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L'utilisation raisonnée des subsides de rénovation des logements publics

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2020
  • N° : 65 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 03/12/2020
    • de DISABATO Manu
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    En juin dernier, le Gouvernement wallon a annoncé un plan de rénovation des logements publics à hauteur de 1,2 milliard d'euros visant à investir dans la salubrité, la sécurité et la performance énergétique de 25.000 logements.

    Il est nécessaire et louable d'amorcer ce gros chantier wallon afin d'assurer à nos concitoyens des logements décents, de qualité, et fonctionnels, tout en rencontrant nos objectifs énergétiques pour 2050.

    Nous parlons donc bien ici de rénovation, et il faut, de ce fait, supposer que les projets qui seront rentrés auprès des services du SPW ou de la SWL comprennent des logements dans lesquels ces rénovations pourraient être inappropriées au vu de la vétusté de certains logements publics. Je me questionne quant au point de basculement entre l'intérêt de rénovation ou de déconstruction/reconstruction de logements si nous voulons que les SLSP disposent à la fois de logements efficients énergétiquement et rationnellement gérés.

    Monsieur le Ministre peut-il donc m'exposer sa volonté dans le cadre de ces subsides ?

    Quel est le point de basculement entre l'intérêt des projets de rénovations et de déconstruction/reconstruction qui sont rendus par les SLSP ?

    À partir de quel montant décide-t-on qu'il est pertinent de rénover dans une certaine mesure ou de purement et simplement déconstruire et construire du neuf ?

    Enfin, qui du SPW ou de la SWL aura à recevoir et remettre un avis sur les projets ?
  • Réponse du 15/12/2020
    • de COLLIGNON Christophe
    Le plan de rénovation des logements publics 2020-2024 repose sur un droit de tirage pour les SLSP. Chaque société dispose d’une enveloppe fermée pour atteindre :
    - son objectif quantitatif : un nombre minimum de logements rénovés ;
    - son objectif qualitatif : la mise en conformité des logements et l’atteinte de la performance énergétique (le label PEB de niveau B au minimum).

    Les logements les plus énergivores du parc (labels F et G) sont la cible prioritaire obligatoire.

    Dès lors, les opérations de rénovation seront plus ou moins coûteuses suivant l’état des logements et l’importance des travaux à réaliser.

    Dans ce contexte, il appartient à chaque SLSP de proposer son plan d’investissement suivant les priorités qu’elle définit dans le respect des objectifs régionaux. Chaque projet qu’elle envisage fait l’objet de son évaluation d’opportunité et de faisabilité technique, économique, sociale et environnementale, réalisée avec le conseil de la SWL.

    La question de l’honorable membre sur les choix qui conditionnent l’opportunité de rénover ou de déconstruire est très pertinente. C’est l’une des questions fondamentales auxquelles notre société est confrontée dans le cadre de sa transition environnementale.

    Jusqu’à quel montant investir dans la rénovation ? À partir de quand dans la vie d’un bâtiment faut-il envisager de désinvestir ? Comment désinvestir ? Les réponses à ces questions sont malheureusement encore trop souvent formulées sous le seul angle du coût financier. Pourtant, le secteur de la construction représente à lui seul, au niveau mondial, 39 % des émissions de gaz à effet de serre, 33 % des déchets produits non recyclés et 50 % des ressources naturelles extraites.

    Ces chiffres montrent à quel point nos choix de conception et de construction doivent évoluer pour intégrer non seulement les coûts économiques, mais aussi les coûts sociaux et environnementaux.

    Pour éclairer ces choix dans le plan de rénovation 2020-2024, la décision du Gouvernement wallon, traduite dans la circulaire envoyée aux sociétés de logements publics, détermine plusieurs balises :
    1. La subvention régionale est limitée à un plafond de 45 000 euros par logement, quel que soit le montant des travaux ;
    2. Toute opération nécessitant un investissement supérieur à 100 000 euros TFC en moyenne par logement doit faire l’objet d’une évaluation spécifique de la part de la SLSP quant à la pertinence d’une rénovation plutôt qu’un désinvestissement.
    Cette limite de 100 000 euros a été fixée en tenant compte notamment des prix moyens à la construction pour des standards de performances actuels, de la valeur vénale moyenne d’un logement public, mais aussi de la mise de fonds propres moyenne dans un projet.
    Au-delà de cette limite, les SLSP sont donc invitées à procéder, préalablement, à un audit logement intégrant la feuille de route de travaux.
    Si, au vu de l’audit, la société retient l’option de la rénovation, l’objectif énergétique de l’opération évaluée pourrait être revu à la baisse, sur avis favorable de la SWL, sans toutefois être inférieur au label C.
    Si malgré cette révision à la baisse de l’objectif énergétique, le montant d’investissement demeure supérieur à 100 000 euros TFC, seules les opérations concernant des biens présentant une valeur patrimoniale avérée pourront rester éligibles à une subvention dans le cadre du plan de rénovation.

    La question du désinvestissement va donc très clairement se poser pour la majorité des sociétés de logement public.

    C’est pour cette raison que la SWL invite chaque SLSP à lui transmettre une note de réflexion et d’analyse de sa stratégie immobilière et de sa mise en œuvre au travers du plan de rénovation. C’est dans celle-ci que les sociétés expliquent et justifient leur approche énergétique, de sécurité/salubrité, environnementale, économique, sociale et sociétale ainsi qu’opérationnelle. Elles y exposent notamment leur réflexion en matière de durabilité des travaux et précisent leurs priorités et l’éventuel choix de ne pas inscrire certains logements prioritaires (label F et G) dans leur plan, suivant leur volonté de désinvestissement à court ou moyen terme, de regrouper des travaux ultérieurement ou en fonction de la valeur patrimoniale, et cetera.

    Par désinvestissement, il faut comprendre l’option d’une déconstruction/reconstruction ou d’une vente. Ces deux options présentent certains avantages.

    Dans le cas d’une cession, en plus de pouvoir bénéficier de plus-value financière, la société de logement contribue à favoriser l’accès à la propriété pour les ménages à revenus modestes et à induire une certaine forme de mixité dans les quartiers.

    L’option de déconstruire présente, en revanche, l’avantage de préserver le foncier disponible dans le giron public en vue de la (re)construction de nouveaux logements publics sur le site. C’est un élément important au regard de la volonté du Gouvernement, exprimée dans la DPR, de limiter l’artificialisation des sols.

    Les désavantages de ces deux options ne sont pas non plus insignifiants.

    La cession voit de facto le secteur public perdre la main sur un foncier toujours plus précieux. Il est donc essentiel pour la société de logement d’établir clairement l’inopportunité d’une revalorisation du foncier pour un futur projet de création de logements publics. Elle aboutit également à un transfert à l’acquéreur d’un logement qui n’est pas nécessairement en ordre et dans lequel il devra parfois consentir d’importants investissements pour le remettre aux normes.

    La déconstruction a, en revanche, un coût économique et environnemental important. En dehors d’une approche circulaire encore embryonnaire dans ce secteur, elle génère, en effet, une production de CO2 considérable et une quantité de déchets dits « de construction » difficiles et coûteux à prendre en charge.

    Les deux désavantages majeurs de ces deux options demeurent toutefois la perte immédiate de rentrées financières locatives et la réduction de l’offre en logement d’utilité publique alors que la demande ne cesse de croître.

    C’est pour cette raison que j’entends, dans le cadre du futur droit de tirage de création de logements, mettre en place un mécanisme qui permettra, en parallèle de l’augmentation de l’offre de logements, de reconstituer le parc existant vendu ou déconstruit.

    De la sorte, j’entends induire dans l’approche immobilière des sociétés de logement public une vision non plus linéaire, mais circulaire, pour parfaire la démarche de pérennisation de l’offre existante entamée par le biais du plan de rénovation.

    Enfin, pour répondre à la dernière question, il revient à la SWL de recevoir et d’analyser les projets de plan de rénovation des SLSP et de me transmettre, pour chacun d’eux, son analyse immobilière et sociale pour décision.