/

La profusion de microsatellites dans l'espace

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2020
  • N° : 137 (2020-2021) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 26/11/2020
    • de AGACHE Laurent
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Récemment, la start-up wallonne Aerospacelab a annoncé l'installation, pour l'été 2021, dans le parc scientifique de Louvain-la-Neuve, d'une unité d'assemblage de microsatellites, d'une capacité de 24 satellites par an. Elle répond ainsi à une demande croissante de microsatellites à l'échelle mondiale, particulièrement du fait d'entreprises actives dans les télécoms.

    Si nous pouvons nous réjouir de l'installation, en Wallonie, d'une unité de production technologique à haute valeur ajoutée, la profusion de ces microsatellites pose question.

    Ainsi, depuis mai 2019, la société américaine SpaceX d'Elon Musk a envoyé plus de 240 petits satellites de télécommunication, et compte augmenter le rythme pour atteindre un total de 12 000 à l'horizon 2025, et 42 000 dans les années suivantes, dans le but de vendre des connexions internet à haut débit sur l'ensemble de la planète. Et ce, sans compter les projets similaires d'autres multinationales actives dans les télécoms.

    L'impact de ces constellations artificielles de satellites serait catastrophique pour la recherche astronomique : les observations et les photographies seront assaillies par ces intrus lumineux quadrillant la voûte céleste à un rythme soutenu. Il sera alors extrêmement difficile de parvenir à les éliminer totalement des images et d'innombrables champs d'investigations de l'astrophysique seront condamnés. L'union astronomique internationale a d'ailleurs partagé sa vive inquiétude à ce sujet dans un communiqué publié le 12 février dernier.

    Or, nous avons des chercheurs en Astronomie de qualité et internationalement reconnus en Région wallonne, notamment dans l'unité STAR de l'Université de Liège.

    Quelle est l'analyse Monsieur le Ministre de la situation ?

    Quels sont les leviers que la Wallonie peut mettre en œuvre pour réguler davantage l'accès à l'espace et maintenir un équilibre raisonnable entre exploitation commerciale de l'espace et préservation de conditions de qualité pour l'observation spatiale scientifique ?
  • Réponse du 15/12/2020
    • de BORSUS Willy
    Depuis le lancement de Spoutnik 1 en 1957, plusieurs milliers de satellites et de sondes ont été envoyés dans l’espace. Des restes de lanceurs et des étages de fusées, des réservoirs, des satellites hors d’usage et des millions de débris gravitent autour de la terre, particulièrement en orbite basse.

    Les principales agences spatiales prennent conscience du phénomène depuis une vingtaine d’années déjà et tentent de mettre en place des stratégies pour réduire, sinon limiter, la croissance de leur nombre.

    Une méthode consiste à mettre en place une réglementation visant à restreindre leur multiplication : suppression des pièces mobiles, passivation des étages supérieurs (pour éviter leur explosion) ou désorbitation de ceux-ci, mise en « orbite cimetière » en fin de vie ou accélération de la désorbitation. Cette réglementation est déjà appliquée par les principales agences spatiales.

    Une autre mesure active vise à désorbiter les débris spatiaux (ils sont ainsi capturés et désorbités).

    L’Agence spatiale européenne est un des acteurs les plus actifs dans le domaine. Elle vient, d’ailleurs, de signer, dans le cadre de son programme ADRIOS (Active Debris Removal/In-Orbit Servicing), un contrat de 86 millions d’euros avec une start-up suisse, ClearSpace, issue de l’École polytechnique fédérale de Lausanne, pour la récupération et la destruction d’un débris spatial, de la taille d’un satellite, vestige d’une précédente mission européenne.

    Les acteurs du secteur spatial wallon, et plus particulièrement ceux historiquement nés autour des compétences en astrophysique de l’Université de Liège et du plateau d’Uccle il y a plus de cinquante ans, et donc le Centre spatial de Liège est l’héritier, sont tous sensibilisés au danger que représente les énormes constellations satellitaires lancées dans le cadre du « new space » à vocation commerciale, constellations généralement composées d’environ mille satellites, voire plus.

    Le champ d’application de ces mégaconstellations auxquelles l’honorable membre fait référence est constitué principalement des télécommunications, qui nécessitent beaucoup d’énergie, et donc de grands panneaux solaires qui, de par leur aspect brillant, constituent la principale source de réflexion des rayons du soleil qui éblouissent les télescopes astronomiques au sol.

    Le secteur spatial wallon s’oriente quant à lui bien plus vers l’observation de la terre à des fins économiques, mais aussi, et même surtout, à des fins de gestion de notre planète, de l’environnement …

    Comme l’honorable membre le souligne, nous pouvons nous réjouir de l’installation, en Wallonie, d’une unité de production technologique à haute valeur ajoutée par Aerospacelab, véritable pépite pionnière en matière de fabrication de satellites légers, d’analyse d’images et de renseignements géospatiaux. Pour rappel, cette entreprise a reçu le Start-Up Awards 2019 et ne cesse de croître depuis sa création.

    La constellation d’Aerospacelab sera quant à elle constituée de maximum de quelques dizaines de microsatellites, dont les panneaux photovoltaïques ont une surface d’un maximum 1 m², et sont en orbite très basse, leur conférant une durée de vie de maximum 5 ans avant de revenir se consumer dans l’atmosphère terrestre.

    La Wallonie participe donc de manière infinitésimale au phénomène d’éblouissement auquel l’honorable membre fait référence.

    Dans ce contexte global lié à l’avènement du « new space », le droit spatial est en pleine évolution. La position belge est défendue par BELSPO et mon collègue en charge de la Politique scientifique fédérale, Mr le Secrétaire d’État Thomas Dermine. La Belgique ne pouvant agir seule, les associations internationales d’astronomie sont d’excellents relais pour soutenir cette cause.