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L'aviation verte

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2020
  • N° : 171 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 16/12/2020
    • de CLERSY Christophe
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    La Wallonie a décidé de soutenir des programmes de recherche dans le secteur de l'aviation. Un budget de 25 millions d'euros a ainsi été dégagé afin de fédérer plusieurs programmes de recherche dans les différents centres wallons dans le cadre de partenariats d'innovation technologique en lien avec le secteur.

    Cette mutualisation des moyens devrait servir à rendre le secteur aéronautique plus vertueux vis-à-vis de l'environnement.

    La question des avions utilisant de l'hydrogène est au centre des débats. Alors qu'il y a encore un an, les experts aéronautiques estimaient peu probable l'utilisation massive de l'hydrogène avant 2050 dans l'aviation commerciale, la crise du coronavirus et les préoccupations climatiques ont semble-t-il bouleversé ces prévisions. Airbus semble ainsi estimer désormais que l'un de ses trois appareils propulsés à l'hydrogène entrerait en service en 2035.

    Jean-Brice Dumont, directeur de l'ingénierie d'Airbus, reconnaissait néanmoins dans une récente interview sur France 24 que l'hydrogène utilisé devait être vert, « sinon on a perdu dans la production d'hydrogène qui émettra du dioxyde de carbone ce qu'on a gagné dans l'avion, donc c'est un peu hypocrite ».

    Quelle analyse politique Monsieur le Ministre fait-il de ce propos ?

    Quelles mesures a-t-il prises pour que la filière industrielle de production d'hydrogène « vert » - par exemple par électrolyse de l'eau en utilisant les surplus d'électricité renouvelable - soit développée dans ce cadre ?

    Comment éviter ces écueils ?

    Quelles sont les balises prévues pour agir proactivement en ce sens ?
  • Réponse du 28/12/2020
    • de BORSUS Willy
    Comme le souligne l'honorable membre, la crise et les préoccupations climatiques ont accéléré les ambitions en matière d’utilisation de l’hydrogène dans l’aviation commerciale.

    Afin de respecter ces objectifs, les industries du continent vont devoir se tourner vers des technologies de rupture pour concevoir des produits capables d’infléchir les prévisions d’émissions de CO2, inacceptables en l’état.

    C’est pourquoi j’ai effectivement présenté au Gouvernement wallon le projet de partenariat d’innovation intitulé « PIT aéronautique – pour une industrie aéronautique wallonne ambitieuse et durable », d’une durée totale de 36 mois. Il ambitionne d’établir les bases technologiques indispensables pour atteindre les objectifs de décarbonation fixés par la Commission européenne et de soutenir le secteur aéronautique wallon dans cette transition écologique pour les trois prochaines années.

    Pour atteindre les objectifs globaux de frugalité énergétique et de neutralité carbone, le consortium constitué de grandes entreprises, de PME, de centres de recherche agréés et d’un organisme de recherche, a ciblé les thématiques majeures et définies 6 tâches techniques : aérostructures, propulsion, système de communication, matériaux et procédés, digitalisation et simulation numérique et industrie 4,0.

    Le Gouvernement a décidé d’octroyer à ce partenariat une subvention d’un montant de 41,423 millions d’euros, permettant de couvrir les 18 premiers mois de la recherche à partir du 1er novembre dernier.

    Évidemment, les évolutions apportées dans ce projet n’auront un sens que si l’hydrogène utilisé est produit par électrolyse avec de l’électricité provenant de sources décarbonées [éoliennes, marée, barrages, solaire…], mais c’est également vrai pour tous les autres moyens de transport, ainsi aussi notamment pour les voitures 100 % électriques.

    L’hydrogène peut être produit à partir de plusieurs sources d’énergie. On qualifie l’hydrogène de « vert » lorsque celui-ci est produit à partir d’énergies renouvelables, par exemple par électrolyse de l’eau en utilisant les surplus d’électricité renouvelable. Une autre façon de produire de l’hydrogène « vert » dans des Régions comme la nôtre, où la production d’énergie renouvelable est encore faible, est d’utiliser des Contrats d’approvisionnement d’énergie [ou « Power Purchase Agreement – PPA »] qui garantissent l’origine renouvelable de l’électricité. On parlera d’hydrogène bleu lorsque les émissions de CO2 sont neutralisées [stockées ou réutilisées dans d’autres processus], d’hydrogène jaune, lorsque l’électricité est produite à partir d’énergie nucléaire ou d’hydrogène gris lorsque celui-ci est produit à partir de méthane.

    Aujourd’hui il existe un consensus au niveau européen pour considérer, à court terme, l’hydrogène vert, bleu et jaune pour le développement de la filière. En effet, même la Commission européenne dans ses dernières communications admet que de passer directement à la production d’hydrogène vert ne sera pas faisable, car il implique une modification du mix énergétique de certains pays ou de la construction d’énormes capacités de production d’énergies renouvelables. La plupart des états membres qui se sont prononcés politiquement sur le sujet présentent une stratégie passant par l’hydrogène bleu à court terme pour se diriger vers de l’hydrogène vert à long terme.

    Il est à noter que ces choix sont avant tout politiques et sont liés à la stratégie de génération d’énergie des états concernés. La stratégie wallonne en matière de gestion de l’énergie est décrite dans la DPR. Il est bien sûr évident que nous devons à terme produire de l’hydrogène vert, sans quoi nous manquerons notre objectif initial de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Des travaux spécifiques sur la filière hydrogène devraient commencer prochainement au niveau de l’Administration de l’Énergie.