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La pollution de l'Escaut

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 153 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 05/01/2021
    • de AHALLOUCH Fatima
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    L'Escaut a fait l'objet de plusieurs importants épisodes de pollution en quelques mois.

    Le 28 avril dernier, j'interrogeais Madame la Ministre par écrit sur la grave pollution de l'Escaut survenue le 22 avril à Pecq, en Wallonie picarde, question malheureusement demeurée sans réponse. D'importantes opérations de sauvetage ont dû être mises en place. Malgré cela, ce sont des milliers de poissons qui ont péri.

    Peut-elle nous donner les informations dont elle dispose dans ce dossier ?

    Quand cette fuite a-t-elle eu lieu ? Quelle en est la cause ? S'agit-il d'une erreur humaine, d'un problème technique ?

    Quelles sont les conséquences précises de cette pollution sur la faune et la flore ?

    L'Escaut continue son chemin vers la Flandre. Quels sont les contacts avec ses homologues flamands ?

    Quelles sont les suites qui seront données juridiquement à cette catastrophe écologique ?

    Quelles mesures pourraient être prises en faveur de la faune et la flore de l'Escaut ?

    Aujourd'hui, ce sont deux nouveaux épisodes de pollution aux hydrocarbures qui ont entraîné notamment l'arrêt de la navigation fluviale pendant plusieurs jours au niveau de Tournai.

    A-t-elle eu connaissance de ces épisodes de pollution ? L'origine et les responsabilités sont-elles établies ?

    Quelles sont les conséquences de cette nouvelle pollution sur la faune et flore de l'Escaut ?

    Une étude sur les conséquences de ces pollutions à répétition est-elle prévue ?

    Les acteurs locaux appellent à davantage de coopération entre Français et Belges pour ce fleuve partagé. Quelles pistes sont sur la table ?
  • Réponse du 27/01/2021
    • de TELLIER Céline
    L’épisode de pollution de l’Escaut auquel l’honorable membre fait référence est celui lié à la rupture d’une berge d’un bassin de décantation appartenant à l’entreprise TEREOS située en France près de Cambrai (soit à environ 40 km en amont du premier village belge Bléharies). Cet incident industriel a entraîné le déversement de 100 000 m³ de liquide composé essentiellement de matières organiques dans l’environnement (une partie dans le voisinage immédiat, une partie dans l’Escaut).

    Concernant la flore de l’Escaut, celle-ci ne semble pas avoir été impactée par la pollution. En revanche, les macro-invertébrés ont été et sont toujours impactés, ce qui traduit des effets négatifs significatifs sur la chaîne trophique du cours d’eau.

    Concernant la faune piscicole, la perte de la biomasse en Wallonie a été quasi-totale lors de l’épisode de pollution et, plusieurs mois après, les populations sont toujours fortement impactées, avec en août dernier une perte toujours significative de plus de 90 % de la population. En conséquence, les impacts indirects sur les ressources alimentaires des espèces insectivores, telles que les chauves-souris, et piscivores, comme le grèbe, le martin-pêcheur, le héron… sont plausibles.

    L’impact sur la qualité des eaux (diminution asphyxiante de l’oxygène) caractéristique de cette pollution pour laquelle les autorités françaises avaient omis d’activer le système d’avertissement et d’alerte de la Commission internationale de l’Escaut a également pu être simulé et reconstitué fidèlement par notre modèle PEGASE (le modèle PEGASE permet de simuler la qualité des eaux de surface en fonction des différentes pressions environnementales décrites sur les différents bassins hydrographiques ) en bonne concertation du SPW, de la VMM flamande et des différentes agences françaises.

    L’impact en Flandre fut quant à lui très limité grâce à l’alerte cette fois bien lancée par la Wallonie et une aération massive du fleuve.

    L’honorable membre aborde deux nouveaux épisodes de pollution aux hydrocarbures qui ont entraîné notamment l'arrêt de la navigation fluviale pendant plusieurs jours au niveau de Tournai. Qu’elle sache que, si l’origine et les responsabilités n’ont pas encore été établies, il n’y a pas eu d’impact visible sur la faune et la flore s’agissant d’une portion canalisée de l’Escaut et d’une pollution de surface de très faible épaisseur. Aucune mortalité de poisson n’a été constatée par le Département de Police et des Contrôles.

    Une nouvelle pêche électrique est envisagée en 2021, afin de procéder à un nouveau comptage. Les résultats vont à la fois intégrer les conséquences de la pollution venant de France et les autres pollutions. Le suivi 2021 permettra en réalité d’évaluer la restauration naturelle piscicole de l’Escaut et les effets potentiels des premiers rempoissonnements.

    Un avocat a été désigné par le SPW afin de suivre le dossier de près. Des procès-verbaux ont été dressés par les services du SPW ARNE. Ceux-ci sont actuellement entre les mains du Parquet du Hainaut et sont couverts par le secret de l’information. Une information judiciaire a également été ouverte en France.

    Par ailleurs, des contacts ont été pris avec les autorités compétentes françaises pour s’assurer d’une bonne application des mécanismes de responsabilité environnementale prévus par la Directive 2004/35/CE. Cette directive permet d’obtenir une réparation du dommage environnemental indépendamment des actions judiciaires pénales.

    Les contacts avec les homologues flamands se déroulent au sein de la Commission internationale de l’Escaut (CIE) ainsi qu’avec les homologues français et hollandais.

    Une évaluation du fonctionnement du système d’avertissement et d’alerte de la CIE (SAAE) par les utilisateurs des différents centres principaux d’alerte internationaux du bassin hydrographique de l’Escaut a été réalisée et les différentes délégations de la CIE ont rappelé l’importance à tous d’utiliser les canaux officiels de communication mis en place par la CIE, de suivre les procédures mises en place au sein des autorités nationales, membres de la CIE, et de veiller à la formation continue du personnel relativement à la connaissance et à l’utilisation de l’outil SAAE qui relève de la responsabilité de chaque administration/organisme national/régional compétent en la matière.

    Concernant l’impact de l’incident sur l’Escaut, les chefs de délégation de la CIE ont convenu, lors de leur assemblée plénière du 15 décembre dernier, d’un point d’action spécifique de suivi de la restauration de l’Escaut et confié ce mandat au groupe technique compétent en matière de qualité de l’eau afin de procéder à l’échange de données de surveillance de la qualité biologique de l’Escaut entre les experts français, wallons, flamands et hollandais.

    Le vendredi 4 décembre, Michel Lalande, préfet du Nord, a installé un comité de pilotage de la restauration écologique de l’Escaut, en présence des élus locaux, des partenaires wallons et flamands, de Tereos et de l’ensemble des acteurs concernés (associations de protection de l’environnement, parcs naturels régionaux, syndicat mixte de l’Escaut et de ses affluents…). Ce comité vise plusieurs objectifs, mais il est évident que cette plateforme d’échange garantit une parfaite coopération entre Français et Belges.

    Par ailleurs, le Service de la Pêche du SPW a lui aussi réuni l’ensemble des acteurs locaux avant cette rencontre du 04 décembre afin de faire le point sur les mesures possibles de restauration de la faune piscicole. La reconstitution de la faune par la réhabilitation des habitats a été privilégiée. Une série de projets pourraient être mis en place afin d'améliorer le milieu, que ce soit dans le cours principal de l’Escaut ou aux abords du fleuve. À titre d'exemples, le maintien de zones de faible profondeur susceptibles d’accueillir des roselières, la possibilité de reculer certaines berges pour pouvoir rétablir des berges naturelles en conservant une protection contre le batillage, la réhabilitation ou l'amélioration de la connectivité latérale du fleuve (reconnexion de bras morts) ont été évoqués.

    En ce qui concerne la faune, la reconstitution va essentiellement s'opérer par la migration des espèces à partir des zones non touchées en amont et en aval. Il est effectivement impossible de reconstituer les populations de macro-invertébrés ni même de poissons présents dans le lit de l'Escaut avant la pollution. Pour les poissons, quelques déversements ont été opérés dans le lit principal de l'Escaut. Ces empoissonnements ne sont pas consécutifs aux pollutions, ce sont des actions réalisées annuellement par les fédérations halieutiques grâce au financement du fonds budgétaire pour la gestion piscicole et halieutique en Wallonie. Ces empoissonnements ne constituent qu'un tout petit coup de pouce pour la reconstitution des populations. Les quantités déversées ne sont absolument pas comparables aux biomasses présentes avant la pollution.