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Les métiers en pénurie en région liégeoise

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 843 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 15/07/2011
    • de WESPHAEL Bernard
    • à ANTOINE André, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports

    L’industrie métallurgique liégeoise est confrontée à la pénurie des métiers techniques.

    Le Forem a analysé les causes de l’apparition des « fonctions critiques » et en pénurie.

    Une profession est considérée comme critique lorsque l’employeur peine à recruter les travailleurs dont il a besoin. Il ne manque pas forcément de candidats, mais les conditions de travail difficiles, les difficultés de mobilité ou encore les exigences de l’employeur ralentissent le recrutement. L’employeur devra réviser le profil souhaité pour combler les postes vacants.

    N’y aurait-il aucune autre explication que celle avancée par le Forem à ce phénomène ?

    Du côté du patronat, on avance l’image négative liée aux professions techniques et la dévalorisation de l’enseignement technique et professionnel. On met en garde : « sans profession manuelle pas de richesse dans un pays! ».

    Afin d’illustrer le propos, prenons un petit exemple :
    - un enfant est particulièrement doué de ses mains, sa passion est liée au travail du bois. Est-il moins intelligent pour la cause ? Certainement pas, simplement ce qui le passionne se passe ailleurs que dans les sciences, les mathématiques, … ou que sais-je encore ;
    - lors de son passage en humanité, vu la pression sociale existante, il sera le plus souvent orienté vers des humanités classiques. Non intéressé par ce qu’il y apprendra, il se laissera distancer.
    - deux ans plus tard il passera en technique et se dirigera (à titre d’exemple) vers un métier de l’Horeca, car il espérera ainsi trouver un travail ;
    - deux ans plus tard encore, il s’apercevra que vraiment sa passion est et reste le travail du bois, via une passerelle, il reviendra alors à celui-ci.

    En deux ans à peine, ce jeune ne peut apprendre le métier de menuisier ébéniste. Ce n’est pas tout. Arrivant tardivement dans la filière (donc sans aucune connaissance spécifique à celle-ci), il freine inévitablement la formation de ses nouveaux condisciples, qui ont opté dès le départ pour ce type de métier et qui ont deux ans de plus dans cet apprentissage. En d’autres termes, comment intégrer les nouveaux venus dans une filière de formation sans handicaper les autres ?

    Il y a là une forme de dévalorisation de l’enseignement technique et professionnel, à force de ne pas respecter à leur juste valeur les métiers manuels, nous allons vers une nouvelle vague d’immigration nécessaire à la survie de notre industrie, avec en parallèle toute une frange de notre jeune population laissée en marge de notre système d’emploi.

    Monsieur le Ministre peut-il me dire si les patrons d’entreprises et les professionnels de l’enseignement qui tirent le signal d’alarme sont entendus ?

    Le Forem réfléchit-il sur la question de l’effet handicapant des passerelles ? Monsieur le Ministre lui-même y a-t-il réfléchi ? Est-il en contact sur le sujet avec son collègue chargée de l’enseignement obligatoire ?

    Quelles mesures a-t-il prises ou mises en place pour valoriser à nouveau le travail manuel ?
  • Réponse du 12/10/2011
    • de ANTOINE André

    Si le Forem n'a pas de réponse à apporter en ce qui concerne l'organisation des filières qualifiantes et des passerelles dans l'enseignement obligatoire, la question m'interpelle néanmoins, tout comme l'opérateur public de l'emploi et de la formation professionnelle en Wallonie.

    En effet, des entreprises manquent de candidats et, pourtant, des filières existent pour former des jeunes aux professions demandées, à commencer par celles offertes par la Communauté française. Comment expliquer alors cette situation, si ce n'est en raison d'un désintérêt de la population pour les métiers techniques ?

    En effet, les métiers techniques sont considérés comme peu attractifs. Les parents ont une propension à voir davantage leurs enfants dans un métier à « col blanc» plutôt « qu'une truelle ou une fraiseuse en main ». La hiérarchisation des filières au sein même du système scolaire tend à renforcer le processus de relégation, qui est également un facteur extrêmement handicapant pour ces métiers. Pour contrer cet état de fait, il faut donc initier des actions afin d'améliorer l'image que le grand public a des métiers techniques et des études qui y mènent et, dès lors, de faire en sorte que nos jeunes se tournent spontanément vers ces métiers.

    A ce titre, des organismes comme Skills Belgium œuvrent déjà à revaloriser ces métiers; en cela, ils jouent un rôle actif dans le champ de la promotion des métiers, notamment grâce aux concours Euroskills. A cela s'ajoute le plan intégré de promotion des métiers du Plan Marshall 2.vert. L'objectif visé ici est de fédérer les acteurs, tels que le Forem, l'Enseignement et les secteurs, ainsi que leurs actions autour d'un projet commun afin d'en améliorer la performance et de toucher plus efficacement un public plus large.

    Il existe un réel déficit d'informations sur les potentialités qu'offrent les métiers techniques. En effet, les métiers techniques disposent de potentialités, mais qui restent malheureusement méconnues. Il n'en reste pas moins qu'en 2010, grâce au Plan Marshall 2.vert, 17.870 personnes ont été informées collectivement ou individuellement par les Carrefours Emploi Formation sur ces métiers manuels. Je citerai encore ici les initiatives des Centres de compétence (actions kids vers les 11-12 ans), les actions de Skills Belgium ou encore l'organisation d'Euroskills à Spa Francorchamps en 2012.

    Outre les actions d'information ou de sensibilisation, il est aussi important de développer des dispositifs d'orientation. Les personnes sont effectivement amenées à poser des choix d'orientation tant au cours de leur cursus scolaire qu'au cours de leur parcours professionnel. La confrontation aux réalités d'un métier permet indiscutablement de confirmer ou d'infirmer des choix et, dès lors, d'éviter certains parcours parfois bien sinueux. Aussi, les essais métiers, organisés par Forem Formation, l'IFAPME et prochainement par des opérateurs de pré-qualification, permettent aux jeunes de tester plusieurs métiers et donc de s'orienter vers des métiers porteurs.

    Nonobstant ce qui précède, pour mener des actions pertinentes, qu'elles soient organisées ou non avec l'enseignement, il importe de disposer d'une vision aussi concrète et représentative que possible des besoins du marché. C'est pourquoi j'ai demandé au Forem de poursuivre le travail entamé dans le cadre de l'analyse et du suivi des métiers en demande (1) afin de mettre en exergue les métiers qui présentent des difficultés de recrutement.

    Grâce à ces analyses, le Forem peut mieux cibler les actions pour les métiers et secteurs dont les besoins sont importants ou risquent de le devenir. Le Forem collabore d'ailleurs ici avec les organisations sectorielles.

    Une communication est assurée auprès des acteurs concernés. Les conclusions des analyses sont accompagnées de recommandations à l'attention non seulement des services du Forem, mais aussi des secteurs, de l'Enseignement et d'autres organisations chargées de promouvoir les métiers, telles que l'ASBL Skills Belgium, afin de mettre en œuvre des actions répondant aux difficultés et obstacles rencontrés.

    Chaque métier fait, en outre, l'objet d'une fiche « Zoom sur le métier de ... », déposée sur le site En collaboration avec l'Enseignement, le Forem gère également un site internet, intitulé « Horizon Emploi», qui informe à la fois sur les études, les métiers, les secteurs et les formations. Depuis 2010, le site propose aussi des vidéos sur des métiers à promouvoir, parmi lesquels plusieurs métiers manuels et techniques. Enfin, au sein des Directions régionales, le Forem organise des séances d'information « métiers» et participe à des salons de l'emploi, dont certains ciblent plus précisément certains métiers ou secteurs d'activités.

    Je conclurai enfin par les services offerts au niveau de la formation qualifiante. A cet égard, le Forem propose à des jeunes qui sortent des études et souhaitent se réorienter l'opportunité de suivre, dans ses centres de formation et les Centres de compétence, un parcours de formation intensif, pratique, entouré par des professionnels, en lien avec les entreprises et variant les situations didactiques: formation en groupe, exercices individuels, stage en entreprise, formation à distance, formation alternée centre/entreprise... Les mises en situation pratique et les travaux réels permettent également aux jeunes de prendre leurs distances par rapport à leur expérience scolaire et de se rapprocher du statut de travailleur. La concordance des programmes et activités de formation avec les référentiels métiers établis en collaboration avec les secteurs professionnels ainsi que la reconnaissance des compétences acquises en formation augmentent sensiblement les chances des jeunes de s'insérer dans le métier appris.

    Ainsi, si des métiers manquent encore aujourd'hui de candidats, ces besoins ont véritablement été pris en compte dans les politiques que je gère au niveau de l'emploi et de la formation. Les actions que j'ai entreprises depuis le lancement du Plan Marshall 2.vert ont même atteint des résultats dépassant les objectifs fixés, notamment au niveau de l'identification des compétences portées et des heures de formations: en 2010, 8.155 screnings (identification de compétences) réalisés pour un objectif de 8.000, 767.190 heures additionnelles de formation pour un objectif de 604.805 heures et 7.541.850 heures de formation réalisées (hors heures de formation additionnelle) pour un objectif de 7.027.739 heures.



    (1) Projet Job focus existant depuis 2005