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La disparition des moineaux

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 159 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 05/01/2021
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Nous le savons, la présence de la nature dans les espaces ruraux et urbains est souvent un bon indicateur de la santé de ces lieux. La présence d'espèces présentes depuis des centaines d'années dans des lieux bien précis est souvent révélatrice d'une certaine stabilité de l'écosystème local et permet ainsi aux hommes de constater un changement du milieu dans lequel ils vivent ou pas. À l'inverse, l'installation de certaines espèces dites « exotiques » chez nous est aussi un autre indicateur de ce changement d'habitat naturel dont certaines espèces font face.

    C'est cette combinaison multifactorielle qui est, malheureusement, la cause de la disparition des moineaux à Bruxelles. Ces petits oiseaux, si familiers, sont victime de la combinaison des deux phénomènes décrits ci-dessus, provoquant une véritable hécatombe dans leur population (il ne reste plus que 5 % de moineaux à Bruxelles). L'usage de pesticides qui décime la population d'insecte, nourriture de ces oiseaux, combiné à l'apparition du virus de la malaria aviaire, transmise par un moustique apparu avec le réchauffement de la température, a littéralement anéanti cette espèce.

    Même si la Wallonie ne présente pas les mêmes caractéristiques urbaines que Bruxelles, les différences ne sont, à première vue, pas si importantes. Nous pouvons donc être en droit de penser que ce qui se passe à Bruxelles peut tout aussi bien se produire en Wallonie.

    La disparition d'une espèce animale ou végétale dans notre région, aussi rare soit-elle, devra toujours être perçue comme un échec de notre politique de préservation et n'est pas sans conséquence sur l'équilibre de la biodiversité et, par extension, l'existence de l'écosystème.

    Afin de préserver cette espèce animale, mes questions visent à connaître l'état de la situation concernant le nombre d'individus de moineaux en Wallonie.
    Constate-t-on une diminution de cette dernière ou, au contraire, une augmentation ?

    Quels enseignements pouvons-nous tirer de la dernière campagne d'évaluation de Natagora ?

    Quelle collaboration avec l'ASBL Natagora (ou une autre) est envisagée pour apporter des solutions à cette possible diminution de la population de moineaux en Wallonie ?

    Des concertations avec les communes sont-elles prévues afin de sensibiliser ces dernières à ces problématiques ?
    Si tel est le cas, quels sont les moyens qui seront mis en œuvre ?
  • Réponse du 27/01/2021
    • de TELLIER Céline
    Le Moineau domestique reste en Wallonie un oiseau commun et largement distribué.

    D’après le dernier rapportage transmis à l’Europe pour la période 2013 à 2018, les effectifs wallons du moineau domestique sont estimés à environ 190 000 couples nicheurs. Dans le dernier atlas des oiseaux nicheurs paru en 2011, les effectifs entre 2001 et 2007 étaient estimés à 180 000 couples. La comparaison des chiffres de cet atlas avec celui de 1973-1977 indique une aire de répartition en Wallonie inchangée et un déclin de 16 % des effectifs en trente ans, constaté uniformément sur l’ensemble du territoire wallon.

    Le programme de surveillance des oiseaux communs par points d'écoute, mené par AVES-Natagora avec le soutien de la Région wallonne, conclut, durant une période de surveillance allant de 1990 à 2018 à la relative stabilité de l’espèce. Ceci permet de penser que la diminution historique aurait surtout été sensible avant les années 1990.

    Cependant, ce programme concerne davantage les milieux ruraux que les milieux urbains, il est donc possible que la tendance négative dans les grandes villes soit sous-estimée.

    D’après le dernier atlas des oiseaux nicheurs, le déclin des moineaux domestiques peut être imputé à la raréfaction considérable des sites de nidification et des ressources alimentaires. La pénurie de nourriture résulte à la fois de l'affaiblissement de l'entomofaune et de la carence en graines de plantes sauvages, nécessaires tout au long de l'année, en particulier durant la période critique de l'hiver et du début du printemps. Les sites de nidification potentiels sont quant à eux limités par la diminution de la capacité d'accueil des édifices modernes et par la disparition des fermes traditionnelles.

    Le déclin urbain est attribué pour partie à une prédation accrue, aux conséquences de l'accroissement de la circulation (intoxications par les méthylnitrites des gaz d'échappement) et à la raréfaction des friches.

    Le programme de surveillance susvisé pointe parallèlement une diminution de plus de 5 % des effectifs du moineau friquet, espèce davantage inféodée aux milieux agricoles.

    Ceci rejoint le constat établi par la synthèse sur l’évolution des populations des oiseaux communs parue en décembre dernier (http://etat.environnement.wallonie.be/contents/indicatorsheets/FFH%208.html).

    Cette synthèse met une nouvelle fois en évidence que ce sont les espèces d’oiseaux inféodées aux milieux agricoles qui régressent le plus fortement, ceci en raison de l’intensification des pratiques agricoles durant ces dernières décennies.

    Globalement, freiner le déclin de la biodiversité, dont singulièrement celui des oiseaux, implique des actions ambitieuses au sein du milieu agricole en vue de soutenir des pratiques plus respectueuses de l’environnement et de la biodiversité et de maintenir une part significative des éléments du paysage nécessaires à la biodiversité.

    À ce sujet, les négociations de la future PAC en cours actuellement ont une importance fondamentale.

    Dans le cadre de mes compétences, outre le soutien financier du programme de suivi de la biodiversité piloté par mon administration, dans lequel Natagora a un rôle important, je veille à mettre en place un certain nombre d’actions qui doivent contribuer à stopper le déclin de la biodiversité.

    Il s’agit notamment, en concertation avec mon collègue Willy Borsus, des mesures agroenvironnementales qui visent à préserver un réseau d’espaces favorables à la biodiversité au sein du milieu agricole, de la réduction de l’utilisation des pesticides, de la plantation d’un réseau d’arbres et de haies, de l’augmentation significative des aires protégées, de la mise en place d’un réseau écologique wallon ou encore de la révision des aides aux communes en faveur de la biodiversité.