à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville, du Logement et de l'Energie
Un décret du 13 mars 2014 et une circulaire du 12 décembre 2014 prévoient que c'est désormais le Conseil communal qui est amené à se prononcer par une décision d'approbation, de refus ou de réformation sur les décisions des conseils de fabrique d'église au sujet des comptes et budgets.
Si l'on peut se réjouir de ce renforcement de l'autonomie communale, puisque lui est dès lors dévolue une compétence qui relevait avant du Collège provincial, l'on peut toutefois s'interroger sur les transferts de charges de travail que cette nouvelle compétence implique.
En effet, sur le fond, dans la mesure où les communes participent activement au financement des fabriques d'église, il est logique que les conseils communaux statuent sur leurs comptes et budgets, à tout le moins en premier ressort.
En pratique, les conseils communaux doivent prendre une décision dans un délai fixé par l'article L 3162-2 § 2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, à savoir dans les 40 jours de la réception de l'acte approuvé par l'organe représentatif (l'Évêché) du culte et de ses pièces justificatives. Ce délai peut être prorogé de moitié, c'est-à-dire de 20 jours. Toutefois, la prorogation réclame une décision motivée par les besoins de l'instruction du dossier, par exemple, du Conseil communal. En pareil cas, le dossier est donc présenté deux fois au Conseil communal, la première fois pour proroger le délai, la seconde pour prendre une décision formelle.
À défaut de décision dans le délai prescrit, l'acte devient exécutoire (article L 3162- 2 derniers alinéas).
Les fabriques d'église peuvent être nombreuses sur le territoire d'une même entité communale. Or, les budgets et les comptes des fabriques sont tous présentés au même moment, puisque les époques sont déterminées par décret : - transmission du compte à la Commune avant le 25 avril, suivant l'article 6 de la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes, tel que modifié par l'article 39 du décret du 13 mars 2014 : - transmission des budgets avant le 30 août, par application de l'article 1er alinéa 1er de la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes, tel que modifié par l'article 36 du décret du 13 mars 2014.
Les administrations communales doivent donc faire face à un volume important de travail d'analyse approfondie dans des délais relativement courts, travail d'autant plus important qu'à défaut de décision du Conseil communal dans le délai fixé, les actes deviennent exécutoires.
Or, en cas d'approbation tacite par suite d'échéance du délai, les communes pourraient se trouver dans des situations délicates en se voyant opposer par des fabriques d'églises des recettes et/ou des dépenses problématiques, spécialement sur le plan de la régularité.
Dans de nombreuses communes, le conseil se réunit une fois par mois, sauf éventuellement durant les vacances d'été. Les convocations se font 7 jours francs avant la réunion et des notes de synthèse explicative et projets de délibérations dûment motivées en fait et en droit doivent être à ce moment disponible. Ceci laisse donc dans la pratique relativement peu de temps pour procéder à une complète instruction des dossiers.
Certes, on pourra objecter que le Gouvernement wallon, en matière d'approbation des décisions du Conseil communal relatives aux budgets et aux comptes communaux, doit également statuer dans des délais du même ordre. Cependant, les communes ne disposent pas nécessairement, ni en nombre, ni en qualification du personnel occupé au SPW. Et, plus fondamentalement, les décisions de tutelle sont prises formellement non par le Gouvernement wallon, mais par le ministre délégué, de sorte que ne se trouvent pas à s'appliquer des formalités et délais de convocation qu'impliquent des réunions du Conseil communal.
Il est certes légitime que le législateur décrétal ait voulu cadencer la procédure pour éviter d'anormaux retards de traitement des dossiers par les communes. Mais, le rythme de travail imposé aux côtés de nombreuses charges de travail à son revers qui est celui du risque de précipitation dans l'analyse des pièces transmises par les fabriques de manière à éviter l'approbation tacite, source potentielle de difficultés ultérieures.
Monsieur le Ministre partage-t-il cette analyse ? Son attention a-t-elle déjà été attirée par d'autres communes ou acteurs sur le sujet ? Dispose-t-il de déjà chiffres sur le nombre d'approbations tacites qui ont eu lieu et sur d'éventuelles difficultés ultérieures quelles auraient engendrées ? À titre personnel, il me semble qu'il serait utile d'adapter le délai afin d'éviter les difficultés actuelles.
Réponse du 10/09/2015
de FURLAN Paul
Le décret du 13 mars 2014 modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation et diverses dispositions relatives à la tutelle sur les établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus est le fruit d’un travail concerté basé sur des objectifs de modernisation, d’harmonisation et de simplification.
Il en ressort que les établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus financés par les communes seront désormais soumis à la tutelle de deux autorités qui sont le Gouverneur et le conseil communal.
Effectivement, la tutelle sur les budgets, modifications budgétaires et comptes des établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus financés au niveau communal, en ce qu’elle est confiée aux communes, est une avancée importante en terme de simplification, basée sur la logique du contrôleur qui est en même temps le payeur. Cette modification législative était une revendication de l’Union des Villes et communes depuis près de vingt ans et le décret a notamment concrétisé cette volonté.
Le transfert de la charge de travail supportée aujourd’hui par les communes doit être envisagé de manière relative puisqu’en application des articles 2 et 7 anciens de la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes, les communes étaient déjà tenues de rendre un avis sur les budgets et comptes, ce qui nécessitait, tout comme l’instruction en tant qu’autorité de tutelle, un travail d’analyse approfondie.
Les seules différences identifiables dans l’application du nouveau système concernent le suivi du circuit administratif et les délais qui sont aujourd’hui de rigueur, et non plus d’ordre. Cette modification peut, à mon estime, être qualifiée d’amélioration substantielle, puisqu’elle permet non seulement aux établissements cultuels d’être fixés plus rapidement sur le suivi réservé à leurs dossiers, mais également de lutter activement contre l’arriéré administratif.
L’imposition de délai de rigueur requiert effectivement une plus grande célérité dans l’instruction des dossiers. Si dans les petites communes, le nombre de fabriques est souvent réduit, il en va différemment des plus grandes villes et il y existe un risque que les dossiers voient leur délai de tutelle expirer à des moments proches, étant donné les délais fixés dans la loi du 4 mars 1870 précitée. Pour faire face à ce genre de situation et anticiper toute difficulté, je recommande vivement aux communes, quelques mois avant les dates butoir du 25 avril et 30 août, de réunir leurs fabriques d’église et autres établissements, afin de convenir avec elles d’un étalement de l’envoi des dossiers au travers d’un calendrier de dépôt des dossiers. Ces rencontres peuvent parfaitement s’inscrire dans le cadre de l’opération-pilote que j’ai initiée au travers de la circulaire du 18 juillet 2014.
Je suis conscient que les conseils communaux sont soumis, y compris dans leur processus de tutelle, à des procédures strictes dont le non-respect pourrait entacher la décision de nullité, raison pour laquelle je ne peux qu’insister pour qu’un dialogue prenne place avant le démarrage de toute instruction, tant en ce qui concerne le fond du dossier, que la programmation du calendrier de dépôt. Cela étant, en cas de difficulté dans le traitement d’un dossier, il convient de ne pas perdre de vue que les communes disposent toujours de la possibilité d’ajout du point en urgence, outre la possibilité de prorogation qu'a correctement évoquée l'honorable membre.
Mon administration est régulièrement amenée à assister les communes, confrontées à des difficultés dans le calcul des délais, dans la compréhension des circuits administratifs, dans leurs obligations en tant qu’autorité de tutelle. À ce jour, je n’ai pas enregistré de doléances de communes à propos de l’impossibilité de statuer dans les délais imposés. Cela étant, compte tenu de l’arriéré administratif accumulé avant l’entrée en vigueur du nouveau décret, il est raisonnable de penser que l’instruction de tous les comptes 2014 n’est pas encore clôturée.
Par ailleurs, nous avons travaillé avec différentes communes de Wallonie afin d’imaginer une solution permettant de faciliter le contrôle de tutelle financière pour les villes et communes. Ainsi, depuis juillet dernier, celles-ci peuvent trouver, sur le site internet des pouvoirs locaux, des documents didactiques permettant d’effectuer un contrôle plus rapide et complet des comptes et budgets des fabriques d’église. Ces documents, initiés au départ des pouvoirs locaux, ont été visés et amendés par mon administration, sur base de son expérience passée de ce type de contrôle.
Enfin, n’étant pas autorité de recours sur les décisions des communes en la matière, à l’inverse des Gouverneurs, amenés à statuer sur les recours des établissements cultuels et de leur organe représentatif, je ne dispose pas d’information concernant le nombre d’actes devenus exécutoires par expiration du délai. D’ici quelques mois, il sera possible de collecter auprès des services des Gouverneurs, des informations afin que soit réalisé un travail statistique quant au nombre de dossiers dont les Gouverneurs ont eu à connaître suite à l’adoption d’une décision communale prise hors délai.
À l’inverse, il est vraisemblable de penser que les Gouverneurs ne disposeront pas d’informations concernant le nombre de budgets, modifications budgétaires et comptes des établissements cultuels uni-communaux devenus exécutoires par expiration du délai, sans, dans ce cas, que ne soit adoptée ultérieurement de décision de tutelle, sauf bien entendu, si les communes se manifestent expressément pour nous faire part de cette information.
Enfin, je terminerai en précisant que le temps de l’évaluation viendra et que celle-ci sera l’occasion d’analyser si des adaptations législatives sont ou pas nécessaires.