mesures commandées par l'AWAC à l'IsseP ont pour objet de déterminer les sources de pollution et non de détecter une éventuelle défectuosité de l'appareillage localisé à Herstal. L'étude permettra d'alimenter la prise de décisions. notamment en termes de permis d'environnement.
L'honorable membre fait le lien entre la santé et l'environnement dès lors que les normes de qualité de l'air sont ou semblent dépassées, et évoque particulièrement la problématique des allergies au pollen.
On sait aujourd'hui que l'allergie - dont fait partie la rhinite allergique saisonnière ou rhume des foins - est une maladie familiale. Cependant. d'aucuns pensent que l'augmentation des affections allergiques ces dernières décennies, sur une si courte période, ne peut avoir une explication génétique et que vraisemblablement les facteurs environnementaux sont déterminants. Une des hypothèses évoquées est celle de la «théorie hygiénique»: une stimulation déficitaire de notre système immunitaire par des agents infectieux. dans les premiers mois de la vie. orienterait notre réponse immunitaire vers une réponse de type allergique.
La pollution chimique peut agir sur l'allergénicité du pollen en augmentant le nombre d'allergènes à l'intérieur des grains et en facilitant la sortie des allergènes des grains de pollens due à une fragilisation de leur paroi externe. Les oxydes d'azote. l'ozone et les particules diesel sont les polluants les plus souvent incriminés. le rôle du dioxyde de soufre et du monoxyde de carbone paraissant plus aléatoire.
Les polluants sont également des irritants respiratoires. qui jouent le rôle de facteurs adjuvants dans la réaction allergique. Ainsi, associés au pollen. l'ozone et le dioxyde d'azote peuvent accentuer la réponse bronchique, ainsi que les manifestations de rhinite ou de conjonctivite des allergiques. et abaisser leur seuil de réponse aux allergènes auxquels ils sont sensibilisés.
Les rhinites allergiques saisonnières apparaissent dans l'enfance en général. atteignant un pic de fréquence à l'adolescence et chez les adultes jeunes et sont rares après 65 ans. De 10 à 20 % des patients verront une disparition des symptômes et chez 40 à 65% d'entre eux leurs symptômes diminueront en intensité. L'asthme semble associé au rhume des foins chez environ 20% des patients et il apparaît environ 3 fois plus souvent chez les enfants ayant une rhinite allergique.
La plupart des traitements proposés sont symptomatiques. Le choix dépend de la sévérité des symptômes perçus, de leur persistance et de l'efficacité des traitements antérieurs. La mesure la plus radicale est d'éviter l'exposition au pollen allergisant, d'autres relèvent du bon sens comme se doucher y compris les cheveux en rentrant d'une balade à l'extérieur lorsque les pollens sont élevés dans l'air ou fermer les vitres et entrées d'air dans la voiture.
La désensibilisation est proposée pour agir sur l'histoire naturelle des rhinites allergiques saisonnières. Elle est spécifique d'un antigène c'est-à-dire toute substance étrangère à l'organisme capable de déclencher une réponse immunitaire visant à l'éliminer. La désensibilisation par voie sous-cutanée - consistant à injecter toutes les semaines et parfois même deux fois par semaine une dose extraite de l'allergène probablement en cause, à une dose graduellement croissante jusqu'à un plateau maintenu pendant 2 à 3 ans au cours duquel les injections sont espacées - semble plus efficace pour les allergies aux graminées. ambroisie et bouleau que pour d'autres allergènes, mais moins bien supportée avant l'âge de 5 ans. Pour les asthmatiques. ce traitement comporte des risques de réaction. parfois sévère comme une réaction anaphylactique. pouvant aller jusqu'au décès. La désensibilisation par voie sublinguale (ingestion) est d'efficacité incertaine chez les adultes et n'est pas mieux qu'un placebo chez les enfants.
Si la rhinite allergique saisonnière est une affection fréquente, parfois gênante, la démarche de soins est à construire entre le patient et son médecin en pesant les bénéfices et les risques de chaque intervention en fonction de la gêne ressentie et de l'efficacité des différentes mesures proposées. Le système de santé en Belgique assure un remboursement des consultations et des traitements symptomatiques, afin de permettre un accès aux soins à tous, même aux personnes ayant des difficultés financières.
Etant donné la diminution, voire la disparition des symptômes avec l'âge, le fait que la maladie est en général bénigne, que la désensibilisation par voie cutanée est longue et pénible, qu'elle est dangereuse pour tout le monde, particulièrement pour les patients asthmatiques et moins bien supportée avant l'âge de 5 ans, et que la désensibilisation par voie sublinguale est d'efficacité incertaine, voire pas plus grande qu'un placebo, l'Autorité fédéral, est peut-être moins enclin, à rembourser la désensibilisation en Belgique. Je voudrais insister pour ma part sur la nécessité d'agir sans attendre au niveau des causes, à savoir les facteurs environnementaux. A ce niveau, de nombreux leviers sont aux mains de la région, afin par exemple de réduire les émissions atmosphériques liées à l'industrie ou au transport.