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L'avis de la Cour de justice de l'Union européenne sur l'interdiction de l'abattage rituel d'animaux sans étourdissement

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 162 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 08/01/2021
    • de TZANETATOS Nicolas
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Depuis le 1er septembre 2019, les abattages d'animaux sans étourdissement préalable sont totalement interdits en Wallonie, même pour les rites religieux. Le Parlement wallon s'est prononcé à l'unanimité dans ce sens en 2018. La Flandre a également interdit cette pratique.

    Ces dispositions régionales ont été attaquées par diverses associations juives et musulmanes auprès de la Cour constitutionnelle. Le motif invoqué étant que l'interdiction flamande et wallonne de l'abattage rituel est manifestement contraire à la liberté religieuse inscrite dans la Constitution belge et dans la Charte de l'Union européenne. La Cour constitutionnelle a alors décidé de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne.

    La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a donné raison aux Région flamande et wallonne concernant l'abattage d'animaux sans étourdissement préalable. La CJUE a donc été à l'encontre de l'avis de l'avocat général qui, le 10 septembre dernier, avait considéré qu'interdire l'abattage d'animaux sans étourdissement, y compris pour les méthodes particulières d'abattage prescrites par des rites religieux, n'était pas autorisé par le droit de l'Union européenne.

    Cet arrêt de la CJUE est une excellente nouvelle pour le bien-être animal. Il confirme que la législation flamande et wallonne est un juste équilibre entre le bien-être animal et la liberté de religion au regard du droit de l'Union. De plus, il indique que ce décret s'inscrit dans un contexte sociétal et normatif en évolution, qui se caractérise par une sensibilisation croissante à la problématique du bien-être animal.

    Cependant, cet arrêt ne tranche pas définitivement le litige. Il représente un éclaircissement sur l'interprétation du droit de l'Union. Il appartient dorénavant à la Cour constitutionnelle belge de prendre une décision finale sur la légalité du décret wallon.

    Madame la Ministre peut-elle faire part de son analyse de cette décision de la CJUE ?
  • Réponse du 26/02/2021
    • de TELLIER Céline
    En 2018, le Parlement wallon a, en effet, adopté à l’unanimité l’obligation d’étourdissement réversible avant l’abattage des animaux, à l’instar de la Flandre. À la suite de procédures de recours en annulation devant la Cour constitutionnelle, cette dernière a formulé des questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne.

    Le 17 décembre dernier, la Cour de justice de l’Union européenne a considéré que les États membres étaient bien en mesure d’imposer, dans le cadre de l’abattage rituel, un procédé d’étourdissement réversible et insusceptible d’entraîner la mort.

    Je me réjouis de cette décision, qui confirme l’orientation volontariste de la Wallonie. Je soulignerai deux éléments saillants qui ont orienté la décision de la Cour.

    Premièrement, la Cour a reconnu l’importance grandissante du bien-être animal dans nos sociétés. Elle admet que le législateur a cherché à améliorer le bien-être des animaux, un objectif d’intérêt général.

    Je salue cette position très forte de la Cour. La préoccupation à l’égard des animaux n’est pas de la sensiblerie, mais un enjeu contemporain majeur.

    Deuxièmement, la Cour a examiné le caractère proportionné de l’ingérence dans la liberté de manifester sa religion. Elle considère que le décret ne l’excède pas, et respecte la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. L’ingérence de cette mesure est en effet limitée à un aspect de l’abattage rituel, ce dernier n’étant pas interdit en tant que tel.

    Il me semble en effet que la ritualisation de la mise à mort des animaux, qu’elle soit religieuse ou pas d’ailleurs, est plus large. Je suis convaincue que des alternatives respectueuses des animaux et des cultes sont possibles. J’ai d’ailleurs demandé à mon administration de travailler en ce sens avec le secteur.

    Cette avancée, confirmée par l’Union européenne, ne doit pas nous faire oublier qu’une mise à mort digne des animaux est une question plus vaste et complexe. En ce sens, j’ai souhaité renforcer le contrôle en abattoirs, mais aussi favoriser le développement d’alternatives comme l’abattage à la ferme.

    En conclusion, si je me réjouis de cette décision, je condamne toute instrumentalisation de ce débat pour stigmatiser des personnes. Je refuse que la défense du bien-être animal, une cause noble et légitime, serve des intérêts obscurs. La solidarité et l’empathie sont indispensables pour que notre société soit plus respectueuse des vivants, humains et animaux.