/

La lutte contre la discrimination au logement sur base de la fortune

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 103 (2020-2021) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 26/01/2021
    • de LEPINE Jean-Pierre
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    Le droit à un logement décent est consacré par l'article 23 de notre Constitution. Mais, dans la réalité, obstacles et discriminations rendent l'accès au marché locatif difficile.

    Les dernières enquêtes menées sur le sujet révèlent que la discrimination au logement sur base de critères comme l'âge, la couleur de peau reste importante en Wallonie, suscitant, à raison, l'émoi des sociaux-démocrates, dont je suis.

    Nous devons toutefois déplorer que d'autres formes de discrimination sont de nature à aggraver la crise du logement à laquelle nous nous efforçons, également à l'échelon local, de faire face.

    En Belgique, la loi interdit la discrimination sur base de 19 critères dits « protégés », dont celui de la fortune, sur lequel je souhaite ici m'attarder.

    Pourtant, en parcourant les annonces immobilières, il est aisé de constater que les mentions « CDI exigé », « fournir contrats de travail », « pas de CPAS » sont, hélas, légion. Certaines annonces vont même jusqu'à fixer des revenus minima comme critère d'exclusion.

    Dans ce prolongement, de nombreux témoignages de candidats-locataires sur les réseaux sociaux ou lors de nos permanences ne disent pas autre chose. Le groupe Facebook « Logement à louer sans discrimination Wallonie », qui regroupe quelque 12 000 membres, regorge de témoignages malheureux en la matière.

    S'il est tout à fait légitime qu'un propriétaire bailleur s'assure de la solvabilité d'un candidat-locataire, convenons que certaines pratiques sont outrancières. On considère généralement, en la matière, que le loyer ne doit pas excéder 30 % des revenus du ménage.

    À l'heure où de nombreuses personnes sont, ou seront, contraintes de devoir émarger au chômage temporaire, au revenu d'intégration sociale, à l'aide sociale équivalente, alors que, en dépit des efforts significatifs auxquels consent notre Gouvernement pour la création et la rénovation de logements publics, l'offre de ces logements reste bien inférieure à la demande, si nous laissons persister de tels comportements, a fortiori illégaux, c'est à un véritable drame social que nous assisterons.

    Dans le cadre du Plan de lutte contre la discrimination dans l'accès au logement, vous annonciez, entre autres, la mise en place de contrôles mystères qui devraient permettre d'identifier ces pratiques et de les sanctionner.

    Sur quels critères de discrimination ces contrôles porteront-ils ? Le critère de la fortune sera-t-il inclus ?

    Quelles sanctions encourront les bailleurs ou intermédiaires en infraction ?

    Outre ces contrôles mystères serait-il envisageable de s'adjoindre le concours des plateformes bien connues telles qu'Immoweb ou Immovlan afin qu'une fonctionnalité « Signaler une discrimination » soit ajoutée afin que des annonces évoquant des indications discriminantes puissent ne plus obtenir de publicité ?
  • Réponse du 08/02/2021
    • de COLLIGNON Christophe
    La note d’orientation que j’ai présentée au Gouvernement wallon en décembre dernier contient plusieurs mesures visant à lutter activement contre la discrimination dans le secteur du logement, parmi lesquelles les contrôles mystères. Ceux-ci seront réalisés sur la base d’une plainte, mais aussi d’initiative, afin de maximiser leur pouvoir dissuasif. À cette fin, le groupe de travail « discriminations » qui réunit des acteurs du secteur du logement a été invité à réfléchir aux critères devant permettre de cibler certaines zones géographiques, ou certains types de propriétaires ou de logements, afin d’encadrer la réalisation de ces contrôles. J’ai, par ailleurs, pris des contacts avec le Centre d’études en habitat durable (CEHD) afin de dégager des pistes en la matière.

    Les contrôles mystères ont pour vocation de détecter une discrimination basée sur l’un ou plusieurs des critères protégés au sens de l’article 4, 5° du décret du 6 novembre 2008 relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination. Le critère basé sur la fortune sera donc concerné.

    Lorsqu’une discrimination sera constatée, si le parquet ne se saisit pas du dossier dans un délai à fixer (l’intéressé échappant dès lors au risque de poursuites et d’une sanction d’ordre pénale), la personne indélicate sera susceptible de se voir infliger une sanction administrative.

    La lutte contre les discriminations doit néanmoins viser, avant tout, un objectif de prévention, en contribuant à éviter la commission des infractions ou à corriger le comportement des personnes qui en ont commis. Des mesures de sensibilisation sont donc également en préparation.

    Ainsi, des capsules vidéos contribueront à définir la discrimination, déconstruire les préjugés et les stéréotypes ou avertir les citoyens des sanctions encourues lorsqu’ils se livrent à des comportements discriminants. De même, des brochures, réalisées en collaboration avec Unia, informeront le public « logement » sur ce qui existe et est mis en œuvre en matière de lutte contre la discrimination.

    La lutte contre les discriminations exercées par les agents immobiliers fait également partie du plan. Ces derniers suivent déjà, lors de leur formation préalable à l’accès à la profession, un module dédié à la discrimination. Notre volonté est que ce sujet soit aussi abordé de manière régulière, dans le cadre de leur formation permanente et continue. Des formations semblables seront également dispensées à destination des communes, CPAS, AIS, SLSP et FLW.

    Enfin, concernant la question de l’honorable membre relative aux plateformes Immoweb et Immovlan, je souscris à la mesure proposée et elle sera soumise aux membres du groupe de travail constitué en la matière, le plan ayant vocation à évoluer. Il convient cependant de souligner que tout signalement devra être contrôlé et ne pourra entraîner de suppression automatique de l’annonce dénoncée. Dès lors, la charge de travail supplémentaire qui découlerait de cette mesure et sa faisabilité devront être analysées.